Monsieur Couillard, expliquez-moi la logique du plan Nord

Cher monsieur Couillard. J’ai fait des cours d’économie, de politique et comme vous le savez, parce que l’automne dernier je vous ai gentiment secoué les oreilles (avec quelques mots d’églises) à propos du manque de vision numérique, j’ai aussi étudié en commerce électronique. Tout ça pour vous dire que dans cette période dite « d’austérité », j’entends qu’en grande pompe, vous relancez le Plan Nord? Expliquez-moi s’il vous plait? Parce que lorsque je regarde les chiffres, je ne comprends vraiment pas cette fixation à tirer notre argent par la fenêtre.

Bon tirer l’argent par la fenêtre est une figure de style. Je comprends que vous investissez dans notre avenir. Vous avez la vision de léguer « de grands travaux » et de « grandes retombées » pour les générations futures. C’est très louable et je vous félicite pour l’audace. Je comprends aussi que le Québec est très grand, que nous n’habitons qu’une infime partie de ce territoire et que nous aurions intérêt à « coloniser » le Nord. Cependant, je me trompe certainement, mais à ce qu’on en rapporte, votre plan ne parle pas de colonisation. Il parle plutôt d’exploitation des ressources naturelles du Grand Nord. Il parle de faire un Jean Charest de vous-même. Il ne parle pas d’avoir une vision originale de ce que sera le Québec, il parle de la suite, plus modeste, de la vision de votre prédécesseur.

Que disent les chiffres que je ne comprends pas?

Radio-Canada nous informe que :

Québec investira environ 2 milliards de dollars dans des projets d’infrastructure d’ici 2035. Hydro-Québec investira pour sa part quelque 19,5 milliards au cours de cette période. Le gouvernement espère ainsi convaincre le secteur privé d’investir environ 29,7 milliards, pour des investissements totaux d’un peu plus de 51 milliards de dollars.

Humm, c’est du bidou. Maintenant, si je regarde les chiffres de l’institut de la statistique du Québec(PDF), qui doivent sans doute être ceux que vous consultez aussi pour prendre vos décisions, on y apprend, dans sa plus récente mouture, que le secteur économique Extraction minière, exploitation
en carrière et extraction de pétrole et de gaz
, représente pour 2013 (en chiffre actualisé de 2007) des retombées de 3,5 milliards. Je comprends aussi qu’essentiellement, le plan nord servira à ce secteur économique. J’imagine aussi que si Hydro-Québec investit 20 milliards, c’est qu’ils s’attendent à avoir des retombées à tout le moins équivalente mais qui ne sont pas comptabilisées dans le fascicule des secteurs économiques du Québec (bon je ne m’obstinerai pas avec l’institut de la stat du Qc pour leur catégorisation). Mais j’apprends aussi, la journée avant votre annonce, que le flyé américain inventeur de la Tesla, Elon Musk, s’apprête à rendre public sa batterie pour maison qui permettra aux consommateurs de ne plus être dépendants des fournisseurs d’électricité et d’emmagasiner l’électricité nécessaire à leur maison via des panneaux solaires et cette batterie révolutionnaire. Incidemment, après un seul twitt de sa part, la valeur de ses actions a bondi de 1 milliard (je dis bien 1 milliard). Disons que pour un seul twitt, c’est du bidou. Mais bon, cet original est issu du monde des technologies de l’information, pas des mines. Ce n’est pas sérieux quoi. C’est de l’intangible. Les banques n’aiment pas ça. C’est d’ailleurs pourquoi (j’imagine) que vous venez de donner la batterie développer depuis des années par Hydro-Québec, aux Français? D’ailleurs, à terme, si les gens peuvent emmagasiner l’énergie dans ces super batteries à l’aide d’éoliennes personnelles ou de cellules photovoltaïques, est-ce toujours opportun de faire d’autres mégas barrages? D’ailleurs, est-ce que je me trompe ou ai-je lu que les minerais sont aussi à un bas historique?

Bon avec toutes ces questions, et si peu de réponses qui me semble logiques, vous comprenez sans doute mon manque de compréhension.

Le plan nerd

L’automne dernier, mon pote Sylvain Carle vous disait ce passage prophétique, que vous avez applaudie chaudement :

Pourquoi Twitter, sérieusement qui l’aurait cru, pourquoi cette compagnie vaut maintenant 32 Milliard?

Elle optimise au maximum toute les méthodes des hackers pour créer une immense valeur à partir de rien.

Ben pas de rien, à partir de cellules grises. C’est super renouvellable en plus comme matière.

C’est pour ça que je parle de “Plan Nerd” plutôt que de “Plan Nord”.

L’ère industrielle et des ressources naturelles, c’était le 20ème siècle. Ça ne va pas disparaitre.

Mais il s’ajoute toute une couche additionnelle de valeur, Michelle Blanc avait de bons chiffres hier.

On ne peut pas ne pas profiter de cette nouvelle richesse.

Je disais hier à la blague, l’économie ça ne m’inquète pas.

Je n’en reviens pas qu’on donne tant d’efforts pour réduite les dépenses par rapport à augmenter les revenus. L’un n’exclut pas l’autre, je le sais bien, mais me semble qu’on pourrait au moins mettre des efforts égaux.

La mine qui va nous sortir du trou (ok, mauvaise métaphore), la matière première de l’ère du savoir, de la société en réseau, elle n’est pas dans le sol, elle est dans la tête des Québécois.

Et pis là, on est tous en réseau. Il faut apprendre à travailler ensemble. À collaborer. Sinon, on va passer à côté.

Sinon on va manquer la bateau et devenir un pays du tiers monde numérique.
Je ne veux pas ça. Vous non plus. Pis le bateau, il a déjà commencé à quitter le quai.

15% du 21ième siècle est déjà passé.

Vous avez conclu ce fameu week-end, pour lequel j’étais bé-né-vo-le, par l’assurance que vous développeriez une stratégie numérique pour le Québec. Et là vous nous ressortez le plan nord des boules à mites? Je vous disais que les mines c’est 3,5 milliards du PiB du Québec. Industrie de l’information et industrie culturelle c’est 10,2 milliards. Services professionnels,scientifiques et techniques c’est 16 milliards. Les technologies de l’information touchent directement TOUS les secteurs d’activités économiques et TOUS les aspects de la société. Pourtant, pas encore de ministre, de ministère, de vision ou de stratégies. Le secteur des TIC est celui qui est le plus en croissance de TOUTES les activités économiques, quelles qu’elles soient. Pourtant, vous voulez investir 21 milliards, pour une activité économique qui en rapporte 3?

Je ne comprends pas. Je suis perdue. Éclairez-moi de votre sagesse parce qu’à la lecture des éléments que je viens de vous présenter, votre logique m’échappe…

Je vous rappellerai aussi que j’avais « sauté une coche » à propos de nos infrastructures numériques et cellulaires pitoyables. Je vous parlais de notre très haute vitesse qui tourne autour de 40 MBPS, mais qui est plutôt de 5MBPS dans les régions. Vous vous en souvenez? Je vous donnais l’exemple de Google Fiber ou de Chattanooga avec leur 1GBPS (c’est mille fois 1MBPS juste pour être certaine que vous suivez). J’étais « su’l cul ». Et là, COMCAST annonce qu’ils livreront désormais à leurs clients le 2GBPS!!!

Ça ne vous tenterait pas de nationaliser les infrastructures numériques et cellulaires et que ça devienne votre lège pour les futures générations? Ça ne vous tenterait pas de développer une vision du numérique pour tous les Québécois et de mettre une couple de milliards là-dedans? En supposant évidemment que vous fassiez en même temps le ménage dans les milliards qui sont déjà dépensés inutilement par le gouvernement avec les firmes de trois lettres qui sont suivies depuis des mois par les journalistes et l’UPAC avec l’élogieuse épithète de « bordel informatique »?

J’ose croire que mes réflexions porteront fruit et que prochainement, vous nous annoncerez votre vision numérique et que vous songerez à mettre à niveau nos infrastructures cellulaires et internet? L’économie du savoir, ça passe aussi sur des infrastructures 🙂

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L’argumentaire économique du numérique

La Stratégie numérique du Canada et la bonne blague du gouvernement Harper

Nous sommes encore loin d’un Plan numérique pour le Canada, mais au moins, industrie Canada sort finalement de sa torpeur numérique et accouche de sa Stratégie numérique pour le Canada (PDF). C’est déjà un départ et un pas dans la bonne direction. Cette initiative nommée « Canada numérique 150 », vise à concorder avec le 150e anniversaire de la confédération. C’est un peu, beaucoup de relations publiques politiques, mais disons que les objectifs énoncés, sont plutôt chétifs. Mais au moins, ils seront une amélioration à ce que nous avons déjà.

Par exemple, comme le mentionne Direction informatique, cette initiative repose sur cinq piliers.

Sous le pilier « Un Canada branché », le gouvernement du Canada regroupe des initiatives telles que l’élargissement de la portée de l’accès à Internet haute vitesse à plus de 98 % de la population, le développement de politiques relatives aux télécommunications mobiles et l’optimisation de l’utilisation des ondes sans fil publiques.

