- Michelle Blanc, M.Sc. commerce électronique. Marketing Internet, consultante, conférencière, auteure. 18 ans d'expérience - https://www.michelleblanc.com -

Surprise de lire une infopub infonuagique AWS chez Direction Informatique

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Dans un média qui se veut sérieux comme Direction informatique, il est surprenant de lire une infopub pro Amazon Web Services, déguisée en article de fond. Surtout que cette semaine, c’est la commission parlementaire qui discute justement de la possibilité de migrer les données personnelles des entreprises et citoyens québécois, sur de telles plateformes. [2]

Je parle de l’article Avons-nous raison d’être frileux envers le cloud? [3] Cet article est rédigé par Mark Nunnikhoven, vice-président de la recherche sur le cloud chez Trend Micro qui dit-on, serait “héros de la communauté AWS”.

L’article débute par écarter les joueurs québécois d’infonuagique en prétendant qu’ils seraient trop petits pour soumissionner en infonuagique. Pourtant, je connais Sherweb [4] et MicroLogic [5] qui seraient tout à fait capables d’aider l’hébergement infonuagique québécois.

Par la suite, l’auteur y va de demi-vérité. Il affirme que :

Malgré ces avantages évidents, j’entends encore des organisations brandir la menace du CLOUD act, ou d’autres mesures législatives pour justifier qu’elles ne peuvent construire dans le nuage. Il est tout à fait normal d’être réfractaire au changement et de repousser les idées nouvelles, surtout celles qui remettent en question les croyances de longue date.
Heureusement, le Commissaire à la protection de la vie privée s’est exprimé sur le sujet en déclarant que cette crainte n’est pas fondée. Si vous stockez et traitez des données canadiennes à l’extérieur du pays, votre devoir est d’informer vos utilisateurs de cette pratique. Mais comme des régions canadiennes sont disponibles depuis 2016, déplacer ces données à l’extérieur du pays ne devrait même plus faire partie de vos pratiques.

Il oublie cependant d’ajouter qu’avec le Cloud Act, c’est au fournisseur américain de défendre l’accès des données en sol Canadien si une requête de sécurité des agences américaines demandaient l’accès aux données hébergée ici. Ainsi donc, le gouvernement du Québec devrait s’en remettre à la bonne volonté et à l’expertise d’une tierce partie, en l’occurrence, le fournisseur américain, pour protéger nos données. Si on se fit à l’historique de protection des données de ces entreprises, disons qu’il y a de quoi avoir le poil qui nous retrousse sur les bras.

Ensuite, l’auteur nous parle de cryptage comme solution à une « peur non-fondée ».

Peu importe la situation, le cryptage demeure votre meilleur allié. Si vous cryptez vos données, en transit et au repos, il est impossible d’y avoir accès sans la clé de déchiffrement. Aucun fournisseur infonuagique ne vous obligera à leur remettre votre clé de déchiffrement. Vous décidez qui y a accès, et qui contrôle ces accès.

Encore une fois, par méconnaissance ou carrément par propagande commerciale, il oublie ici de dire que les fameuses clés de cryptage, sont loin d’être hermétique au gouvernement américain. En fait, le cryptage étant considérée comme étant aussi sensible que « de l’armement », aucun cryptage n’existe sans que le gouvernement n’y ait de « back door ». C’est ce que l’on nomme la « guerre de la cryptographie » ou « crypto wars » [6] en anglais. Ainsi, comme on le note dans Wikipédia [6] :

En 2009, les exportations de cryptographie non militaire depuis les États-Unis sont régulées par le Bureau of Industry and Security [7] du département du Commerce 9 [8]. Certaines restrictions demeurent, même pour les produits grand public, en particulier en ce qui concerne les prétendus État voyous [9] et les organisations terroristes. Le matériel de chiffrement militarisé, l’électronique certifiée TEMPEST, les logiciels cryptographiques spécialisés, et même les services de conseil cryptographique sont toujours soumis à licence9 (p. 6–7). De plus, l’enregistrement auprès du BIS est exigée par l’exportation de « produits de chiffrement pour le marché public, les logiciels et les composantes dont le chiffrement dépasse 64 bits » 10 [10]. D’autres éléments demandent aussi un examen par le BIS, ou une information du BIS, avant l’export dans la plupart des pays9. Par exemple, le BIS doit être informé avant la mise à disposition du public de logiciels de cryptographie open source sur Internet, encore que l’examen ne soit pas exigé 11 [11]. Ainsi, les règles à l’export se sont assouplies depuis 1996, mais restent complexes9.
D’autres pays, en particulier les parties à l’arrangement de Wassenaar [12] 12 [13], ont des restrictions similaires 13 [14].

Comme quoi c’est bien beau pousser pour sa business, mais il y a des limites à peindre la réalité en rose…

Vous pourriez relire la conclusion de mon billet Les médias découvrent que BlackBerry de RIM n’est pas impénétrable, Petit réveil matinal (wake-up call) [15]

Il est donc d’un impératif de « sécurité nationale » que les systèmes de cryptages soient limpides aux autorités gouvernementales et donc, qu’elles y ai accès. Les gouvernements étrangers vont faire des pieds et des mains pour avoir accès à tous systèmes de cryptages qui sont utilisés sur leur territoire et dont ils n’ont pas les clés. Le montréalais Austin Hill, [16] le fondateur du défunt Zero Knowledge System [17] a déjà été traité d’ennemi d’état parce qu’il avait développé un système de cryptographie personnelle impénétrable par les services secrets [18]. Officiellement, son entreprise s’est redéployée pour offrir des services de sécurités aux entreprises de télécommunications parce que les consommateurs n’étaient pas prêts à payer pour l’anonymat sur le Web [19]

Others aren’t convinced. Austin Hill, one of the founders of Zero-Knowledge Systems and now CEO of Akoha.org, says most people remain unaware of what happens to their information online — and unwilling to make sacrifices to protect it.
“Ask people if they care about the environment they’ll say yes, but they’re not willing to give up their SUVs,” says Hill. “Ask if they care about privacy, they’ll say yes, absolutely, but I will not take down my MySpace page with my 400 friends on it because that’s how I socialize. They’re very unaware that these pages get indexed, archived, and become part of their public record.
“I hate to say this, because I am a big fan of privacy,” Hill adds. “But I think as a society we are redefining our understanding of what ‘privacy’ means, and unfortunately not for the better.”

Mais des rumeurs persistantes soutiennent qu’il a plutôt été forcé à ce redéploiement par diverses pressions de natures étatiques…

 

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