Pourquoi je parle encore de ma condition de transsexuelle dans mon blogue

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Voici le commentaire de Christiane Gervais, comme suite à mon billet Chirurgie de féminisation faciale, un an plus tard

Bonjour Michelle,

Oui, le résultat dépasse, et de beaucoup, les projections qui avaient été faites quant à ce à quoi tu ressemblerais.

J’avoue ne pas trop comprendre que l’on puisse même discuter de la décision qu’un être humain prend de devenir ce qu’il sait être même si la nature l’a fait autrement et surtout se permettre des commentaires ou des comparaisons entre les deux genres qu’aura eu cette personne au cours de sa vie.

Puisque tu parles si librement de ta condition humaine, je me permets une question : quand cesseras-tu de te percevoir, en tout cas de te définir devant les autres, comme une transsexuelle? Tu es, de toute évidence, une femme en devenir et je considère que quand on sait ce que c’est qu’être une femme et que c’est ça que l’on sent être et que l’on prend les moyens pour le devenir on est pas une transsexuelle, on est une femme.

Quand tu seras passé à travers le cycle des interventions chirurgicales qui te permettront d’être qui tu es, cesseras-tu de parler de ta condition quand tu rencontreras des groupes, comme tu le fais maintenant, par exemple pour tout simplement te laisser aller à être qui tu es, une femme, et compétente, et entre autres conférencière en médias sociaux et technologie de l’Internet?

et maintenant ma réponse :

 

@Christiane
Je suis encore, pour quelques mois, en transition. Cette période est celle qu’on nomme comme “la transsexualité”. Un jour prochain, je serais finalement le sexe de destination, c’est-à-dire une femme. Ma réalité est telle que j’ai fait un ‘coming out” public alors que j’étais encore un homme et que j’ai décidé d’assumer publiquement ma transition. Aussi, lorsque je fais des conférences, ma voix étant encore masculine, j’évacue dès le début de mes interventions ce sujet, afin de permettre aux gens de passer à autre chose et d’écouter ce que j’ai à dire plutôt que de se questionner sans fin à propos de mon sexe. Je le fais aussi afin d’aider mes frères et sœurs d’infortunes et afin de faire réaliser aux gens présents que des gens avec des conditions particulières, peuvent eux aussi apporter une contribution positive à la société et qu’il serait bon pour eux de pouvoir se trouver un travail et que des employeurs osent les embaucher. Ayant décidé d’assumer publiquement qui j’étais, par opposition à plusieurs transsexuelles qui changent de nom, de ville, de travail et d’identité (ce qu’on nomme dans notre jargon vivre en « stealth »), je dois aussi supporter le poids de mon histoire et des très nombreuses références à mon passé d’homme qui pullule partout dans les archives de ce blogue et ailleurs. Les gens qui arrivent ici sans me connaître doivent donc trouver des réponses à ces « anomalies » historiques. Il y a aussi le fait que d’avoir visité le site de Lynn Conway et d’avoir pris connaissance de l’histoire positive de nombreuses transsexuelles et transsexuels qui ont réussi dans la vie, a été d’un immense réconfort pour moi et que je sais que mon histoire aide énormément les gens qui vivent la même situation que moi et aide la population en général à comprendre cette réalité. C’est un poids qui est sur mes épaules et que j’assume par responsabilité sociale et parce que d’autres qui l’ont aussi assumé avant moi m’ont permis d’être encore en vie aujourd’hui.

Mais tu as raison, je ne me définis pas comme une trans et je suis beaucoup plus que juste ça. Je ne suis pas fière d’être transsexuelle, mais je n’ai plus honte de ça. Je suis une femme et de plus en plus, ce statut qui me fait tellement plaisir, va prendre toute la place qui lui revient. Voilà…

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Commentaires

  1. Christiane Gervais

    Bonjour Michelle,

    Je comprends parfaitement ton propos, il est pertinent, juste et généreux. Il est vrai que quand on peut avoir des modèles d’êtres humains qui assument leur condition initiale et ont la force de changer cette condition si elle ne correspond pas à ce qu’ils sont c’est un gros coup de pouce, tape sur l’épaule, clin d’oeil que l’on offre à nos pareils.

    Tu as, de toute évidence, créé un moment heureux par tes apparitions publiques, tant sérieuses (Tout le monde en parle, les mises en garde lors de tes conférences) que délicieuses (Chez Jules) où les transsexuelles ont pu se voir en toi et reprendre courage face à la bêtise de plusieurs.

    Aucun être humain ne devrait jamais avoir honte de ce qu’il est; de toute façon et il est vrai que plus souvent des êtres de lumière – de par le rayonnement qu’ils ont sur leur environnement, société et pairs – parleront au nom de ceux qui sont réduits au silence, plus bellement la société évoluera.

    Merci de cette réponse, toi ma pareille en devenir, ma soeur!

  2. Michelle Blanc

    🙂