- Michelle Blanc, M.Sc. commerce électronique. Marketing Internet, consultante, conférencière, auteure. 18 ans d'expérience - https://www.michelleblanc.com -

Problématiques du marketing de destination

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C’est Frederic Gonzalo dans son billet Le marketing de destination, un modèle à réinventer [2] qui m’allume sur des problématiques de marketing de destination qui ne sont toujours pas résolues. Il y cite un article de LeDevoir [3] qui mentionne que :

Le monde du tourisme au Québec est très décentralisé. Pas moins de 1831 organismes interviennent dans le domaine et 21 associations touristiques régionales (ATR) font de la promotion à l’étranger. Peut-on vraiment faire un marketing efficace dans ce contexte ? Paul Arseneault, de la Chaire en tourisme de l’UQAM, se pose la question.

« C’est beaucoup trop décentralisé, dit-il. L’industrie ne peut pas faire l’économie d’un débat sur le rôle de chacun. La question est de savoir si on utilise au mieux les ressources que nous avons. »

Déjà, ça fait pas mal de monde qui se marche sur les pieds. Cette multiplicité d’acteurs qui se compétitionnent ad nauseam (entre autres avec l’argent du contribuable), compétitionnent aussi avec d’autres joueurs strictement web, qui eux n’y sont que pour faire de l’argent. À titre d’exemple, l’un de mes clients ATR (Association Touristique Régionale) travaillait avec un fournisseur web qui du jour au lendemain décida de se faire lui-même un portail touristique et de pomper les contenus de son client et des autres ATR et justifiants à mon client “que pour lui ce serait sans frais et qu’il lui faisait de la pub gratuite”. La belle affaire. Par ailleurs, monsieur Gonzalo identifie aussi la problématique fondamentale de plusieurs de ces 1831 organismes. Qui est réellement le client? Les touristes ou les commettants des organismes?

L’effet pervers est que la destination se retrouve qu’à ne faire la promotion des membres, même si certains intervenants répondraient mieux à certaines questions de voyageurs en ligne, sur les médias sociaux ou même en personne. En 2013, peut-on encore se limiter uniquement à représenter les membres payants dans nos communications marketing? (Lire: À quoi sert l’information touristique? [4]) Et quand une association touristique régionale met de l’avant une campagne estivale, le fait-elle en pensant à satisfaire et attirer une clientèle cible en particulier, ou plutôt en prenant compte des priorités dictées par certains membres qui veulent notamment « se faire voir » à la télé, parce que « ça rejoint plus de monde »? En d’autres mots… le client est-il le voyageur ou le membre payant à qui on doit rendre des comptes?

J’avais d’ailleurs déjà parlé de cette problématique dans mes billets Web 2.0 et question existentielle des associations touristiques [5] et Web 2.0 et question existentielle des associations touristiques, partie 2 [6] (il y a déjà 5 ans). Plus récemment, j’en discutais aussi dans les billets L’industrie touristique au Québec et sa courte vue numérique [7] et De l’importance de savoir à qui on parle [8].

À ne parler que des prestataires, on oublie le touriste et nos joyaux touristiques

Un peu avant mes vacances, « je sautais une coche » à propos du tourisme nautique dans mon billet Le Tourisme nautique au Québec, une opportunité manquée [9]. Dans les commentaires de ce billet, bien des joueurs majeurs de cette industrie vinrent se justifier des efforts déjà accomplis. [10] Ils y évoquent d’ailleurs la multiplicité des acteurs et du temps que ça prend pour que tous se parlent. On y vante la mise sur pied de « stations nautiques » par l’Association Maritime du Québec (AMQ). Malheureusement là ou le bât blesse est que lorsque l’on parle de cartographie maritime (qui ne compte que les cartes marines sans égards aux prestataires touristiques) on nous renvoie vers TrakMaps [11] qui nous vend ces cartes à très gros prix. Je suis très heureuse pour ce fleuron des cartes maritimes et de pistes de VTT qui jouit d’un monopole payant et dont la promotion se fait par ceux-là mêmes qui devrait fournir plus d’infos à l’usager, mais disons que le modèle n’est pas des plus économique pour l’usager. Il m’en a couté plus de 250 dollars pour acheter 3 cartes marines papier.

Un exemple de fleuron touristique oublié

La plus grande plage au Québec et sans doute la plus belle est le réservoir Baskatong [12]. Ce réservoir avec ses 2800km de berge et ses 160 îles a le défaut d’être à la fois dans l’ATR des Laurentides et de l’Outaouais. Il a aussi le défaut de ne pas avoir de grandes chaînes hôtelières qui paient pour en faire sa promotion. Je sais tout cela parce que j’ai eu le plaisir d’y être invitée « gratos » par les propriétaires du Rabaska Lodge [13] qui ayant vu mon billet sur le tourisme nautique, se disaient que j’aimerais sans doute me perdre dans cette mer intérieure à l’eau chaude que peu de gens connaissent. J’ai été subjuguée par la beauté de cette région. Disons que le gros avantage de cette région (qui n’en est pas une ) est que comme c’est peu connu, vous pouvez vous trouver l’une des 160 îles et y être seul au monde. Pour un touriste c’est le paradis. Par contre, pour les gens qui y vivent et qui tentent d’en faire la promotion, c’est l’enfer bureaucratique avec très peu de résultats. Heureusement pour Martin Gamache, le copropriétaire, il est l’une des sommités québécoises de la motoneige et du VTT ce qui lui donne une certaine visibilité dans les médias [14] comme à RDS où il chronique de temps à autre sur ses passions. Mais disons que pour les gens du coin, à se battre contre le voisin de Mont-Tremblant qui draine toute l’attention médiatique, ce n’est pas une mince affaire…

En prime, une vidéo de la chute du serpent à 30km en VTT du Rabaska.