La semaine dernière j’étais conférencière lors de Webcom Montréal. Avant ma prestation, j’ai eu le plaisir de m’entretenir avec Christian Aubry à propos de la transparence et de l’authenticité sur le Web. Voici la vidéo qui a été tirée de notre échange.
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(…) La transparence en Sciences de l’Information et de la Communication (SIC) veut signifier le caractère non privé de l’information, elle sous-entend que le public y a accès très facilement.
Le terme qui s’oppose à la transparence est celui de l’opacité : ici, au contraire, l’information est privée et reste comme imperceptible du public.
Cette idée renvoit à la perception de la couleur pour la transparence et de matière pour l’opacité. L’individu parvient aisément à comprendre la signification de l’expression. Le dictionnaire Larousse ajoute cette définition : Parfaite accessibilité de l’information dans les domaines qui regardent l’opinion publique
Nous nous arrêterons ici à l’un des sens du mot authenticité, le plus récent celui que Le petit Robert résume ainsi: «Qui exprime une vérité profonde de l’individu et non des habitudes superficielles, des conventions.» (…)
L’authenticité, c’est l’accomplissement antérieur à toute prise en charge consciente et rationnelle de soi-même. Un simple geste, unique et sûr de lui-même, peut être un signe d’authenticité. (…)
L’authenticité, c’est aussi la consonance intérieure. On dit parfois: j’ai senti qu’en posant tel ou tel geste, j’aurais forcé ma nature, rompu ma consonnance avec moi-même. La racine de l’authenticité est dans ce sentiment par lequel, le plus souvent sans le savoir, nous empêchons le geste faux de prendre forme.
C’est par un sens de la consonance analogue que l’artiste élimine les traits incompatibles avec son idéal encore implicite. Nous sommes inspirés de nous-mêmes comme l’artiste est inspiré par son idée. C’est la même faculté, flair ou sens de la musique intérieure, qui s’exerce dans chaque cas. Cette faculté est nourrie par la nature et par les oeuvres d’art dont on s’imprègne, dans la mesure ou ces dernières sont elles-mêmes authentiques. (…)
La transparence est donc une information à caractère « non privée ». En tant qu’employé, collaborateur, client ou fournisseur, il y a donc une multitude « d’informations privées », que nous ne pouvons pas communiquer librement tout en étant totalement transparents. Toute chose ne peut pas et ne doit pas être dite. Pour ce qui est de l’authenticité, on parle de « vérité profonde », de « consonance intérieure », d’idéal même. L’authenticité semble donc être le fruit du « vrai ». On peut donc être transparent, encore une fois, en ne disant pas tout et en ne réagissant pas sur tout. Je dirais même que l’authenticité et la transparence sont intimement liées au respect de soi, et de l’autre. Qu’il soit patron, collaborateur, client ou fournisseur. Tout n’est pas bon à dire et on ne peut « bitcher » impunément en se réclamant de la sacro-sainte authenticité. Je devrais dire plutôt qu’on peut, mais qu’il y a des risques à cela. Si votre entreprise vous fait signer un contrat d’embauche stipulant ce que vous pouvez ou ne pouvez pas dire et que vous enfreignez ce contrat, vous aurez beau vous vanter d’être « authentique et transparent », il y a de fortes chances que votre auditoire soit celui du bureau de chômage. De même pour les entreprises sur les médias sociaux, il y a un contrat « tacite » entre les abonnées, lecteurs, membres ou autre et celle-ci. C’en est une d’authenticité et de transparence, dans les limites permises par les lois civiles, criminelles et par les ententes contractuelles qui lient les employés à leurs entreprises. En somme, authenticité et transparence peuvent aussi être synonymes de respect…
épilogue :
J’ai de nombreux clients qui ne veulent pas nécessairement que leurs actions stratégiques se sachent, je suis sous contrat pour mon livre, il y a des sensibilités tout autour de moi dans ma vie personnelle et professionnelle que je me dois de respecter. À titre d’exemple, ma conjointe a toujours insisté pour que dans mes contenus, on ne puisse l’identifier. J’ai toujours respecté ça. Pourtant, je suis authentique et vraie comme je ne l’ai probablement jamais été dans ma vie. Mais des fois, il faut savoir fermer sa gueule. Même si ça nous démange. Même si ça fait du bien de gueuler à tous ces connards que le destin mets sur notre chemin, de répondre aux critiques, de faire la leçon publiquement à quelqu’un qui le mérite, de se vanter d’une réussite stratégique qui apporte plein de fric à un client. Des fois, par souci d’authenticité il faut prendre sa pilule et fermer sa gueule…
Près de dix mille personnes te suivent sur Twitter. C’est quand même incroyable quand on sait que la majorité de tes commentaires portent sur ta vie privée. Est-ce que tu es la même personne en ligne que dans la vraie vie?