Le pilier « Un Canada protégé » chapeaute des initiatives qui portent sur la sécurité des transactions en ligne, la protection de la vie privée et la protection contre la cyberintimidation et les menaces en ligne.

Sous le pilier « Les possibilités économiques », Ottawa réunit des initiatives qui visent à faciliter l’utilisation des outils numériques par les entreprises, ainsi que le recours aux données volumineuses par les organisations et les gouvernements.

Le pilier « Le gouvernement numérique », de son côté, regroupe des initiatives dont le but est de faciliter l’accès en ligne aux services et à l’information de l’administration fédérale. Aussi, on y trouve des initiatives qui favorisent l’utilisation de données ouvertes gouvernementales pour améliorer le développement économique et la collaboration entre divers intervenants.

Enfin, le pilier « Le contenu canadien » réunit des initiatives qui faciliteront la production et l’accès au contenu numérique à caractère historique ou culturel.

La bonne blague du gouvernement Harper

Un Canada branché

Ce que définit Industrie Canada comme un Canada Branché est « accès à Internet haute vitesse à plus de 98 % de la population ». Or, comment définissent-ils cette haute vitesse? Pas 1000 MBPS comme le Kansas ou le Vermont, pas 100 MBPS comme les villes participant à l’initiative iCanada, non un gros 5MBPS et pour 98% de la population. Wow, une chance que je suis assise, car je crois bien que je tomberai renversée de cette vision du futur. D’ailleurs, à lire le site d’Industrie Canada, j’apprends que ma ville, Chertsey a DÉJÀ le 5MBPS???

Heureusement qu’ils rajoutent le nota bene plus bas

La couverture au sein d’une collectivité dépend de sa superficie, de la conception du réseau à large bande, de la topographie locale et d’autres facteurs. Dans certains cas, les fournisseurs de services Internet (FSI) ne parviendront pas à offrir le service à tous les foyers d’une collectivité désignée comme étant desservie.

Et nous jouirons de cette connectivité supersonique d’ici 2017, mais selon industrie Canada, vous en jouissez probablement déjà. Au moins le Ministre James Moore trouve les mots pour nous inspirer et présenter cette vision du futur

Le Canada a l’occasion de devenir un chef de file en cette nouvelle ère, mais le gouvernement a un rôle essentiel à jouer dans l’établissement, par des politiques publiques efficaces, des bonnes conditions pour encourager et aider les Canadiens à tirer pleinement profit des possibilités transformationnelles de l’avenir numérique. Voilà pourquoi le gouvernement a tracé une voie qui dote la population du pays des outils, des compétences et des protections nécessaires pour mettre à profit ces possibilités numériques.

Wow, je vais mieux dormir ce soir…

Dans un autre registre (mais en fait pour illustrer le même manque de vision, mais au provincial) dans l’article du journaliste Pierre Asselin dans Le Soleil Le cabinet analphabète on peut lire :

Ah oui, c’est vrai, le numérique.
Appelez ça comme vous voulez, technologies de l’information ou informatique, c’est le domaine qui transforme nos sociétés, mais ne cherchez pas de ministre responsable à Québec. Tout d’abord, ça n’intéresse pas nos députés. La plupart d’entre eux sont, à peu de choses près, analphabètes en ce domaine.
Il fut une époque où cette ignorance était pardonnable, mais elle est aujourd’hui inexcusable, au sein d’une administration qui se prétend moderne.
Le numérique est au coeur même du rôle de l’État. On a bien un ministère pour planifier, construire et entretenir nos routes. Pourquoi n’y en a-t-il pas un pour superviser notre infrastructure informatique? Pour définir les orientations et les politiques de l’État en cette matière?
L’État québécois manque cruellement de personnel spécialisé, cette expertise stratégique a été abandonnée aux firmes de consultants. Il y a des politiques à élaborer, pour appuyer le secteur privé comme le secteur public; des positions à prendre sur la neutralité d’Internet, la protection des renseignements et de la vie privée. Ce ne sont pas les défis qui manquent.

MAJ
Question de vous faire sourire (ou rager, c’est selon), voici un article du Wall Street Journal qui explique comment la Norvège ammène la très ahute vitesse dans le cercle polaire et qui a l’une des plus rapides connection internet de la planète In Bjørndalen, Norway, a Small Cabin Enjoys Some of the World’s Fastest Internet

Disons que les conseillers du ministre Moore ont encore des croûtes à manger…

De l’urgence d’un plan pour bénéficier positivement de l’économie numérique

Les gagnants et les perdants de l’économie numérique

L’auteur Rick Whiting fit récemment une lumineuse présentation d’une allocution donnée par Erik Brynjolfsson, professeur du MIT et directeur du MIT Center for Digital Business, dans sa présentation Winners And Losers In The Digital Economy. Certains seront très certainement rapides à le traiter de « pelleteur de nuage »! C’est qu’il parle d’économie numérique au Comdex Virtual. Ce n’est sans doute pas sérieux…

Mais moi je le trouve particulièrement éclairant et en plein dans la ligne d’une « sonnette d’alarme » que douze autres passionnés et moi-même avons actionnés dans notre Rapport d’étonnement à l’automne 2012 .

Les gagnants, et les perdants de l’économie numérique (en parlant des États-Unis)

Tel que cité par monsieur Whiting

« GDP is at an all-time high, profits are at an all-time high, investment is at an all-time high. That’s all good news.
(…)
« The labor participation rate, the share of workers that are in the workforce out of the total population, has fallen off a cliff. »

Puis le professeur Brynjolfsson poursuit en disant que des millions de personnes ont perdu leurs emplois parce que les entreprises et les compétences n’ont pas suivi l’évolution trop rapide des technologies numériques (je rappelle ici que l’Estonie vient d’instaurer les cours de codage informatique dès le primaire). Puis après avoir parlé des iniquités de la répartition de la richesse, engendrées par les profits des technologies, il poursuit en différenciant ceux qui ont des « skills » et ceux qui n’en ont pas.

There’s been a divergence, which economists call a ‘skill-biased technical change,’ » he said. The result: People with limited skills have difficulty finding employment while businesses have trouble filling jobs — such as in high-tech manufacturing — that require higher skill levels.

Il poursuit en identifiant les superstars de la nouvelle économie comme Lady Gaga qui utilise les médias sociaux pour rejoindre ses millions d’admirateurs (et monnayer cette exposition) ou Scott Cook qui après avoir inventé Turbotax, fit perdre des milliers d’emplois chez H&R Block.

Mais c’est justement sa conclusion que je trouve si lumineuse (sans doute parce que je partage tellement ce point de vue que j’ai donné bénévolement de mon temps pour travailler sur le rapport d’étonnement des 13 étonnés ), la voici donc.

« The truth is, technology has always been destroying jobs, technology has always been creating jobs, » Brynjolfsson said. But with advances in technology coming faster than ever, that equation is out of balance.
« We’re going to see this trend accelerate in the next 10 years, » he said of machines taking over tasks that have been exclusively the province of humans. « The consequences of this are very profound.
« Addressing this paradox is the grand challenge for our generation. »

Le grand défi de notre génération est de confronter ce paradoxe! Cette citation vient d’un prof. de MIT et citoyen américain, l’une des nations les plus en avance avec le numérique. Et nous ici, on ne se penche même pas encore sur ça. Le numérique ce ne sont que des outils… Au mieux, une connection à 4,5MBPS si vous êtes du bon côté de l’un de nos réseaux…
C’est justement cette réflexion sur la confrontation de ce paradoxe que proposait notre rapport d’étonnement.

Je deviens impatiente et à l’étape prochaine, je serai sans doute en tabarnak, plutôt qu’étonnée…

Mais je comprends que des fois l’aveuglement, le déni et l’obscurantisme c’est profond. Je sais de quoi je parle, j’ai nié mon sexe durant 45 ans…

Mais vous n’êtes peut-être pas encore convaincu de l’urgence des enjeux? Lisez donc ce paragraphe

Technology Change Accelerates In The Next 10 Years
Brynjolfsson cited two cases to illustrate how quickly technology is advancing. One is Google’s self-driving car technology, which the MIT professor recently experienced in a drive down Highway 101 in the San Francisco Bay Area. The other is IBM’s Watson computer (pictured) that defeated longtime Jeopardy champion Ken Jennings in a famous man vs. machine competition.

The Google technology could make obsolete thousands of jobs, from cab drivers to long-haul truckers. And Brynjolfsson said the Watson technology is being applied to call centers, financial processing tasks and even medical diagnostics — jobs that once only people could do.

Pourquoi est-il important de se questionner sur l’économie numérique?

