Les plates-formes sociales et leurs problèmes de gestion de la diffamation, harcèlement et intimidation

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Ce n’est pas nouveau la diffamation, le harcèlement et l’intimidation. Ça a existé de tous les temps et oui ça existe aussi sur le Web et sur les médias sociaux. Les lois, les forces de l’ordre et les avocats sont justement là pour protéger les victimes. Malheureusement, les plaintes doivent être prises au sérieux, les lois doivent s’appliquer, les forces policières doivent avoir les ressources pour agir et les victimes doivent avoir du fric pour faire respecter leurs droits. Mais qu’en est-il des plates-formes sociales elles-mêmes?

Elles ont toutes leurs mécanismes de plaintes et de blocage du harceleur-diffameur-intimidant. Mais ces mécanismes ne fonctionnent malheureusement pas. On peut certainement bloquer un trou de cul sur Twitter et Facebook. Mais essayez de faire disparaître un profil carrément diffamant relève de l’exploit. Pour preuve, le profil du désormais célèbre JeffSabres sur Twitter est toujours en ligne, malgré les messages répétés du sergent-détective chargé de l’enquête et des centaines de signalements du profil abusif par les internautes. C’est que Twitter est en Californie, qu’ils ont des centaines de millions de comptes d’usagers à gérer, qu’une force de police d’un pays étranger n’a pas de juridiction sur l’entreprise et qu’ils ont sans doute d’autres chats à fouetter. D’ailleurs, pour vraiment faire effacer ce compte particulier, les policiers devraient passer par Interpol qui transmettrait la demande au FBI qui elle entrerait en contact avec Twitter. Disons que pour une affaire d’importance nationale, ce serait sans doute opportun. Mais pour un petit connard?

Quant à Facebook, le problème est le même. En décembre dernier un profil vraiment dégradant de ma personne est apparu. Des dizaines de mes amis ont signalé ce profil, je l’ai moi-même fait à plusieurs reprises, j’ai déposé une plainte officielle et on me dit l’affaire classée parce qu’il est pratiquement impossible pour la police de faire bouger Facebook. Le même type de problématique qu’ils ont avec Twitter se répète avec Facebook. He oui, ce profil scandaleux est toujours en ligne de même que celui de JeffSabres discuté plus haut.

Quant aux forces de l’ordre, ils doivent avoir les ressources pour agir avec célérité. Malheureusement au Canada, ce sont les affaires de cyberpédophilie qui sont le focus premier des limiers du cyberespace. Les simples trucs de harcèlement, d’intimidation et de nuisance publique, ne sont pas réellement considérés et à moins qu’elles ne contiennent des menaces de mort explicites, qu’elles prennent une proportion quantitative et qualitative gigantesque (comme pour le cas JeffSabres) ou qu’elle prenne une dimension politique, vous aurez peu de chance que votre dossier soit un jour traité.

Vous pouvez aussi prendre l’affaire dans vos propres mains, engager un avocat et poursuivre au civil (si encore vous connaissez le diffameur et qu’il est dans une juridiction qui vous est accessible). C’est ce que je fis dans un cas particulier. Cela me coûte jusqu’à présent $10 000 de ma poche, j’attends encore le jugement et il est possible que la partie adverse décide d’aller en appel.

Les médias sociaux sont donc un lieu extraordinaire de socialisation, mais ils sont aussi un Far West sans foi ni loi que même ses plus importants bénéficiaires (les plates-formes elles-mêmes) n’arrivent pas à réguler convenablement…

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Commentaires

  1. Pierre Longpre

    Comme je te comprends.

    Et c’est pareil pour l’atteinte à la réputation. Après avoir investi 35 000 $ d’honoraires d’avocats, J’ai tout laissé tomber ne voyant pas où cela allait s’arrêter…

    On l’a la justice… ouais mais à quel prix ?

    Je me suis rendu compte que je n’en avais pas les moyens !

    Bonne chance

  2. Caroline Gendron

    Ça rejoint un peu ce que j’ai écrit le 1er août 2010 : http://resowebcaro.webfeminin.com/la-cyberintimidation-et-le-cyberharcelement/.

    Désolée d’avoir mentionné mon billet que j’ai écrit en période où j’avais reçu une menace de mort.

    Cette histoire est passée mais laissera des traces pour toujours.

    Merci Michelle!

  3. Olivier

    Celui qui perd devrait payer les 2 avocats.

  4. Jean-François Ouellette

    @Olivier
    Contrairement aux États-Unis, au Québec chaque partie paye pour son avocat. Pour avoir à payer les frais des deux avocats, il faut que l’autre partie démontre qu’on a tenté d’abuser de nos droits, ce qui est très difficile à faire comme preuve. La partie qui perd est généralement condamné aux dépens, une somme qui de nos jours est dérisoire par rapport aux honoraires d’avocats.

    Un avocat a lui seul suffit pour monter une facture d’honoraire à 10 000 ou 35 000.

    Merci Michelle!

    Je suis d’accord que les plate-formes elles-mêmes devraient être plus efficaces dans leur gestion des plaintes. Cela éviterait d’en arriver aux avocats. Les plate-formes ont entre leurs mains l’image et la réputation d’individus, et ils gèrent les plaintes comme de simples bugs informatiques.

  5. Roger Guévremont

    J’ai malheureusement peur que nous soyons toujours aux prises avec ce type d’imbéciles.

    Pourquoi? Parce qu’il sera très difficile de séparer les petits imbéciles des vrais trou-du-cul.

    Les exemples cités par Michelle et Caroline sont très probants.

    Mais entre le petit con qui profite de l’anonymat et le vrai harceleur, la ligne peut être mince: où commence la plainte à la police ou à Twitter?

    C’est facile à dire, mais de façon générale mieux vaut ne pas s’occuper de ces gens.

  6. Le Pixel Solitaire

    Ce genre de situation est très triste mais que je crois que ce débat, surtout dans le cas présent qui nous intéresse, dépasse largement le cadre des nouvelles technologies pour déborder dans les rouages de la désinstitutionnalisation.

  7. Liens intéressants sur les cyber : intimidation, harcèlement et réputation | R W C ©

    […] Les plates-formes sociales et leurs problèmes de gestion de la diffamation, harcèlement et intimid… par @MichelleBlanc; […]

  8. Intercesio

    Ce que je trouve étrange, c’est qu’on continue (à cause d’un certain vouloir électronique) à gérer la responsabilité des “hébergeurs” de contenu différement de celle des “modérateurs”.

    Je ne vois pas pourquoi le traitement devrait être différent du régime classique de la responsabilité du fait des biens (je pense plus particulièrement à l’obligation d’entretien qu’a un propriétaire d’immeuble)

    “Le propriétaire d’un immeuble se doit d’en faire un usage qui ne porte pas préjudice à autrui et de maintenir sa propriété en bon état.”

    Alors pourquoi les propriétaire de plateformes sociales n’auraient pas le devoir d’acquérir les ressources suffisantes pour maintenir un climat favorable.

    Je comprend qu’ici, le vrai fait fautif revient à l’auteur du geste. Ce que je ne comprend pas, c’est pourquoi qu’on oblige pas ces organisations à prendre le status de modérateur du contenu dont ils facilitent la diffusion.

    Je serais curieux de savoir si quelqu’un partage mon avis. L’information est rare à ce sujet

    Bonne journée à tous

  9. Liens intéressants sur les cyber : intimidation, harcèlement et réputation | R W C

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