Oui et non… Je suis toujours authentique. Les gens me disent: «Michelle, t’es tellement transparente, tu dis tout». C’est faux! Sur Twitter, j’ai une transparence relative, c’est moi qui décide de ce que je mets en ligne.
Je vois quantité d’informations à mon propos et je ne réagis probablement qu’au dixième de ce que je vois. Je vois énormément de choses à propos de mes clients et partenaires. Je n’en dis rien. J’ai d’ailleurs développé un profond respect des gens qui ont une vie publique. Je les comprends mieux maintenant. Ce n’est pas facile d’être une cible… De plus, vous ne savez que très peu de choses de ma pratique finalement. Comme je suis dans le conseil stratégique, je ne dis que ce que je peux dire et ce sont souvent plus les PME que les multinationales avec qui je travaille, qui me permettent d’en dire un peu. D’un autre côté, ça laisse aussi libres court à l’imagination débordante et débridée de certains. Des fois j’ai hâte d’être vieille pour écrire mes mémoires, juste avant de crever…
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Je ne vous en ai jamais parlé. Je ne suis pas fière de ça, mais oui, je me suis déjà plantée avec deux clients. C’était à cause de circonstances hors de mon contrôle. En décembre dernier, j’ai passé à l’émission la plus écoutée au Québec, Tout le monde en parle. Les deux semaines qui ont suivi ont été catastrophiques pour ma business. J’ai en effet reçu une avalanche de courriels, commentaires, Twitt, messages Facebook et téléphones qui n’avaient rien à faire avec « la business » mais que je me devais de traiter. Par la suite, j’ai eu la mauvaise bonne idée de proposer « la guignolée du Web » qu’on trouvait une très bonne idée et que je pris sur moi de mettre en place avec l’aide de très gentils partenaires. Tout ça pour vous dire que j’ai accumulé un retard énorme et que deux de mes très bons clients furent victimes de ce concours de circonstances. J’avais déjà livré la moitié des livrables à ces clients. J’ai donc décidé de rembourser leur dépôt et de leur faire cadeau des livrables déjà donnés en m’excusant de ne pas pouvoir terminer leur mandat. C’est la seule fois de mon histoire de consultante qu’une telle chose m’arriva. J’en étais rendue à avoir de la difficulté à dormir. Mais, une situation « incontrôlable » peut arriver, mes clients n’avaient pas à en payer le prix et c’est pourquoi je leur fis cadeau de mes livrables déjà faits, avec mes excuses. Je me devais aussi de ne pas leur faire payer pour des frasques qui les atteignirent et pour lesquels ils n’ont aucun contrôle. J’aurais pu conserver le dépôt et justifier que la moitié de la job avait déjà été faite. Mais je croyais que ce n’était pas la chose honorable à faire.
Lors du Webcom, j’ai rencontré à nouveau l’un de ces deux clients et nous recommencerons à travailler ensemble. Depuis cet incident, j’ai augmenté mes tarifs sur toute la ligne et cette visibilité a été très bonne pour mes affaires. Tout est revenu à la normale et je suis très heureuse d’avoir lavé mon nom et d’avoir accepté ce premier échec de ma vie d’entreprise.
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On me dit souvent que je suis très transparente sur le Web. C’est vrai en partie. J’ai d’ailleurs déjà parlé de l’importance de l’authenticité, de la perte de contrôle salutaire (par rapport à vos contenus Web) de savoir déconner et des différents types de transparence. Cependant, depuis un certain nombre de semaines, je réalise aussi que même la transparence radicale (comme j’aime à l’appeler) est elle-même toujours une mise en scène que je contrôle totalement. JE décide ce que je partage, comment je le partage, quand je le fais et j’ai souvent un objectif sous-tendant cette communication. Je contrôle absolument tout. Or tout à l’heure, je rencontre la journaliste Josée Blanchette qui veut faire un topo sur moi pour le journal Le Devoir et ça m’énerve. J’ai une très grande confiance en madame Blanchette que j’aime beaucoup. Je suis convaincue que son topo me sera favorable et qu’il sera très humain, à l‘image de ce qu’elle a l’habitude de faire. Mais de céder le contrôle de mon image à quelqu’un d’autre, maudit que ça me fatigue….