Marie-Claude Ducas dans son billet La campagne 2012 et le mirage de « l’élection 2.0 » Disait:

Questionner les politiciens sur « ce qu’ils comptent faire avec l’économie numérique », comme l’a fait la consultante et blogueuse bien connue Michelle Blanc (d’abord avec le chef libéral Jean Charest, ensuite celui de la CAQ François Legault, puis avec Jean-Martin Aussant d’Option Nationale ) je veux bien. Et c’est sûr que, comme plusieurs le soulignent, comme l’a fait, dans ce billet, le spécialiste René Barsalo , il faut s’intéresser à autre chose qu’aux routes et aux ressources naturelles quand on parle de développement économique. Mais… pourquoi serait-ce tellement plus pertinent que si les patrons d’agence de pub allaient demander aux candidats « ce qu’ils comptent faire à propos de l’économie de la publicité »? Ou les comptables, s’enquérir de leur opinion « à propos de l’industrie des firmes de comptabilité et de consultation »? Pourtant, ce sont des enjeux économiques au moins aussi valables : il y a eu bien des fusions et des rachats, récemment, dans ces deux domaines; idem parmi les bureaux d’avocats, d’ailleurs.

Je lui répondis dans mon propre blogue

Se questionner sur l’économie numérique est plus pertinent que se questionner sur l’économie de la publicité ou de celle de la consultation strictement parce que le numérique touche toutes les sphères de l’activité humaine, que strictement pour la portion TI, ça représente 25 milliards de revenus pour le Québec (à l’heure actuelle et avec 40 000 emplois), que ça participe de l’économie du savoir et que comme pour l’électricité qui a permis un gain de productivité énorme pour toutes les industries, le numérique engendre les emplois et la « valeur économique » du XXIe siècle. Déjà en 1994 Nuela Beck parlait de la nouvelle économie et de comment la « valeur » avait transité des biens matériels aux biens immatériels. On a qu’à penser à la valeur de Facebook, d’Apple, d’Amazon et autres pour s’en convaincre. Malheureusement ce ne sont pas les banques qui capitalisent sur ces « valeurs intangibles » mais plutôt les fonds collectifs de placement. Ils sont ceux qui désormais (et depuis le tournant des années 2000) ont l’avoir collectif du capital…

La nouvelle économie de Nuela Beck (1994), Résumé

L’économie nord-américaine subit depuis nombre d’années une transformation radicale. Nuala Beck indique le sens de ces bouleversements et montre les chemins de l’avenir. Affirmant que les statistiques sous-estiment les forces motrices qui animent les industries nouvelles, l’auteure distingue trois cycles: celui des matières premières a dominé la révolution industrielle, celui de la production de masse a alimenté l’ère de la consommation et de l’automobile et la technologie domine le cycle actuel.

Dans La nouvelle économie, Nuala Beck présente le prochain cycle qui nous entraînera dans l’ère de l’intelligence artificielle, du génie génétique, de l’espace et des matières premières nouvelle génération.

M. Barsalo qui est aussi cité par madame Ducas dit avec raison dans un billet du Journal de Montréal, Notre avenir… numérique? :

La triste réalité est, qu’au tournant historique de notre civilisation vers le numérique, aucun des partis présents ne prends cette opportunité au sérieux. Les routes, les ressources naturelles et l’administration des services publics sont pour eux les seuls « vrai » enjeux. Pourtant, les deux sont inter-reliés. En termes d’infrastructures, l’accès au code via un réseau qui relie adéquatement l’ensemble du territoire, ses institutions, ses entreprises et ses citoyens est aussi important que l’eau courante et l’électricité dans la société qu’y émerge. En termes de réduction des coûts, l’utilisation du numérique en matière de planification, de suivi ou de réalisation permet d’assurer une meilleure gestion des ressources et des budgets tout en augmentant la qualité des biens et services.

En abordant de front la question de l’informatisation et de l’ingénierie en réseau des services publics, en partenariat avec le citoyen et l’entreprise privée, nous pourrions initier un chantier numérique dont le Québec entier sera le premier bénéficiaire. Mais avant de dépenser, il faut réviser le processus d’appels d’offres de projets informatiques. Tout comme celui de la construction, on y remarque depuis quelques années des dépassements de coûts vertigineux.

Le meilleur moyen d’assurer ce changement est de mettre de l’avant l’ouverture et la transparence, si chère à la génération des natifs du numérique qui n’attends que ce signal pour s’impliquer. Patenteux comme nous le sommes, avec la mise en place d’un tel chantier, nous pourrons non seulement améliorer notre société et réduire les coûts de l’État, augmenter le niveau de transparence et l’implication citoyenne, mais aussi créer au passage une avalanche de nouvelles entreprises technologiques, équipées pour affronter l’avenir plutôt que de creuser des trous. Dans toutes les régions, unis par le réseau, celles-ci profiteront du succès collectif et exporteront leur savoir faire au reste de la planète, tout en participant à notre croissance économique.

L’un des lecteurs de mon blogue me demanda en commentaire

Vos statistiques reliées à l’économie numérique parlent d’elles même… mais pouvez-vous mentionner vos sources, car des chiffres sans références peuvent perdre de leur crédibilité… malgré le fait qu’ils proviennent d’une plume aussi respectée que la vôtre?

Merci et continuez de vous faire entendre!

Il a raison, mais ça fait TELLEMENT de fois que je montre ces statistiques que je tiens pour acquises qu’elles sont connues et il semble que ce ne soit pas le cas. Donc ces statistiques sont colligées dans mon billet Le Tourisme vs Les TIC au Québec, met-on nos œufs dans le bon panier? . J’y citais Paul Journet dans son article Le tourisme québécois sévèrement critiqué qui disait aussi ceci :

L’industrie touristique représente 2,5% du PIB du Québec. L’année dernière, elle a rapporté des revenus de 10,4 milliards et fourni 134 600 emplois directs.

Or, je me suis amusé à comparer l’industrie du tourisme à celle des Technologies de l’information (qui n’est que l’une des nombreuses composantes de ce que l’on nomme le numérique) avec les chiffres que donnent Affaires étrangères et Commerce international Canada

Le secteur des TIC est un moteur de l’économie du Québec, puisqu’il génère des ventes de plus de 25 milliards de dollars. Ce secteur, qui compte quelque 5 000 entreprises dans la province, emploie approximativement 140 000 personnes. La production des TIC est en grande partie exportée (surtout vers les États-Unis) et représente 35 % de la production totale du Canada dans ce secteur.

Si je récapitule ces chiffres, l’industrie du tourisme génère 10,4 milliards et fournit 134 600 emplois et celle des TIC 25 milliards et 140 000 emplois

L’internet en région ou comment handicaper l’essor économique

En théorie, la beauté d’être un travailleur d’internet, de l’économie du savoir, d’être programmeur, développeur ou entrepreneur techno est qu’on peut travailler de n’importe où sur la planète. En réalité il faut plutôt travailler à des endroits qui offrent les infrastructures permettant à cette économie de se développer. Ces infrastructures incluent au moins deux éléments primordiaux. Un approvisionnement en électricité et un en bande passante. L’électricité est abondante et à un prix raisonnable au Québec. Par contre, la bande passante, c’est une autre histoire. Même dans les grands centres que sont Montréal ou Québec, notre bande passante ne correspond même pas à ce que fournis déjà les autres villes canadiennes qui font partie de iCanada , c’est à dire une vitesse de 100 MBPS. Ici à Montréal, lorsque nous avons un gros 4.5MBPS on considère déjà être chanceux. Et que dire du Vermont qui se targue de fournir maintenant 1000 MBPS à la moitié du prix du fameux Google Fiber du Kansas soit 35 $ par mois? Aurait-on des croûtes à manger?

Et en région, c’est la dèche encore plus extrême.

Dans mon cas particulier, je devrais faire abattre des pins centenaires si je veux avoir l’internet par satellite de Xplornet à un prix compétitif, pour une bande passante médiocre. Sinon, la solution modem cellulaire de Bell coûte 105 $ par mois pour un gros 15 Go de téléchargement. Et je ne vous parle même pas de la bande passante qui est ri-di-cu-le. Il faut donc obligatoirement oublier AppleTV, Netflix et autres services requérant un tant soit peu de téléchargement.

Vous me direz, mais tu n’as qu’à resté dans un grand centre! Je répondrai, vous avez raison, j’aurai vraiment dû m’installer dans un champ « nowhere » au milieu du Vermont…

Quelques autres chiffres:

Dans LeDevoir

Un doute? C’est l’OCDE qui le dit. En 2007, l’Organisation de coopération et de développement économique a mesuré en effet le prix pour accéder et utiliser à la bande passante dans une trentaine de pays, dont le Canada. Résultat: alors qu’un Megabit/seconde de bande passante, soit l’unité de base de mesure de la capacité de transfert d’un réseau, coûte 0,13 $ en moyenne à un Japonais, il faut près de 4 $ à un Canadien pour obtenir la même chose.

À titre comparatif, les Français (0,33 $), les Suédois (0,35$) ou les Américains (2,83 $) doivent débourser beaucoup moins pour avoir la chance d’échanger courriels, photos ou vidéos par Internet. Un clivage palpable cette semaine d’ailleurs alors que la compagnie Numéricâble en France proposait à ses clients une connexion par fibre optique contre 34 $ par mois. Au même moment, à Montréal, Vidéotron exposait sur son site une offre de branchement deux fois moins rapide pour les téléchargements et 100 fois moins rapide pour le téléversement en échange d’une facture de… 90 $, soit trois fois plus cher.

