- Michelle Blanc, M.Sc. commerce électronique. Marketing Internet, consultante, conférencière, auteure. 18 ans d'expérience - https://www.michelleblanc.com -

L’avenir des communications, Réponse aux questions d’InfoPresse

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Je reçois un courriel de la rédactrice en chef d’InfoPresse, Marie-Claude Ducas [2], qui me demande de pondre un texte en vue d’un spécial qu’ils préparent sur les changements que vivront différents acteurs des communications. Voici donc la question que l’on me pose et la réponse que j’en fis.

Quel est le plus important changement que vous voyez en ce qui concerne les entreprises (côté gestion d’image, RPs, publicité, etc.)? En ce qui concerne les médias, l’information, la valeur du contenu, les modèles d’affaires et métiers autour de l’information ? En ce qui concerne toute autre chose que vous auriez envie de mentionner ?

C’est Boston Counsulting Group qui disait dans son document The CMO’s Dilemna(1) que les patrons marketing ne pouvaient plus rejoindre la masse avec le marketing de masse et ne pouvaient pas non plus le faire avec le marketing de niche, d’où le dilemme. IBM en rajoute une couche en prétendant que les 5 prochaines années verront plus de changement dans l’industrie de la publicité que les cinquante dernières (dans son document The End of advertising as we know it (2)). Nous pouvons donc assumer sans être trop prudents que nous vivons une époque de turbulence et de réajustement qui frappera durement les industries de la presse, des médias, du marketing et des relations publiques. D’ailleurs, les gens de relations publiques qui sont habitués à faire dans la relation média devront certainement réajuster leur modèle d’affaires pour faire plus de la relation avec les publics, qui deviennent désormais des interlocuteurs multiples, actifs et participants. Ce public est aussi celui que visent ultimement les secteurs industriels déjà mentionnés. Le hic est qu’il est maintenant participatif et qu’il tient à dire son mot. De plus, il est lui-même générateur de contenus et il les filtre pour ses amis. Les contenus, médiatiques, publicitaires, marketing et de communication ne sont donc plus unidirectionnels et/ou la panacée d’une gang de « créatifs ».

La démocratisation des contenus touche aussi plusieurs autres sphères de l’activité humaine. À titre d’exemple, avant d’aller voir le médecin, le patient s’informe désormais sur le Web et arrive avec des questions et de l’information qu’il veut faire valider par le professionnel. L’étudiant remet en question le professeur et cherche par lui-même et tente de valider « le cours et les informations » qui étaient jadis détenues par le professeur au « grand savoir ». Nous pourrions continuer avec bien d’autres exemples pour illustrer à quel point les changements que nous vivons sont profonds et remettrons bien des choses en perspectives. Il y a aussi la question de la gratuité des contenus et des modèles d’affaires qui les sous-tendent. L’argent n’est plus dans les contenus, mais plutôt dans les contextes (tel que l’explique si bien le blogue AFPmediaWatch (3)) et les produits dérivés qu’ils entraînent. Cependant, il y aura toujours de gens qui seront payés pour créer des contenus à haute valeur ajoutée et originaux. Mais qu’est-ce que cette valeur ajoutée? À mon avis elle se trouve désormais dans les aspects locaux (dans le sens géographique), dans l’analyse et dans la mise en perspective. En ce sens, les médias et les journalistes agiront comme filtres et agrégateurs de l’information, qu’ils bonifieront par la suite, d’expertises de pointes.

Pour revenir sur la question des modèles d’affaires, comme l’expliquait l’économiste Jacques Attali (4) :

La gratuité d’un service pour le consommateur n’entraîne pas nécessairement celle du travail de celui qui le fournit. Le projet de loi (Hadopi) ne vise qu’à freiner le développement d’Internet pour préserver le profit des majors. La licence globale peut fournir des recettes nouvelles significatives pour les auteurs, les interprètes, les cinéastes. La licence globale accélérera aussi une modification très profonde et très positive du mode d’organisation des métiers de l’art.

Il explique aussi que la culture a toujours été financée par la société, elle devra l’être aussi une fois qu’elle se retrouve sur le Web (ce qui n’est pas encore le cas). Les modèles d’affaires des créateurs auront donc cette manne réorientée Web, afin de financer leurs créations. D’autres entreprises devront aussi songer à comment développer des produits dérivés de la création d’un contenu, pour faire de l’argent. Personnellement, je ne fais que peu de profits de mes contenus médias sociaux, mais je vis vraiment très bien de leurs produits dérivés que sont mes services-conseils et mes conférences. Ainsi, d’autres entreprises devront se faire le même genre de réflexion…

1 http://www.bcg.ru/documents/file21387.pdf [3]
2 http://www-935.ibm.com/services/us/gbs/bus/pdf/ibv-g510-7869-01-advertising.pdf [4]
3 http://mediawatch.afp.com/?post/2009/11/18/Context-is-King [5]
4 http://www.michelleblanc.com/2009/03/23/attali-argumentation-pour-telechargement-gratuit/ [6]