De la transparence, de la mise en scène et de la perte de contrôle

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On me dit souvent que je suis très transparente sur le Web. C’est vrai en partie. J’ai d’ailleurs déjà parlé de l’importance de l’authenticité, de la perte de contrôle salutaire (par rapport à vos contenus Web) de savoir déconner et des différents types de transparence. Cependant, depuis un certain nombre de semaines, je réalise aussi que même la transparence radicale (comme j’aime à l’appeler) est elle-même toujours une mise en scène que je contrôle totalement. JE décide ce que je partage, comment je le partage, quand je le fais et j’ai souvent un objectif sous-tendant cette communication. Je contrôle absolument tout. Or tout à l’heure, je rencontre la journaliste Josée Blanchette qui veut faire un topo sur moi pour le journal Le Devoir et ça m’énerve. J’ai une très grande confiance en madame Blanchette que j’aime beaucoup. Je suis convaincue que son topo me sera favorable et qu’il sera très humain, à l‘image de ce qu’elle a l’habitude de faire. Mais de céder le contrôle de mon image à quelqu’un d’autre, maudit que ça me fatigue….

À chaque fois que j’ai eu une entrevue à propos de moi, j’ai mis des balises très strictes. On ne pouvait pas me parler de tel ou tel sujet ou me questionner sur ceci ou cela. J’ai en outre refusé de nombreuses entrevues et documentaires qu’on voulait faire sur moi. Je ne suis pas une bête de cirque et mon image c’est mon brand. Je la contrôle donc très, très soigneusement. Mais là je me lance dans le vide et ça me donne le vertige…

MAJ
J’ai eu une très belle rencontre avec Josée Blanchette qui est très humaine, brillante, rigolote et ouverte. Elle me fit d’ailleurs remarquer qu’au fil de ses questions avec lesquelles je répondais spontanément, je lui répétais très souvent « mais ça tu ne peux pas écrire ça ». C’est comme si j’ai un désir franc et ouvert de partager qui je suis, mais qu’en même temps je suis constamment à l’affût de comment ce que je dirais, pourrait avoir un impact sur les gens qui m’entourent (lire ici mes très proches) et sur l’image que les gens pourraient se faire de moi s’ils savaient vraiment tout. C’est une forme de pudeur disons. J’ai encore bien des zones secrètes qui se doivent de le rester. C’était comme une danse impudique que je ne voudrais pas qu’on regarde. J’ai comme le besoin de justifier bien des choses en les disant, afin qu’elle comprenne vraiment, mais ces choses sont encore trop proches de moi pour que je les partage au monde entier. Peut-être lorsque je serais vieille…

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Commentaires

  1. Marc Desjardins

    Je vais sortir de mon image de communicateur Web/pub/journaliste et revêtir mon identité de metteur en scène/directeur artistique pour commenter ce que tu dis ici. Je me suis aperçu, à force de travailler de très près avec des gens de la stature de Merce Cunningham, Claude Léveillée ou encore Peter Gabriel, des gens qui semblent toujours contrôler parfaitement leur image, qu’avec la maturité vient un bien plus grand abandon, une plus profonde transparence. Ce n’est pas pour rien qu’une jeune célébrité, un artiste nouveau est toujours plus sur ses gardes, plus fermé et aussi plus chiant qu’un plus âgé, plus mature.

    C’est là le secret de ce que tu appelles à juste titre, l’authenticité. On ne l’invente pas, elle vient avec le temps et la confiance qu’on a dans ce qu’on est et ce qu’on dit.

    Je te lis depuis un moment et j’échange avec toi franchement et je vois en toi cette authenticité qui fait que, même dans tes pamphlets les plus colorés par une mauvaise foi toute subjective et légitime, on te suit parce qu’on sait que tu dis ce que tu penses. Oh, bien sûr, comme tout communicateur(trice) d’expérience, tu sais très bien aménager la réalité, jouer le punch, la contradiction et le ton… tu spin très bien… Mais toujours il y a ta vérité profonde et c’est pour ça que tu as cet auditoire fidèle qui te fait confiance.

    Tu as beau dire que tu gardes le contrôle, je crois que tu sais t’abandonner bien plus que tu ne le crois/sais, tu as toujours une petite ouverture risquée qui laisse passer la lumière en plus de la vérité empirique. Ça, Michelle, c’est la maturité et la noblesse. Alors, ne t’en fais pas avec Josée, une autre authentique immense, tout ce qui va s’échanger sera toi et vrai.