Sur Triplex Radio-Canada

Par exemple, le plus gros forfait de Vidéotron offre 170 Go en aval (vitesse de 120 Mbit/s) et 30 Go en amont (vitesse jusqu’à 20 Mbit/s) pour 149,95 $ mensuellement. « L’utilisation de la bande passante au-delà des limites définies pour cet accès sera facturée à 1,50 $ par gigaoctet supplémentaire, et ce, sans limite mensuelle de facturation », peut-on lire sur le site. De côté de Bell, le plus gros forfait offre 100 Go de bande passante pour 54,95 $, vitesse de téléchargement jusqu’à 25 Mbit/s et vitesse de partage de contenu de 7 Mbit/s. « Pour seulement 5 $/mois, le forfait Utilisation assurée vous offre une utilisation Internet additionnelle de 40 Go. »
(…)

Un film haute définition de 1 h 30 utilise environ 3 Go de bande passante, en définition standard, c’est environ 1 Go l’heure, et il faut compter une moyenne de 5-6 Go pour le téléchargement d’un jeu sur Steam. Selon l’étude de Credit Suisse sur la situation canadienne, utiliser un service comme Netflix pour écouter 30 minutes de télévision par jour équivaut à environ 32 Go d’utilisation Internet mensuellement (pour ce seul service). Bref, si on se tourne vers des services en lecture continue, on peut se retrouver avec une facture salée.

« Les opérateurs font énormément d’argent sur le dépassement de la bande passante, explique Laurent Maisonnave, président du conseil d’administration du service Île sans fil. Ça leur coûte 0,01 $ le Go, alors imaginez les profits lorsqu’ils font payer des surplus de 1 $ à 5 $ le Go supplémentaire. Mais ce n’est pas la seule raison, continue-t-il. Les fournisseurs Internet sont devenus des fournisseurs de contenu. Ils ont maintenant leur propre service de vidéo sur demande et ne veulent pas de concurrence. »

La corrélation entre l’électricité et le numérique pour le développement économique du Québec de demain

L’électricité n’est qu’un outil, ou plutôt une suite de technologies. L’électricité en soi ne fait pas grand-chose. Par contre, elle permet une activité économique incroyable. Elle fait littéralement tourner l’économie. Nous pourrions certainement faire un parallèle entre le numérique et l’électricité. Le développement du numérique fait d’ailleurs songer aux belles années du Duplessisme. Votez pur moi et vous aurez votre « haute vitesse ». Mais de quelle haute vitesse parle-t-on au juste?

D’ailleurs il est très instructif de lire ou relire la page de Wikipedia intitulé Histoire de l’électricité au Québec .

Les premiers tâtonnements de l’industrie sont marqués par une course au développement à Montréal, suivie d’une phase de consolidation nécessaire à des fins d’efficacité et de la création de monopolesrégionaux qui vont graduellement étendre leurs réseaux électriques dans les principaux centres du Québec. Le développement de ces entreprises s’effectue par l’expansion des réseaux ou, tout simplement, par l’acquisition d’une firme voisine et potentiellement concurrente. Les grandes perdantes de ce mode de développement se retrouvent toutefois dans les régions rurales ; certaines municipalités s’organisent de manière autonome, pendant que dans certaines régions, des résidents forment des coopératives de consommateurs. Les deux principales compagnies présentes sur le marché, la Montreal Light, Heat and Power (MLH&P) et la Shawinigan Water and Power Company (SWP) s’imposeront comme les entreprises dominantes du secteur jusqu’aux années 1930, pendant qu’au Saguenay—Lac-Saint-Jean, l’Alcans’implante solidement et développe son potentiel hydraulique en fonction de la croissance de sa production d’aluminium.

La domination des grands monopoles régionaux, « le trust de l’électricité », sera cependant contestée dans l’opinion publique. Cette contestation donnera lieu à une enquête publique, l’implantation d’organismes de surveillance et mènera en 1944 à la nationalisation de la MLH&P et à la création d’une société publique, Hydro-Québec, avec l’adoption de la loi 17, créant la Commission hydroélectrique de Québec.

(…)Influencé par le New Deal du président américain Franklin D. Roosevelt17, le gouvernement Godbout dépose un projet de loi à l’automne 1943, afin de prendre le contrôle la MLH&P, qui exerce un monopole dans la grande région de Montréal.

La loi créant une entreprise commerciale de propriété publique, La Commission hydroélectrique de Québec, est adoptée par l’Assemblée législative le 14 avril 1944. Elle confie à la nouvelle société le mandat initial de « fournir de l’énergie aux municipalités, aux entreprises industrielles et commerciales et aux citoyens de cette province aux taux les plus bas compatibles avec une saine administration financière ». Hydro-Québec avait aussi pour mission de réhabiliter un réseau vétuste et de développer l’électrification des régions rurales non desservies par les entreprises existantes.

Je vois d’étranges similitudes entre « La domination des grands monopoles régionaux » de l’électricité d’hier, et celle des fournisseurs internet et cellulaires d’aujourd’hui. Je vois une corrélation entre le « New deal » américain qui a poussé dans le cul des élus d’hier et le plan numérique de New York , de la France , le opengov d’Obama qui pourrait pousser dans le cul de nos politiciens d’aujourd’hui. Sauf que malheureusement, nos élus ne semblent pas encore comprendre l’urgence d’agir que leurs prédécesseurs eux, avaient compris avec l’électricité. L’électricité est l’un des « outils économiques » particulièrement importants lorsque vient le temps de discuter création d’emploi et emménagement de nouvelles entreprises manufacturières et de transformation. C’est un élément clé de la compétitivité industrielle. MERCI à Taschereau, Godbout, Lévesque et Bourassa d’avoir eu la vision de comprendre que l’électricité était plus qu’un « outil ». Ils ont compris que l’électricité pouvait être un projet de société, lui permettant qu’il devienne un outil de création de richesse et d’emploi majeur du Québec d’aujourd’hui.

Les études relatant l’impact sur l’économie industrielle de l’électricité sont abondantes. L’électricité et « l’énergie » en général sont des vecteurs évidents de l’économie industrielle et du confort de chacun. Tout le monde comprend ça aisément. Pourtant, le numérique est désormais cette électricité d’hier, mais pour l’économie du savoir. Cette nouvelle économie dans laquelle nous baignons depuis bientôt 20 ans. Malheureusement les études qui prouvent son impact sur l’économie, les mesures de cet impact, les ratios et autres indicateurs sont encore en développement. J’en parle d’ailleurs depuis plusieurs années déjà.

Nous étions très en avance au début des années 2000. Nous sommes très en retard aujourd’hui. Le mot clé « numérique » n’est plus à la mode. Le mot-clé qui est à la mode depuis dix ans est « innovation ». Question de mode sans doute. Malheureusement cette mode nuit au développement économique du Québec et nuira encore plus dans les années à venir si nous ne faisons rien. D’ailleurs le CEFRIO vient de mettre en ligne une étude intitulée Indice de l’innovation par les TIC . Étude très intéressante qui tente de rendre sexy, le numérique en l’affublant du mot-clé à la mode « innovation ». C’est à la fois triste et loufoque. Pas que les TIC ne soient pas responsable de la croissance de l’innovation, depuis des années déjà les TIC le sont. Mais il est triste que nous devions enrober le numérique du drap de l’innovation pour réveiller notre classe politique qui se gargarise justement de mots-clés sans pour autant réellement comprendre les enjeux.

Les conclusions de cette étude nous révèlent

Cette enquête trace un lien intéressant entre tiC et innovation. Plus une entreprise ou une organisation utilise de manière intensive les tiC, plus elle affiche une intensité d’innovation élevée. Ce constat s’applique aux innovations de produit, de procédé, de commercialisation ou organisationnelle. En fait, les résultats montrent qu’il est difficile de séparer ces innovations dans la pratique. Les organisations innovantes introduisent souvent plusieurs types d’innovations en même temps.

Le fait que l’on parle d’intensité d’utilisation des tiC et non de simple possession implique que l’investissement ne doit pas seulement être technologique, mais aussi organisationnel. il faut être organisé pour utiliser les tiC mises en place dans les organisations. les autres facteurs qui influencent de manière positive l’intensité d’innovation sont les modifications significatives à l’organisation, l’acquisition de nouvelles expertises, la présence d’équipes multidisciplinaires et la culture d’expérimentation. toutes ces dispositions vont permettre à l’organisation de maximiser l’intensité de l’innovation.
(…)

on reconnaît l’importance pour les entreprises et organisations publiques canadiennes d’accroître leur performance en matière d’innovation, afin qu’elles améliorent leur compétitivité et, de ce fait, la productivité de l’économie canadienne. les politiques mises en place doivent reconnaître le rôle des tiC, mais également tenir compte du contexte dans lequel elles s’insèrent. les politiques doivent en même temps favoriser les éléments complémentaires aux tiC.