À chaque fois que j’ai eu une entrevue à propos de moi, j’ai mis des balises très strictes. On ne pouvait pas me parler de tel ou tel sujet ou me questionner sur ceci ou cela. J’ai en outre refusé de nombreuses entrevues et documentaires qu’on voulait faire sur moi. Je ne suis pas une bête de cirque et mon image c’est mon brand. Je la contrôle donc très, très soigneusement. Mais là je me lance dans le vide et ça me donne le vertige…
MAJ
J’ai eu une très belle rencontre avec Josée Blanchette qui est très humaine, brillante, rigolote et ouverte. Elle me fit d’ailleurs remarquer qu’au fil de ses questions avec lesquelles je répondais spontanément, je lui répétais très souvent « mais ça tu ne peux pas écrire ça ». C’est comme si j’ai un désir franc et ouvert de partager qui je suis, mais qu’en même temps je suis constamment à l’affût de comment ce que je dirais, pourrait avoir un impact sur les gens qui m’entourent (lire ici mes très proches) et sur l’image que les gens pourraient se faire de moi s’ils savaient vraiment tout. C’est une forme de pudeur disons. J’ai encore bien des zones secrètes qui se doivent de le rester. C’était comme une danse impudique que je ne voudrais pas qu’on regarde. J’ai comme le besoin de justifier bien des choses en les disant, afin qu’elle comprenne vraiment, mais ces choses sont encore trop proches de moi pour que je les partage au monde entier. Peut-être lorsque je serais vieille…
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Le week-end dernier je donnais la conférence Les avantages de la transparence en ligne (PDF) lors du PodcampMontréal. Or le journaliste radio Simon Roy, de la station communautaire CKRL à Québec, vins me voir pour me demander la permission d’enregistrer celle-ci. Je lui ai donné la permission et depuis ce matin, la portion audio de ma conférence se retrouve complètement en ligne sur OpenSourceAudio d’InternetArchive. Comme vous le constaterez, j’ai encore du travail à faire sur ma voix pour qu’elle se féminise davantage (snif, snif). J’ose cependant croire que le contenu est pertinent…
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Durant ce week-end avait lieu le Podcamp-Montréal. J’eue l’honneur d’y présenter la conférence Les avantages de la transparence en ligne (PDF) que je vous mets en ligne avec plaisir. Ce thème qui m’est cher, va continuer de se développer et j’anticipe d’en faire un livre un de ces jours. D’ailleurs si vous avez des contenus à me proposer pour garnir ma réflexion, n’hésitez pas à me le faire savoir…
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Je médite sur l’idée de faire un livre sur la transparence communicationnelle sur le Web. C’est en discutant avec le copain Claude Malaison que l’idée s’est cristallisée. Il est évident que mon expérience personnelle y serait pour beaucoup, mais bien avant « mes événements », déjà je parlais de transparence radicale, synthétique et autres concepts associés à ce qui « sonne vrai » et à ce qui semble efficace dans les mouvances de la communication internet. Je vais méditer là-dessus encore, mais déjà, c’est le sujet que je pense aller présenter lors de la conférence Podcamp Montréal de cet automne. C’est une histoire à suivre…
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Si vous avez des idées ou des références à me partager, gênez-vous surtout pas…
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La question de la transparence et de ses limites dans les blogues est un sujet qui revient sporadiquement et pour lequel, j’ai déjà pris de gros risques. Je me dévoile beaucoup dans ce blogue, mais malgré tout, il y a toujours des jardins secrets que je ne franchis pas (par exemple, vous ne connaissez pas le nom de mon amour, vous ne la voyez nulle part et ne la verrez jamais). Cette discussion à propos de la transparence est développé de manière intéressante chez la copine Marie-Chantale aujourd’hui. M.-C. est certainement l’une des blogueuses les plus limpides que je connaisse. C’est aussi l’une des pionnières des espaces numériques. Je l’ai déjà « liché » à ce propos, abondamment d’ailleurs. Voici donc un extrait de son billet :
Lors d’un cocktail cette semaine, je rencontre un lecteur/blogueur français Xavier Aucompte qui me dit à quel point il est un lecteur assidu de mon blogue. Je lui demande donc ce que je peux faire pour l’améliorer. Il me répondit : absolument rien. Ce qui fait que je l’aime ce sont ses qualités, mais surtout ses défauts qui traduisent ton humanité. Laisse-le exactement comme il est! Il me confia aussi avoir chialé en lisant mon coming-out et comment il avait apprécié cette transparence qui témoigne de comment les blogues peuvent être des médiums terriblement humains. Mais c’est le genre de billet qu’on n’écrit pas tous les jours. D'ailleurs, ce billet particulier a été écrit sur une période de deux mois. Pour revenir à la question de transparence, dans mon propre cas, elle m’a été d’un secours inespéré et les retombés positives de celle-ci, me surprennent encore, chaque semaine…
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Reçu dans le courriel (le nom a été enlevé pour protéger l’identité de celui qui l’a envoyé et publié ici avec sa permission suite à un dialogue téléphonique).
