Les partis fédéraux sont-ils réellement sur Pinterest, Vine, Livestream et SnapChat ?

La question mérite d’être posée puisque c’est l’affirmation qu’on peut lire dans l’article Une stratégie 2.0, Les partis politiques tentent de gagner les électeurs par les réseaux sociaux du Journal de Montréal, sous la plume de la journaliste Dominique La Haye.

Dans l’article on dit :

La guerre que se livrent les partis politiques pour récolter des votes se joue maintenant en format 2.0, et 2015 sera la première véritable campagne électorale fédérale sur les médias sociaux.
«On a parlé de 2005-2006 comme étant la campagne Facebook, ensuite on a parlé de 2008 comme étant la première campagne Twitter […] Mais là, en 2015, j’ai l’impression qu’on est vraiment en présence de l’approche multiplateforme, où tous les partis sont présents et y sont très engagés», indique le professeur de communication politique de l’Université Laval, Thierry Giasson.

«Les partis fédéraux ont eu quatre années pour se familiariser (avec les) médias sociaux. Là on va voir l’innovation», poursuit l’expert.

Aux largement répandus réseaux Facebook, Twitter et YouTube s’entremêlent des comptes Instagram, Pinterest, Flickr, Vine, Livestream et SnapChat dont s’arment les partis politiques. L’objectif recherché? Mettre en valeur l’image des chefs et leurs politiques à coups de clichés léchés, d’infographies et de montages vidéo tournés dans des décors ne laissant rien au hasard. C’est aussi sur ces plateformes que les stratèges politiques ne ratent pas une occasion de mitrailler du bout des doigts leurs adversaires. Le tout échappant au filtre journalistique présent dans les médias traditionnels.

Intéressant plaidoyer qui contredit carrément mon dernier billet L’évaluation des présences sociales des chefs et des partis politiques fédéraux. J’y disais que :

Sauf qu’ici, on s’entend que l’étendue et la complexité des présences web de nos chefs, sont d’une pauvreté effarante, comparativement à ce qui se fait ailleurs. Nos politiciens ne semblent toujours pas avoir compris la nature bidirectionnelle des médias sociaux et se servent de ceux-ci principalement comme canal de broadcast. Ils ont massivement investi Facebook et ils semblent croire que c’est le bouton à quatre trous qui leur fera gagner une élection. Ils ne sont sans doute pas au courant que l’algorithme de Facebook (le Edgerank) confortera leurs fans sur la justesse de leur choix, mais que les indécis ne verront pratiquement jamais leurs contenus.

Or, selon l’article, on serait effectivement dans une élection 2.0!!! Or on y dit aussi que les partis seraient aussi sur Pinterest, Flickr, Vine, Livestream et SnapChat? Alors ils y font peut-être de la pub, mais une présence officielle? Ça m’a réellement échappé et il semble que ça a aussi échappé aux webmestres des partis eux-mêmes. En effet, les Conservateurs parlent sur leur site de leurs présences Facebook et Twitter, les Libéraux parlent de leurs présences Facebook, Twitter, Instagram et Flickr tandis que le NPD parle de Facebook, Twitter, YouTube, Instagram et Flickr. Aucun des partis ne parle de Vine, Pinterest, Livestream ou Snapchat. Ils y sont peut-être, mais disons que j’aimerais bien en avoir la preuve. En outre, l’article dit « tous les partis sont présents et y sont très engagés ». Alors monsieur Giasson et moi n’avons sans doute pas la même définition « d’engagement ». Selon Definitions-marketing.com, l’engagement est :

La notion d’engagement sur les réseaux sociaux traduit la propension des consommateurs à interagir avec une marque sur les réseaux sociaux.

À contrario, l’engagement des partis sur les médias sociaux serait donc qu’ils interagissent avec les électeurs! Ce qui clairement n’est pas le cas avec tous les outils d’analyse que j’ai pu consulter.

Donc, monsieur Giasson a peut-être été mal cité, peut-être s’est-il inspiré de l’expérience américaine pour supposer que c’était ce qui se faisait ici aussi, peut-être parle-t-il à travers son chapeau ou peut-être est-ce moi (de même que les webmestres des partis eux-mêmes) qui ne sais pas que les partis ont des présences beaucoup plus innovantes qu’ils le mentionnent eux-mêmes…

J’ai donc pris mon bâton magique (Google pour ne pas le nommer de même que les engins de recherche de certains des outils eux-mêmes) et suis parti à la recherche de ces fabuleuses présentes innovantes des candidats ou des partis fédéraux.