Pour les gestionnaires, les résultats soulignent l’importance de voir les investissements en tiC de manière large. Ce ne sont pas simplement des outils à mettre en place. les tiC sont des leviers pour faire les choses différemment, et doivent être accompagnées de décisions parfois difficiles ou risquées sur les modes de fonctionnement de l’organisation.

Mais même les études et les analyses les plus savantes ne serviront à rien s’il n’y a pas de Taschereau, Godbout, Lévesque ou Bourassa pour porter le flambeau de la vision sociétale de l’économie de demain. Je me demande encore qui sera le porteur du flambeau de la richesse économique collective de nos enfants?

L’argumentaire économique du numérique

Après Nuela Beck sonnait les cloches des économistes et gestionnaires de portefeuilles avec son livre La nouvelle économie en 1994. En 2007, C’est le Dr. Robert D. Atkinson qui de The information technology and innovation foundation démontra dans son Digital prosperity, Understanding the Economic Benefits of the Information Technology Revolution , comment les TI sont devenu le fer de lance de la croissance économique et conclu

« In short, while the emerging digital economy has produced enormous benefits, the best is yet to come. » D’ailleurs l’une de ses recommandations est de placer le numérique au centre même, des politiques économiques gouvernementales.«Give the Digital Economy Its Due: Economic policymakers need to view IT issues not just as narrow IT policy, but as the centerpiece of economic policy. This means putting issues of digital transformation at the front and center of economic policy. »

À cet effet, Ed Felten, le premier CTO de la Federal Trade Commission américaine mentionnait dans un article recent

It would obviously be foolish for senior government officials to make economic policy without seeking input from trained economists. Perhaps someday, it will be seen as equally foolish to make technology policy without a computer scientist in the room.

La Banque mondiale quant à elle, rappelle qu’afin de déployer un gouvernement numérique, il est fortement conseillé de commencer par les infrastructures numériques .

Governments should promote strategies that focus on ICT infrastructure development as a prerequisite to e-government ± an « I before E’’ strategy.

Depuis des années déjà, l’OCDE analyse et finance la recherche de mesures économiques qui permettraient d’isoler l’apport du numérique à l’économie en général. ¨Pourtant, cette organisation conservatrice et neutre a déjà avancé dans son rapport THE IMPACT OF THE INTERNET IN OECD COUNTRIES que

“Existing empirical studies, including ongoing OECD work, suggest a positive link between increasing Internet adoption and use and economic growth. Even though the aggregated effects are still preliminary, the relationship between Internet development and economic growth, as well as microeconomic evidence, suggest that governments should continue to pursue policies that help promote Internet connectivity and encourage the take-up of services”.

PWC en 2011 observait aussi la relation intrinsèque entre la croissance économique et la technologie numérique.

Economic growth and technology are inextricably linked. Current economic conditions are fostering investment in technology as emerging markets ramp up their demand for technology to fuel growth, and advanced markets seek new ways to cut costs and drive innovation. This becomes a virtuous circle as digital technologies drive consumer income and demand, education and training, and efficient use of capital and resources—leading to increased economic growth, particularly in emerging markets.

Cette croissance qui lie le numérique à l’économie a même été chiffrée cette année par Boston Consulting Group. BCG avance que d’ici 2016, strictement pour les pays du G20, l’économie numérique représenterait une croissance potentielle de $4,2 billions (je rappelle ici qu’un billion c’est mille milliards).

Je suis certes très enthousiaste à l’idée de croissance économique que pourrait apporter le projet du Plan Nord qui a déjà été présenté par le gouvernement libéral du Québec. Mais il me semble qu’il est grand temps et que nous sommes même très en retard, de planifier, préparer et profiter d’une parcelle de pointe de la tarte de $4,2 Billions de croissance de l’économie numérique dans laquelle, que nous en prenions collectivement conscience ou non, nous sommes déjà partie prenante. Sauf que si nous n’en prenons pas collectivement conscience et que nous ne faisons pas les efforts individuels et collectifs nécessaires pour y prendre part, cette croissance bénéficiera inévitablement à d’autres citoyens.

En conclusion, je suis donc définitivement pour un Plan Nerd, ou plus prosaïquement, pour un plan numérique pour le Québec…

NOTE

Ce texte a d’abord été rédigé pour le collectif « Le Québec à l’heure des choix : regard sur les grands enjeux ». Malheureusement, l’éditeur n’aime pas ma manière de citer mes sources. Il semble que pour cet éditeur, un hyperlien n’est pas dans sa norme et qu’un auteur, titre, éditeur, page, date, soit plus ce qu’il recherche. Ayant déjà été édité 4 fois, je comprends le besoin de l’éditeur, mais étant aussi blogueuse, je comprends ma démarche, qui faisait tout à fait l’affaire de mon éditeur actuel Libre Expression. N’ayant pas le temps de gratuitement faire le tour de chacun des articles cités ici pour répondre aux besoins spécifiques de cet éditeur, je me retire simplement de ce projet. Par contre, vous aurez la chance de prendre connaissance ici de mon texte, et ce gratuitement, ce qui allait aussi à l’encontre de la « philosophie de cette maison d’édition ». Alors c’est triste, mais bon, c’est ça qui est ça…

150 millions de dollars pour la Stratégie culturelle numérique et pour la société, on repassera

Bel effort du gouvernement du Québec qui investira 150 millions de dollars pour une Stratégie culturelle numérique. Selon le communiqué gouvernemental :

Pour les organismes culturels, la révolution numérique représente un défi crucial d’adaptation aux nouveaux moyens d’information et de communication. Ainsi, le gouvernement investira 150 millions de dollars pour soutenir les organismes culturels qui doivent prendre le virage technologique. Les sommes investies serviront notamment au remplacement de l’équipement actuel par de l’équipement numérique.

La Stratégie culturelle numérique sera rendue publique prochainement par le ministre de la Culture et des Communications.

(…)
« Fondement de l’identité québécoise, instrument de rayonnement à travers le monde et important secteur d’activité créateur d’emplois et de richesse, la culture joue un rôle essentiel au développement du Québec », a tenu à rappeler le ministre Marceau.

J’appuie la culture, j’aime la culture, la culture c’est bien, c’est même essentiel. Par contre, lorsque plusieurs étonnés et moi-même demandons un Plan numérique pour le Québec, c’est beaucoup plus que pour strictement la culture. C’est aussi, pour commencer à investir dans les infrastructures, ce grand oublié tant du fédéral que du provincial, qui est cette autoroute sur lequel devrait circuler cette culture justement. Je ne vous répèterai pas mon ras-le-bol de notre infrastructure numérique du tiers monde. Je ne vous parlerai pas non plus de notre économie numérique qui fou le camp hors du Québec à chaque mois à hauteur de 40 à 60% de tout l’argent dépensé en ligne par les Québécois. Je ne vous parlerai pas non plus des MOOC qui font fureur dans les universités américaines et don on n’a pas parlé lors des états généraux sur l’éducation supérieure et qui risque de voir un étudiant de Chicoutimi préféré étudier de chez lui à Harvard plutôt qu’à l’UQAC. Je ne vous parlerai pas non plus des ces centaines de milliers de conducteurs de camion, autobus et taxi qui risque de perdre leurs emplois d’ici quelques années avec l’arrivée du Google car partout en Amérique et dont on ne semble pas encore se soucier. Je ne vous parlerai pas non plus de ces étudiants du primaire à qui on enseigne le code informatique en Estonie, Finlande, Grande-Bretagne ou aux États-Unis alors qu’ici on s’obstine pour savoir si nos écoliers devraient apprendre l’anglais.

Je vous dirai ceci (que nous disions dans notre rapport d’étonnement)

Le Québec glisse vers le bas dans l’échelle de la compétitivité parce que nos voisins, provinces et pays, se sont donnés une vision d’avenir pour tirer collectivement tous les bénéfices des nouveaux modes de communication et de l’économie immatérielle sous la forme d’un Plan numérique.

Tous les rapports concernant l’autoroute de l’information, du rapport Berlinguet de 1995 au dernier rapport Gautrin, ont été tablettés ou risquent de l’être. Depuis 30 ans nous n’entreprenons que des actions individuelles et souvent désordonnées, ce qui vaut aussi pour les 23 ministères, et plus de 200 organismes publics qui sont autant de silos. Nous investissons dans le béton, dans l’avoir et trop peu dans le savoir.

Le Québec vit actuellement une série de crises, la perte de confiance des citoyens envers leurs institutions et leurs dirigeants, les crises économiques qui grugent notre bien-être ou nos crises d’identité, etc.

Nous sommes aujourd’hui une société tellement divisée que nous ne pouvons plus établir de consensus concernant nos projets d’avenir. Ces crises surviennent notamment parce que nous passons d’une ère industrielle vers une autre qui devient postindustrielle. Parce que nous perdons tous nos points de repères, nous devenons inquiets, comme d’ailleurs la plupart des autres sociétés de notre planète.