Bonjour Michel
Je trouve ton aventure absolument incroyable, et je comprends complètement ta perplexité lorsqu'on te parle de "courage" là où tu ne vois que nécessité. Pour avoir moi-même fait quelques gros* moves dans ma vie, j'ai toujours été désarçonné par ces commentaires louant mon supposé "courage".
Désarçonné, et flatté en même temps. Et c'est un peu ça le danger. C'est pourquoi je t'écris aujourd'hui, même si on se connaît très peu. À mon avis tu t'emballes un peu dans ta politique d'hyper-transparence sur ta vie privée, sur ta personne et aussi sur ta compagne, ta famille. Le danger, et ça commence déjà, c'est que des tas de gens vont faire de Michel Leblanc un porte-étendard – ou un épouvantail – pour alimenter leur propre petit branding personnel. Soit pour vendre de l'audience, ou pour faire reluire leur image personnelle avec de Tolérance à bon prix.
De plus en plus de gens sur le web lisent ton histoire et certains vont inévitablement se l'approprier. Il s'agira autant de gens bien attentionnés, que de porcs idéologues, ou de profiteurs cyniques. Beaucoup aussi t'apportent un soutien amical mais un peu naïf, car, au fond, ils sont incapables de prendre la mesure du chemin que tu vas parcourir. Ils ne te suivront pas tous jusqu'au bout.
Finalement je me demandais juste si tu étais conscient de ça (probablement oui) voire si tu n'avais pas la secrète envie d'y aller à fond pour voir jusqu'où tes talents de marketeur et de tribun sauraient t'emmener.
C'est tout, je voulais pas lancer cet échange sur un blogue. En espérant ne pas t'avoir importuné avec cette incursion…
En tout cas bonne route !
* gros pour moi, pas gros en vrai
Ma réponse
Merci de t'inquiéter de moi (…) et ça me touche. j'arrive justement de mon psy et on discutait de ça. J'ai aussi reçu de nombreux tel de médias et en ai refusé plusieurs. Sache aussi qu'il n'y a pas eu de photos de moi par rapport à cette histoire dans les médias et qu'il n'y en aura pas non plus. Dans mon blogue je contrôle mon image et mes lecteurs sont instruits et cultivés. Dans les médias généralistes, je la contrôlerais aussi et je suis conscient du danger de devenir le freak transsexuel des médias. C'est pourquoi ça ne me fait rien d'en parler, mais pour le reste, ils n'auront aucun regard ou privilège de publication que je n'aurais moi-même approuvé au préalable. D'ailleurs, ma photo facebook qui vient d'être mise en ligne ne peut être reprise par personne (droits d'auteurs) et si quelqu'un s'avisait d'enfreindre ces droits d'auteurs, ça lui couterait un bras et une jambe.
Pour mon épouse, elle est au courant et à part mes intimes, personne ne sait qui elle est. Il n'y a d'ailleurs aucune photo ou mention dans mon blogue. Pour la famille, c'est aussi très discret. Finalement, la maladie dont je souffre a grandement besoin d'être vulgarisé, expliqué et banalisé. Ça me rendra service à moi-même ainsi qu'à ceux qui en souffrent aussi. Les risques que je prends sont grandement effacés par le bien que cela fait aux autres et par l'appui inconditionnel que j'ai reçu jusqu'à présent…
Mais merci encore de t'en inquiéter…
On m'a déjà proposé de me suivre dans tous ces changements pour en faire un documentaire. J'ai refusé, à moins qu'il n'y ait un avantage indéniable pour moi. Ce qui ne s'est pas encore concrétisé… Je suis une personne d'affaires après tout…
MAJ
Il est évident que Facebook peut se servir de ma photo, je leur ai céder contractuellement. Mais ils n'en feront certainement rien…
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