- Michelle Blanc, M.Sc. commerce électronique. Marketing Internet, consultante, conférencière, auteure. 18 ans d'expérience - https://www.michelleblanc.com -

Pourquoi nommer le Web 2.0?

Pin It [1]

Le besoin de nommer est une caractéristique propre à l’homme. On ne nomme que ce que l’on perçoit utile pour nous. Les Inuits du Grand Nord québécois ont quelque chose comme une vingtaine de mots différents pour décrire ce que nous nommons simplement neige, glace et gadoue. Ils ont un rapport qui est plus intime avec l’élément « neige » que les autres sociétés qui vivent pourtant avec le même phénomène. Les Mangaïa [2] ont plus ou moins 80 mots pour décrire l’intérieur du vagin de la femme. Nous n’en n’avons qu’une couple dont le fameux point G. Incidemment, c’est une société qui est très portée sur le sexe et ils n’ont pas de mots pour le concept de frigidité, qu’ils ne semblent pas connaître.

Je n’ai pas inventé le concept de Web 2.0 [3]. Par contre, …

je trouve que ce concept, qui aurait certainement pu avoir un nom plus joli, renferme des enseignements qui peuvent nous instruire de l’évolution de certaines réalités témoignant de l’évolution du Web. Pour certaines sous-cultures, la dénomination Web 2.0 est une aberration que l’on se doit de démolir au plus vite. Pour certaines autres sous-cultures, la frigidité est un concept qui n’existe pas. Lors de plusieurs cours en anthropologie, nous avions aussi un concept qui s’appelait l’ethnocentrisme [4].

L’ethnocentrisme, mot forgé à partir du grec ethnos (« peuple ») et du mot « centre », désigne tendance à valoriser son groupe social, son pays et sa nationalité (…)Les linguistes, quant à eux, ont pu montrer que la langue même, en ce qu’elle est un construit culturel, conduit inévitablement par son usage vers l’ethnocentrisme. (…)L’ethnocentrisme signifie qu’on considère sa propre ethnie (ou son sous-groupe culturel) comme le centre du monde.

Si certains groupes n’ont que faire de ce nouveau mot qui peut être utile à certains autres groupes, dans l’appréhension et la compréhension de phénomènes qu’ils sont peut-être les seuls à percevoir, les premiers devraient avoir la grandeur de laisser les autres nommer ce qu’ils perçoivent comme utile et ne pas agir avec condescendance envers eux.

À l’inverse on parle d’interculturalisme: effort pour se décentrer, se mettre à la place de l’autre, coopérer, comprendre comment l’autre nous perçoit.

C’est peut-être ça le gros problème avec le Web 2.0. Un problème d’interprétation sous-culturelle divergente…

MAJ

By the way, les Nuers [5], un peuple des rives du Nil, ont près de la moitié de leur vocabulaire qui a trait strictement à la vache avec qui ils vivent en symbiose. Le plus beau compliment que l’on puisse faire à une jeune fille est de lui dire qu’elle ressemble à une vache et de lui dire laquelle. Alors si vous me traitez de vache et que je me mets dans la peau d’un Nuer, par interculturalisme, ce sera un compliment…