Nous basculons vers une société de la connaissance où l’information devient notre matière première et l’Internet la place publique où se prennent nos décisions. Nous vivons des passages difficiles parce que nous allons :

D’une démocratie élective > vers une démocratie participative

D’une majorité silencieuse > aux lucides, indignés et carrés rouges

D‘un individualisme forcené > vers une responsabilisation collective

D’une civilisation du livre > vers une civilisation d’images-écran

De la loi de l’offre > à celle de la demande, etc.

Nos six demandes :

• Créer une Agence du numérique qui relèverait de l’Assemblée nationale (comme la Société Hydro-Québec qui a pour mission de gérer toutes les questions énergétiques). Cette agence relèverait du Parlement et devrait transcender les partis politiques et le pouvoir exécutif.

• Co-construire un Plan numérique avec l’ensemble des acteurs et la population de toutes les régions du Québec, capable de développer à la fois l’économie, la culture et les savoirs, dans notre société qui doit s’adapter, comme toutes les autres, au XXIe siècle.

• Créer un Conseil national du numérique qui serait formé des représentants reconnus de l’ensemble des secteurs d’activités et de la société civile. Il serait obligatoirement consulté par le Parlement et les ministères pour toutes questions concernant le développement du numérique sur le territoire québécois. Nous pensons au modèle du Conseil supérieur de l’éducation à l’intérieur de la Loi sur l’instruction publique…

• Créer un forum de participation citoyenne indépendant du gouvernement, soutenu par celui-ci et une fondation par exemple, avec une gouvernance assurant sa neutralité. Un modèle inspirant : NESTA en Angleterre ou http://www.worldwatch.org/

• Investir prioritairement dans le savoir, et non dans l’avoir, c’est-à-dire principalement dans les transferts et la mutualisation des connaissances.

• Investir aussi dans le déploiement de réseaux à très haute vitesse (100 Mb symétrique et plus) et gérer selon les règles “OpenAccess” afin de rendre nos infrastructures interopérables, ouvertes et performantes pour communiquer entre nous et avec l’ensemble des pays avec qui nous entretenons des relations politiques, sociales et économiques

Aujourd’hui, nous investissons dans le passé en empruntant sur l’héritage que nous allons laisser à nos petits-enfants : leur futur. Allons-nous demeurer encore longtemps étonnés devant notre peu d’envergure et de prévoyance ?

Qu’attendons-nous?

Signé : Les étonnés.

Ma conclusion,

L’investissement de 150 millions du gouvernement du Québec est un investissement du passé et nous n’avons toujours pas de vision de l’avenir…

Budget fédéral : tabarnak ,haute vitesse pour le Grand Nord et quoi déjà pour les régions?

Avertissement: Excusez les quelques sacres de ce billet mais ils sont là pour ponctuer mon écoeurantite aigüe…

À chaque budget, qu’il soit fédéral ou provincial, je souhaite ou plutôt je rêve qu’un éclair de génie illumine nos ministres des finances. Mais les rêves sont ça, des créations de l’esprit. Depuis pourtant des années, je milite pour un plan numérique pour le Québec et le Canada. Mais le numérique ne sont que des outils, me disait il n’y a pas si longtemps l’un des chefs de partis québécois. Ce à quoi je lui répondais, une chance que Taschereau, Lévesque et Bourassa n’ont pas pensé comme ça à propos de l’électricité.

Mais bon, le gouvernement conservateur vient de déposer un budget dans lequel il donne des miettes de haute vitesse pour le Grand Nord du Canada. $305 M sur cinq ans ce n’est pas le Pérou… c’est le Canada. Je suis très contente pour les régions éloignées. Ils auront peut-être d’ici cinq ans ce que les régions rapprochées elles n’ont même pas encore. C’est vrai que d’aider 280 000 ménages à l’autre bout du Canada ça coûte pas mal moins cher que d’en aider une dizaine de millions à moins de 100 km des grands centres (comme ma ville de Chertsey qui est à 65 km de Montréal par exemple).

Juste avant Noël, j’eus le privilège de rencontrer en personne Monsieur Nicolas Marcau, notre ministre québécois des finances. Il s’avère être aussi mon député et j’avais été invitée par la Fédération des associations de lac de Chertsey à le rencontrer à titre d’experte technologique. Il est très affable et gentil monsieur Nicolas Marcau. Il a ri un peu gêné lorsque je lui ai fait observer (avec quelques sacres bien sentis) que dans son propre bureau de comté, à sa propre table de conférence, mon cellulaire ne recevait qu’une seule barre de réception. Lorsque je lui ai parlé que la fibre optique passait à 3 km de notre lac et que Bell ne voudrait pas la rallonger jusqu’à nous parce que c’était tellement plus payant de vendre un modem 3G à des coûts faramineux que d,offrir un service de qualité minimal. Je lui ai parlé aussi de mon billet sur l’histoire de l’électrification au Québec et de sa similitude avec l’outrageux retard que nous avons avec les services internet et cellulaire. Il acquiesça à tout et me parla de la théorie du bâton et de la carotte. Le bâton était à Ottawa et la carotte, si elle venait de Québec, coûterait au bas mot un couple de milliards de dollars. Et ce qui est triste est qu’il a raison. Mais ce qui est encore plus triste est que le Vermont réussit à avoir la haute vitesse qui n’est pas à 4 ou 5 mbps mais plutôt à 100 voire à 1000. Ce qui est triste est que ces milliards nécessaire pour que, disons la province se paie une infrastructure internet à tomber sur le cul, elle le donnera plutôt à Microsoft et aux intégrateurs de 3 lettres pour simplement renouveller les licences Microsoft des employés de l’état. Ce qui est vraiment crissement triste est que ce n’est qu’un des très nombreux exemples de pourquoi ça nous prend un plan numérique pour le Québec et pour le Canada au plus sacrant…

Dans le huffingtonpost

Internet haute vitesse pour les régions
Le budget prévoit un investissement de 305 millions$ sur cinq ans pour améliorer l’accès à Internet haute vitesse dans les régions éloignées et le Nord canadien. Ainsi, 280 000 ménages de plus devraient avoir accès à un réseau de 5 mégabits par secondes. Le projet sera inclus dans le programme Chantiers Canada. De plus, le gouvernement fédéral refusera de renouveler les spectres de services sans fil pour Internet haute vitesse des entreprises qui n’ont pas utilisé le spectre à cette fin. Le gouvernement annoncera les détails de ce programme dans les prochains mois.
La mesure répond à une demande de la Fédération canadienne des municipalités. « Nous sommes très heureux d’entendre cette nouvelle, explique son président, Claude Dauphin. Les régions rurales ont besoin d’un accès à Internet haute vitesse. » En plus des individus, plusieurs commerces pourraient bénéficier d’une connexion haute vitesse.

Dans Direction informatique

Le ministère des Finances, dans son énoncé budgétaire pour 2014, indique qu’il souhaite consacrer 305 millions de dollars en cinq ans à l’étendue des réseaux à haut débit dans les collectivités rurales et dans le Nord canadien. Ottawa vise l’offre de réseau dont le débit théorique serait de 5 mégabits à la seconde (5 Mb/s).
« L’amélioration et l’élargissement de l’accès favoriseront la création d’emplois, la croissance et la prospérité pour les Canadiens des régions rurales et du Nord, car ils auront davantage de possibilités de participer à l’économie numérique. En outre, les petites et moyennes entreprises y gagneront un meilleur accès à l’information et aux marchés », indique le gouvernement fédéral dans le document du budget pour 2014.

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Ce que Tourisme Terre-Neuve et Labrador ont compris à-propos du touriste

Cela fait déjà plusieurs années que je fais de la consultation avec plusieurs acteurs du monde touristique en ligne du Québec et d’ailleurs. Cela fait aussi plusieurs années que j’incite mes divers clients à sortir des sentiers battus et à expliquer autrement « pourquoi on devrait aller visiter leurs destinations, hôtels, attractions et/ou utiliser leur service aérien ». Malheureusement, comme j’en ai longuement parlé dans plusieurs de mes billets, les acteurs touristiques s’enferment trop souvent dans les lieux communs. Ils parlent trop de leurs produits et services, ne mentionnent pratiquement jamais les gens et les prestataires touristiques « qui ne sont pas des payeurs et membres de l’association touristique » et qui font pourtant la différence d’une destination. Ils oublient souvent qui si on va à un endroit en particulier, ce n’est pas spécialement pour « dormir dans la chambre d’hôtel ». C’est plutôt pour profiter de tout ce qu’il y a à l’extérieur et qui n’est pas nécessairement payant.

