Huffington Post Quebec, la diversité, les blogueurs et l’argent

Ça me fait toujours rire d’un gros rire gras l’intérêt soudain de certains journalistes pour les blogueurs et le fait de les payer ou pas. Longtemps les blogueurs ont été vus comme des scribes de deuxième classe. Ce n’est pas sérieux un blogue. Ils n’ont pas la légitimité, la profondeur voire l’éthique (sic) d’un journaliste. Puis tout d’un coup, on s’inquiète que certains blogueurs acceptent de bloguer gratuitement pour un média ? Faudrait se faire une idée là. Ou bien les blogueurs sont de la merde et ils ne méritent pas un salaire ou bien ils sont pertinents et méritent rémunération.

C’est l’apparition hier du Huffington Post Québec, qui depuis des mois défraie la chronique chez les concurrents. D’un souffle la FPJQ clame l’importance et les bienfaits de la diversité médiatique et d’un autre souffle, certains de ces membres voient en Huffington « une concentration de la presse » qui pire encore, ne vient pas d’ici et viendrait « pomper gratuitement nos ressources culturelles » (re-sic). On s’indigne que Google, Facebook, AOL et autres ne produisent pas de contenus et fassent de l’argent avec le contenu des autres, mais on ne s’attaque jamais à ceux qui font réellement plein de fric avec le réseau sur lequel on navigue pour justement consulter ces contenus. Mais oui c’est vrai, ces réseaux de fournisseurs de bande passante appartiennent à Bell, Rogers, Vidéotron et. al. Et sont aussi propriétaire des médias dans lesquels les journalistes écrivent. Alors, démonisons le « gros américain sale » qui fait du fric avec notre « brain juice », mais ne disons mot de notre propre écosystème qui en profite et ne verse de redevance à personne.

Qui plus est, je le répète encore, l’argent n’est plus dans les contenus, mais dans les produits dérivés de ceux-ci. Plusieurs journalistes ont peur des blogueurs qui voudraient « prendre leur job » et il est vrai que certains blogueurs ont cette ambition. Mais plusieurs blogueurs, dont moi, ont plutôt compris que le salaire d’un journaliste, c’est de la petite bière à côté de l’argent qu’on peut faire en produit dérivé et utilisent les contenus comme produit d’appel pour justement faire cet argent ailleurs. D’autres encore ont une réelle passion pour leur sujet (dont je fais aussi partie) et créent des contenus ultras spécifiques, de niche, bien documenté et il est vrai que lorsqu’un journaliste est obligé de traiter les mêmes sujets, parce que son boss l’exige, qu’il ne connaît que peu ce sujet, que la comparaison du lecteur entre les deux traitements apparaît clairement au désavantage du scribe payé. Mais c’est ça qui est ça. Entretemps, je continue à croire à une coexistence pacifique entre blogueur et journaliste, à prétendre que les turbulences du métier médiatique me rappellent ironiquement celles qu’ont vécu l’industrie du voyage il y a dix ans avec l’arrivée des Tripadvisor, Expedia et autres et qu’il y aura toujours de la place justement pour le journalisme d’enquête, de proximité, pour l’agrégation intelligente des contenus et pour la valeur ajoutée que peuvent fournir certains journalistes et/ou blogueurs et qu’il y a une valeur certaine pour ces contenus et que les consommateurs sortiront du fric pour ça.

Je rappelle en conclusion que je fais de la consultation et que je suis très bien payé pour répéter ce qui est ici gratuitement, que mon livre Les médias sociaux 101 est un best-seller, que le 201 va très bien et que ces deux livres sont tirés de plusieurs billets gratuits de ce blogue et que pourtant ils se vendent très bien. Je rappellerai aussi que plusieurs spécialistes des médias sociaux font des conférences gratuites et que pourtant, mes conférences sont chèrement payées et que la plupart du temps, elles sont sold-out. Comme quoi des fois, le gratuit c’est payant…

Ha oui, cet après-midi j’irai faire d’autres chroniques pour l’émission LeLab de Canal VOX et vous savez quoi? Je suis très bien payé pour ça hehehe…

Je vous invite aussi à lire Bloguer par « à cause »… du pote Sylvain Carle