En fouillant un peu, j’observe que Justin Trudeau
est sur Pinterest (avec zéro photo),
sur Vine (avec un seul pitch, mais dans les deux langues 🙂 On note ici sa signature),
sur Livestream Justin a fait 10 événements (le compte ne suit personne et a 480 abonnés) et sur le site du parti, ça mène à une page d’erreur 404,
• qu’il est par contre très présent sur Instagram
• et finalement il semble que les Libéraux soient sur Snapchat, mais tout comme moi, d’autres usagers n’y voient aucun contenu.

Que Thomas Mulcair
est sur Storify avec 4 statuts,
• que lorsqu’on cherche NPD sur Pinterest avec Google qu’on tombe sur Narcissistic Personality Disorder (sic) et avec NDP, on trouve bien quelques élus fédéraux, mais surtout des profils NDP provinciaux. Avec la requête Thomas Mulcair Pinterest, rien n’apparaît dans Google et si on fouille dans l’engin de recherche Pinterest lui-même, ce qu’on y trouve à propos de Thomas Mulcair n’est pas des plus élogieux et il y a bien un certain compte ThomasMulcair, mais avec zéro activité.
• Qu’il est présent sur Instagram et que lorsqu’on cherche NDP Instagram sur Google, on tombe sur NDP2015 (la parade annuelle de Singapour) (re-sic), puis sur un article expliquant pourquoi le commentaire homophobe de Deborah Drever sur instagram, lui a valu d’être expulsé du parti (re-re-sic),
qu’il est sur Vine et qu’on y dénote une certaine originalité,
qu’il est sur Livestream (avec 141 abonnés et 0 abonnement),
• et qu’il ne semble pas être sur Snapchat.

Que Stephen Harper
• Ne semble pas ni lui, ni son parti être sur Pinterest,
qu’il est sur Instagram avec zéro abonnement,
• qu’il est sur Flickr et je note ici qu’il fait le gros effort de suivre 61 abonnements et que son compte est très riche en poignées de mains officielles,
qu’il est sur Vine avec zéro publication
• et que je ne trouve rien de lui ou son parti sur Livestream ou Snapchat

En conclusion, j’admets humblement m’être peut-être « fourré » et que cette démonstration de la présence des chefs de partis sur les outils 2.0 est sans doute un gros pas dans la bonne direction (ils ont tout de même ouvert certains comptes) et que oui, pour les observateurs plus optimistes que je ne le puisse être, c’est la preuve irréfutable que nous sommes maintenant à l’ère des élections 2.0 (permettez que je m’étouffe et que je racle le fond de ma gorge très profondément)…

Pinterest, le spam publicitaire poche a commencé + du trafic ? Vraiment ?

Pinterest, le réseau sur lequel on expose les photos de ce que l’on aime (du scrapbooking virtuel) en visitant divers sites Web lors de notre navigation (à partir d’un bouton Pin It installé sur la barre de notre navigateur) commence déjà à être pollué de spam. Généralement, les images qui sont pinner sur Pinterest font partie de ce qu’un usager ou une collectivité trouve beau. Des visages d’acteurs (trices), des paysages, des fleurs, de l’architecture, de bons petits plats et ceatera. Le « beau » en question est d’ailleurs l’une des limites du système, pour tout ce qui n’est pas par essence beau. Si vous êtes un vendeur de chauffe-eau par exemple, pas certain que vos produits récoltent la cotte des usagers Pinterest. Mais ne vous en faites pas ! Il existe des solutions laides et le spam qui en plus de vous attirer du trafic (j’y reviendrai), risque d’enlaidir passablement le paysage « pinterestien ». Faites comme H&M, et incitez les gens à recevoir un rabais-surprise s’ils cliquent sur votre bandeau publicitaire. Succès garanti auprès des coureurs d’aubaines qui foisonnent aussi sur Pinterest (comme ailleurs). Pas certaine cependant que votre image de marque redore son blason auprès des amateurs d’esthétisme avec ce genre de stratagème, mais si ça clique, pourquoi s’en priver ?