Ainsi, la sagesse et la poésie d’un Fred Pellerin ont fait de son petit patelin sans hôtel et infrastructure touristique, une destination hautement prisée. Ainsi, dans mon billet Web 2.0 et question existentielle des associations touristiques je racontais cette anecdote :

Je me rappelle ce voyage sur le pouce de Québec à Los Angeles (aller-retour). À chacun des gentils automobilistes qui me prenaient à bord, je demandais : Qu’est-ce qui est vraiment intéressant dans votre coin et qui n’est pas sur les cartes touristiques? Ils me répondaient avec un entrain peu commun et me faisaient découvrir des chutes fantastiques, des arbres légendaires, des points de vue époustouflants et des attraits insoupçonnés. Je me souviens encore de ce petit bar dans la localité de Butte au Montana, ou m’avait emmené un Mexicain qui chiquait du tabac dans son vieux pick-up. Le barman avait 70 ans, le lieu était éclairé de lampes au gaz et il donnait le change avec des pièces rondes de 50 sous. Je me trouvais transportée dans le Far-Ouest d’il y a cent ans. Le barman me prêta un chalet de chasseur pour passer la nuit et au lever, je me trouvais dans une vallée d’une beauté si enivrante, que je restai assise là durant trois heures, simplement à admirer le paysage. Mais voilà, ce bar, cette vue exceptionnelle et cet endroit des plus pittoresque pourraient certainement en inspirer plusieurs, mais ils ne seront jamais inscrits où que ce soit, à moins que l’organisme chargé de la promotion touristique de cette région, n’ait réellement compris ce à quoi peut servir le Web.

Vous en déduisez donc que j’étais sur le pouce, que je n’avais pas beaucoup d’argent, mais que tout de même, je mangeais dans des restaurants et je dépensais du fric à chacun de mes arrêts. Ainsi, Tourisme Terre-Neuve et Labrador ont compris que des exemples de gens qui n’ont pas un sou peuvent en inspirer plusieurs qui ont les poches pleines et les faire venir dépenser chez eux. À preuve, ce petit bijou de vidéo d’un monsieur qui parcours la province avec son âne et sa maison charrette dans la section « à quoi devez-vous vous attendre à Terre-Neuve et Labrador » de leur excellente page Youtube.

ou encore cet autre bijou sans aucun rapport :Une chèvre sur un cheval

Et que dire de ce sublime message publicitaire qui m’a décroché une larme et donné définitivement le goût d’aller gambader chez eux

Oui il faut parler de ses produits et services. Oui il faut faire plaisir à ceux qui donnent le cash pour avoir une présence en ligne, mais oui il faut surtout parler à l’émotion de ceux à qui ont s’adresse et profiter de ses spécificités et de ses atouts qui ne sont pas toujours des édifices en béton, des gens qui sont nos membres payants ou de nos paysages (la nature est magnifique à la grandeur de la planète). Le rêve, la folie, la poésie et l’émotion sont parfois des arguments TELLEMENT plus vendeur…

P.-S. La page Youtube de Terre-Neuve et Labrador a 2 102 936 vues. Celle de Tourisme Québec en a 1 533 399. Je serai curieuse de connaître le budget de chacun… 🙂

Le Tourisme nautique au Québec, une opportunité manquée

Comme vous le savez peut-être, j’ai une niche de client assez importante dans le secteur du tourisme en ligne. Par ailleurs, je suis une toute nouvelle propriétaire d’un ponton Princecraft Vantage de 23 pieds (fait au Québec) avec un moteur de 115 cv et d’une remorque qui devrait me permettre de faire du tourisme nautique. Dans mon rêve de découvrir le Québec par les voies maritimes, je me disais qu’il y avait certainement déjà plein d’informations pour me permettre de faire un choix de destination et de planifier différents voyages. Après tout le Québec est l’une des plus grandes réserves d’eau douce de la planète et notre pays a été construit et son essor économique premier venait de nos très vastes voies navigables. Mais la réalité de mon rêve d’aventure nautique est tout autre.

Le tourisme nautique est une grande opportunité touristique manquée

Dans ma recherche internet pour trouver une ou des destinations de croisières alliant voie navigable, marina ou rampe de mise à l’eau et carte nautique spécifiant les lieux d’hébergement et restaurants, pratiquement rien n’existe. Tout est à faire.

Il y a bien certainement le site navigationquebec.com qui répertorie toutes les marinas du Québec. Malheureusement le site ne contient pratiquement pas de détail à propos de l’hébergement disponible en bordure de voie navigable. Je peux certainement dormir sur mon ponton, il est équipé pour ça. Mais j’aimerais mieux dépenser et faire vivre l’économie touristique qui me fait vivre à son tour et reposer mes vieux os dans le confort d’un lit douillet.

Il y a aussi l’un de mes clients chouchou, Tourisme Mauricie, qui a développé une application interactive et une page web spécifique, La route des rivières, avec d’abondantes informations touristiques, mais qui ne contient encore que peu d’informations sur la relation voie navigable/hébergement.

Même sur le site « officiel » du ministère du Tourisme du gouvernement du Québec, QuébecOriginal, avec la requête « Tourisme nautique de l’engin de recherche de bonjour Québec, les résultats présentés, sont d’une pauvretés à faire bâiller.

Pourtant, dès 2004, le très pertinent Réseau de veille en tourisme de l’UQAM présentait le document Tourisme nautique : la carte cachée des régions. On pouvait y lire :

Fortement composée de baby-boomers, de préretraités et de retraités ayant des revenus supérieurs, les plaisanciers sont souvent des passionnés de leur passe-temps.
(…)
La notoriété du Québec en tant que destination nautique demeure faible sur les marchés extérieurs et beaucoup reste à faire pour capitaliser sur cette clientèle potentielle. Voici quelques pistes d’actions pouvant être envisagées pour améliorer l’offre du tourisme nautique au Québec:
• Accroître les investissements et soutenir les actions promotionnelles avec de nouveaux partenaires tels que les parcs, clubs de golf, hôtels, etc.
• Consolider et développer l’offre autour de pôles de destination et prioriser les havres ayant déjà une masse critique d’activités touristiques et une infrastructure d’accueil.
• Développer des bases de location (charter) permettant de cibler de nouvelles clientèles.
• Améliorer la qualité des structures d’accueil, incluant la formation du personnel de première ligne et favoriser l’intégration du nautisme dans l’offre touristique existante.
• Instaurer des mécanismes de collecte d’information sur les plaisanciers afin d’en dresser un profil plus précis et de mieux cibler les stratégies marketing.

Il faut croire que 10 ans plus tard, cette carte cachée des régions, l’est toujours tout autant.

Deux ans plus tôt, le document PLAN STRATÉGIQUE DE DÉVELOPPEMENT ET DE MARKETING DU TOURISME NAUTIQUE de DBSF commandé par Nautisme Québec, faisait déjà de nombreuses recommandations quant à la mise en place d’informations et de structures favorisant le tourisme nautique au Québec. Il faut croire que tout reste à faire.

Question de tourner le fer dans la plaie, dans un article de Canoë de février de cette année Le tourisme nautique québécois a la cote on révèle que:

Avec des retombées économiques supérieures à 1 milliard de dollars, le tourisme nautique à Québec prend une sérieuse importance.
Alors que l’un des axes prioritaires du Plan de développement de l’industrie touristique 2012-2020 du ministère du Tourisme est de promouvoir le fleuve Saint-Laurent pour en faire une icône touristique internationale, l’Association maritime du Québec (AMQ) profite de l’ouverture du Salon du bateau et des sports nautiques de Montréal, qui se déroule du 7 au 10 février, et constate avec plaisir que ce marché a le vent en poupe.

L’internet en région ou comment handicaper l’essor économique

En théorie, la beauté d’être un travailleur d’internet, de l’économie du savoir, d’être programmeur, développeur ou entrepreneur techno est qu’on peut travailler de n’importe où sur la planète. En réalité il faut plutôt travailler à des endroits qui offrent les infrastructures permettant à cette économie de se développer. Ces infrastructures incluent au moins deux éléments primordiaux. Un approvisionnement en électricité et un en bande passante. L’électricité est abondante et à un prix raisonnable au Québec. Par contre, la bande passante, c’est une autre histoire. Même dans les grands centres que sont Montréal ou Québec, notre bande passante ne correspond même pas à ce que fournis déjà les autres villes canadiennes qui font partie de iCanada, c’est à dire une vitesse de 100 MBPS. Ici à Montréal, lorsque nous avons un gros 4.5MBPS on considère déjà être chanceux. Et que dire du Vermont qui se targue de fournir maintenant 1000 MBPS à la moitié du prix du fameux Google Fiber du Kansas soit 35 $ par mois? Aurait-on des croûtes à manger?

Et en région, c’est la dèche encore plus extrême.

Dans mon cas particulier, je devrais faire abattre des pins centenaires si je veux avoir l’internet par satellite de Xplornet à un prix compétitif, pour une bande passante médiocre. Sinon, la solution modem cellulaire de Bell coûte 105 $ par mois pour un gros 15 Go de téléchargement. Et je ne vous parle même pas de la bande passante qui est ri-di-cu-le. Il faut donc obligatoirement oublier AppleTV, Netflix et autres services requérant un tant soit peu de téléchargement.

Vous me direz, mais tu n’as qu’à resté dans un grand centre! Je répondrai, vous avez raison, j’aurai vraiment dû m’installer dans un champ « nowhere » au milieu du Vermont…

Quelques autres chiffres:

Dans LeDevoir

Un doute? C’est l’OCDE qui le dit. En 2007, l’Organisation de coopération et de développement économique a mesuré en effet le prix pour accéder et utiliser à la bande passante dans une trentaine de pays, dont le Canada. Résultat: alors qu’un Megabit/seconde de bande passante, soit l’unité de base de mesure de la capacité de transfert d’un réseau, coûte 0,13 $ en moyenne à un Japonais, il faut près de 4 $ à un Canadien pour obtenir la même chose.

À titre comparatif, les Français (0,33 $), les Suédois (0,35$) ou les Américains (2,83 $) doivent débourser beaucoup moins pour avoir la chance d’échanger courriels, photos ou vidéos par Internet. Un clivage palpable cette semaine d’ailleurs alors que la compagnie Numéricâble en France proposait à ses clients une connexion par fibre optique contre 34 $ par mois. Au même moment, à Montréal, Vidéotron exposait sur son site une offre de branchement deux fois moins rapide pour les téléchargements et 100 fois moins rapide pour le téléversement en échange d’une facture de… 90 $, soit trois fois plus cher.

Sur Triplex Radio-Canada

Par exemple, le plus gros forfait de Vidéotron offre 170 Go en aval (vitesse de 120 Mbit/s) et 30 Go en amont (vitesse jusqu’à 20 Mbit/s) pour 149,95 $ mensuellement. « L’utilisation de la bande passante au-delà des limites définies pour cet accès sera facturée à 1,50 $ par gigaoctet supplémentaire, et ce, sans limite mensuelle de facturation », peut-on lire sur le site. De côté de Bell, le plus gros forfait offre 100 Go de bande passante pour 54,95 $, vitesse de téléchargement jusqu’à 25 Mbit/s et vitesse de partage de contenu de 7 Mbit/s. « Pour seulement 5 $/mois, le forfait Utilisation assurée vous offre une utilisation Internet additionnelle de 40 Go. »
(…)
Un film haute définition de 1 h 30 utilise environ 3 Go de bande passante, en définition standard, c’est environ 1 Go l’heure, et il faut compter une moyenne de 5-6 Go pour le téléchargement d’un jeu sur Steam. Selon l’étude de Credit Suisse sur la situation canadienne, utiliser un service comme Netflix pour écouter 30 minutes de télévision par jour équivaut à environ 32 Go d’utilisation Internet mensuellement (pour ce seul service). Bref, si on se tourne vers des services en lecture continue, on peut se retrouver avec une facture salée.
« Les opérateurs font énormément d’argent sur le dépassement de la bande passante, explique Laurent Maisonnave, président du conseil d’administration du service Île sans fil. Ça leur coûte 0,01 $ le Go, alors imaginez les profits lorsqu’ils font payer des surplus de 1 $ à 5 $ le Go supplémentaire. Mais ce n’est pas la seule raison, continue-t-il. Les fournisseurs Internet sont devenus des fournisseurs de contenu. Ils ont maintenant leur propre service de vidéo sur demande et ne veulent pas de concurrence. »

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Les dépenses et la consommation reliées directement et indirectement à l’internet ont maintenant un impact économique plus important que les secteurs de l’agriculture ou de l’énergie. En moyenne, l’internet contribue pour 3.4% du produit intérieur brut de 13 pays analyse par une récente étude de McKinsey et il a une croissance plus importante que celle du Brésil. D’ailleurs internet contribue à 21% de la croissance du produit intérieur brut de 5 des pays qui sont les plus avancés avec internet. Pour un emploie perdu, internet en crée 2.6. 75% de l’impact d’internet se retrouve dans des industries traditionnelles et les petites et moyennes entreprises qui utilisent beaucoup le web exportent et croissant deux fois plus que les autres. Plusieurs autres chiffres éloquents militant pour que les décideurs d’affaires et gouvernementaux s’ouvrent les yeux et réalisent que le Web, est maintenant l’outil de croissance numéro un de la planète.

Dans sa lumineuse publication Internet Matters: The Net’s sweeping impact on jobs, growth and prosperity (PDF), McKinsey prend l’analogie du développement de l’électricité comme corolaire du développement industriel et économique. Analogie que j’avais utilisé dans mon billet La corrélation entre l’électricité et le numérique pour le développement économique du Québec de demain . Ils reprennent aussi certains arguments des analyses de l’OCDE THE IMPACT OF THE INTERNET IN OECD COUNTRIES, de PWC The New Digital Economy How it will transform business (PDF) ou de BCG The Internet Economy in the G-20, The $4.2 Trillion Growth Opportunity.

Bref, si tous ces bonzes de l’analyse économique mondiale s’entendent pour dire que le Web et internet sont maintenant le moteur principal de la croissance économique, il me semble qu’ici au Québec, il serait peut être temps qu’on s’y arête un peu, qu’on nomme un ministre du numérique et qu’on enclenche un virage à 360 180 degrés visant à mettre en oeuvre les recommandations que tous ces éminents analystes font. Pour citer McKinsey:

• Promote human capital
• Ease access to financial capital
• Develop infrastructure
• Create an attractive business environment

Et

• Public Decision makers should act as catalysts to unleash the internet’s growth potential
• All business leaders, not juste e-CEOs, should put the internet at the top of their strategic agenda
• All stakholders should take part in a fact-based, public-private dialogue.

Comme on dit en anglais, “food for thought”, matière à reflexion…

Les compétences nécessaires au succès des gestionnaires sur les médias sociaux

C’est via la plateforme ParisTech que je prends connaissance d’un article de McKinsey Quarterly, Médias sociaux : six compétences que tout dirigeant se doit de maîtriser. Les auteurs y parlent de l’expérience de GE (qui ont toujours été des innovants du Web et dont je vous ai parlé ici maintes fois). Ils y développent d’ailleurs un intéressant tableau des six compétences, désormais importantes, afin de harnacher les médias sociaux en entreprise. Ce tableau est selon moi « un idéal à atteindre » puisque même dans l’article, les exemples et explications de chacune des compétences sont donnés à la pièce. Personnellement je n’ai encore rencontré aucun gestionnaire qui les maîtrise toutes et moi-même, j’ai encore bien des choses à travailler. Selon les auteurs :

Selon nous, l’aptitude à capitaliser sur le pouvoir transformationnel des médias sociaux, tout en atténuant les risques qui leur sont associés appelle un nouveau type de dirigeant. La dynamique des médias sociaux accentue encore le besoin de qualités qui constituent depuis longtemps le socle d’un leadership efficace, telles que la créativité stratégique, une communication authentique, la capacité de faire face aux dynamiques sociales et politiques d’une société et enfin celle de concevoir une organisation à la fois agile et réactive.

Mais les médias sociaux ajoutent de nouvelles dimensions à ces caractéristiques. Par exemple, ils requièrent la capacité de créer du contenu multimédia convaincant et attrayant. Les dirigeants doivent exceller dans la co-création et la collaboration – ces dernières constituant la devise de l’univers des médias sociaux. Ils doivent à la fois bien comprendre la nature des différentes technologies sociales mais aussi les effets difficilement contrôlables que ces derniers peuvent produire.

La dimension organisationnelle est tout aussi importante : les dirigeants doivent cultiver une nouvelle infrastructure sociale, reliée par une technologie dématérialisée, qui par sa nature favorise d’une part des interactions constantes au-delà des barrières physiques et géographiques, mais aussi des discours et des échanges organisés de façon autonome.

C’est donc une interaction entre compétences en leadership et principes de design organisationnels qui se joue : nous l’avons baptisée « apprentissage des médias organisationnels », et elle se définit en fonction de six dimensions interdépendantes et qui s’alimentent les unes les autres.

 

 
Les six dimensions du leadership rompu aux médias sociaux
 

 

 

Par ailleurs, si on réduit ces compétences à leur plus simple expression, dans l’article de Forbes cette fois-ci The Only Essential Skill You Need To Be Successful Online, on mentionne qu’il faut être un bon rédacteur. Un bon raconteur quoi. Tout comme pour le leadership, on doit ESSENTIELLEMENT posséder l’habileté de convaincre.

So many people think that creating a successful business on the Internet is some big mystery.
The reality is that it’s easier than you might think, because online success boils down to one key skill.
No, you don’t need to be a genius coder or have an excellent eye for design. You don’t need high-powered connections, or even a website of your own (at first). It’s much more simple than that.

If you want to be successful online, the only essential skill is being a good copywriter.

What is copywriting, specifically? It’s the art of writing persuasively in order to market a product, service, person, or idea. If you haven’t looked around lately, the vast majority of the Internet comes in text form. Along with that, nearly all the writing you see is persuasive. News articles, sales pages, status updates — they’re all trying to sell something, even if it doesn’t always seem like it.

So why is this so important to success online?

For the same reason sales is so crucial to traditional business. If you can convince someone to see things your way, there’s nothing you can’t do — the options are limitless.