Parlant de génération de trafic, la question que je me pose est de savoir si Pinterest génère réellement du trafic. Je m’explique. Chaque fois que la photo prise d’un site web roule et est repinée sur Pinterest, cette photo qui est hébergée sur le serveur de son propriétaire, sera potentiellement comptabilisée dans les fichiers log de l’hébergeur comme une visite, alors qu’en fait cela n’en est absolument pas une. J’avais déjà expliqué ce phénomène, il y a plusieurs années, dans mon billet Le point sur les différences énormes entre les outils de statistiques. Donc lorsque je lis la « supposée influence de trafic » majeure de Pinterest, je me demande si Pinterest cré réellement de l’achalandage ou si plutôt ces données sont faussées par le fait que Pinterest « ping » sans arrêt des milliers de sites Web pour faire rouler ses boards avec des images qui sont hébergées ailleurs ?

Pollution visuelle de la pub poche de H&M

Spam de H&M sur Pinterest

Spam de H&M sur Pinterest

Le talon d’Achille de Pinterest

Depuis quelques mois Pinterest est la nouvelle « darling » des médias sociaux.

Wikipedia

Pinterest is a pinboard-styled social photo sharing website. The service allows users to create and manage theme-based image collections. The site’s mission statement is to “connect everyone in the world through the ‘things’ they find interesting.” Pinterest is managed by Cold Brew Labs, a team based in Palo Alto, California. It is speculated that Pinterest is used more by women than men. The simplicity to share interest such as fashion and food caters to the demographic of women. Its current usage has made Pinterest a useful and rising tool for e-commerce. The continuation of its growth and reach partly depends on the help it gets from major social players

Le site est clairement intéressant pour les usagers et pour les organisations à plusieurs égards. Mais il comporte aussi « un gros risque » à son modèle d’affaires. Mais avant de vous l’illustrer, je soulique que Pinterest est avantageux dans un contexte d’affaires et de vente au détail (comme en discute Benoît Descary dans son billet Utiliser Pinterest dans un contexte d’affaires : 9 astuces ou copyblogger 56 Ways to Market Your Business on Pinterest), dans un contexte culturel puisque déjà les acteurs de cinéma, de théâtre, les sculpteurs, les architectes, peintres, grand chef cuisinier (et marmitons), écrivains et autres industries culturelles ayant des images associées à leur art (photos ou vidéo) sont déjà des vedettes de ce réseau et pour l’industrie touristique puisque les photos des lieux touristiques sont déjà très prisées par les usagers (plus de détails dans l’article Pinterest for tourism: the best thing since vanilla?).

Mais il s’avère que le point fort de Pinterest, le partage de photos et de vidéos que l’on « pin » à partir de sites Web divers, est aussi son talon d’Achile. Je m’explique. Si vous êtes une organisation qui utilise Pinterest pour vous faire du trafic, c’est intéressant et ça peut certainement être rentable. Par contre, si vous êtes le titulaire de droits d’auteurs sur une œuvre, que vous la partagiez sur votre site web, mais que vous en conserviez tous les droits d’utilisation, il n’est pas évident que vous voyez d’un bon œil qu’un usager partage cette œuvre sur Pinterest en la « pinant ». Qui plus est, pour faire circuler les photos sur Pinterest, qui sont hébergé sur le serveur du propriétaire de la photo ou du vidéo qui circule ainsi, Pinterest gruge des ressources (trafic, bande passante, ressources serveur et autre) qui ne lui appartient pas et qu’il n’est pas certain qu’elle en a eu les droits. Ce sera donc des enjeux d’affaires, légaux et technologiques qui risquent de faire les manchettes dans les prochains mois… (voir l’article de PaidContent : Pinterest: Is It A Facebook Or A Grokster?)

MAJ

Comme quoi je n’étais pas dans le champ tant que ça, ce matin je lis la nouvelle Flickr disables Pinterest pins on copyrighted images (exclusive) sur VentureBeat. Outre la nouvelle que Flickr rend indisponible le « pinnage » des photos protégées par droit d’auteurs de son site, on peut y lire entre autres comment Pinterest à son tour tente de minimiser les dégâts et poursuites éventuelles :

To protect itself from copyright lawsuits, and appease disgruntled photographers and publishers, the young social media company introduced a snippet of code Monday that website owners can now add to their sites to prevent unwanted pinning. If a person on Pinterest attempts to share something from a site with that code in place, she will see a message that reads: “This site doesn’t allow pinning to Pinterest. Please contact the owner with any questions. Thanks for visiting!”

Le problème avec ça est que Pinterest offre aux éditeurs de sites de rendre Pinterest inactif sur leur propriété, mais en réalité le « fardeau » de la protection des droits (mon avis non juridique) revient en fait aux usagers et à Pinterest lui-même. C’est un peu comme MegaUpload qui soulignait l’importance de ne pas partager des œuvres protégées, mais dont le proprio est maintenant en taule…