  2. Briac

    Intéressant paradoxe, finalement pas de révolution, juste une façon plus sophistiquée de communiquer 🙂

  3. JF Paradis

    Ce que l’on craint le plus est souvent, sinon tout le temps, ce qui nous apporte le plus…

  4. Olivier

    “mon image c’est ma marque” Peut-être éviter d’utiliser son image perso comme image professionnelle ? C’est effectivement je pense une pratique dangereuse surtout quand on est honnête, peut-être pas très noble surtout quand on est malhonnête, mais très moderne et souvent efficace (c’est pour ça que les agents immobiliers nous assaillent tous de leur photo ?) Déshumaniser le site avec nomdecompagnie.com et logo plutôt que nomdepersonne.com + photo ? Apple ne met même plus les noms des auteurs dans les About boxes de ses logiciels, et n’a pas de blogue.

  5. Nicolas Sarrasin

    Dans un registre plus psychologique, l’authenticité correspond à l’expression de ce que nous sommes vraiment. Et pour exprimer ce que nous sommes vraiment, nous devons savoir vraiment qui nous sommes… ce qui n’est pas si facile ! L’authenticité «pure» ne tolérerait donc pas de contrôle d’image mais assumerait totalement ce que l’on sait, ce que l’on croit, ce que l’on valorise, bref, ce que l’on est. Or, il est toujours difficile de faire totalement abstraction de ce que les autres pensent de nous et de ne pas gommer certains détails ou d’en mettre d’autres en valeur pour nous montrer sur _ce que l’on croit être_ notre meilleur jour, surtout si l’on a de la visibilité médiatique. Ce «contrôle» de notre image de soi correspond au concept de «self presentation» étudié en psychologie cognitive (très intéressant). Nous sommes donc souvent pris entre l’arbre de l’authenticité et l’écorce de l’influence sociale et du désir d’être bien perçu…

  6. Christiane Gervais

    Bonjour Michelle,

    De tous les chroniqueurs, blogueurs ou journalistes qui font dans « l’humain » j’ai l’impression que Josée Blanchette est bien la plus « sûre ». Étalant son soi-même un peu partout depuis des années elle semble assez ouverte à la folie, à l’excès, aux états d’âme et à la réflexion. Et puis, n’êtes-vous pas dans une phase où vous jouez avec des aspects d’extériorisation de ce que vous êtes (Chez Jules entre autres)? Ne pas contrôler l’entrevue? Peut-on vraiment, en entrevue, vous amener là où vous ne voulez pas aller? Bonne rencontre!

  7. Yves Carignan

    Tu fais bien de protéger ton jardin secret car les médias vont toujours pousser un peu plus pour avoir une forme d’exclusivité sur les personnages publics. Gardes tes distances tout en étant “disponible”.

    On s’en est souvent parlé, tu n’es pas une bête de cirque que l’on peut mener à sa guise ! Tu as tellement de choses à dire et à apprendre aux gens, c’est bien que tu sois médiatisée et en contrôle.

    À bientôt !

  8. Vincent

    C’est court mais c’est bon ! En effet ta sincérité t’amène à nous dire que tu es sincère en ligne de manière contrôlée et dans une logique globale de ton identité numérique.

    Donc en fait tu es sincère mais tu ne dit pas tout, tu as un filtre web sur le même mode que toute personne dans la vie réelle a un filtre social.

    Le personnal branding commence sérieusement à me gonfler dans la course a l’égo, l’affichage public de son faux moi et en promettant à des boeufs de devenir des apsaras (proverbe cambodgien ou qui mériterait de l’être!)

  9. Josee St-Amand

    T’es «cute» Michèle; Il y a pas a dire même les grandes gueules ont des jardins secrets. Je suis très heureuse de te l’entendre dire. Prends en bien soins. Merci encore de nous partager c’est aspect de toi, ça te rend bien humaine.

  10. Christiane Gervais

    On peut très bien être entièrement authentique dans ce qu’on révèle mais pour l’être, on n’est pas obligé de tout révéler!

    J’ai hâte de lire le billet de Josée Blanchette!

  11. steph

    J’ai un débat quasi permanent avec un très bon ami, qui ne comprend pas mon désir d’écrire un blog. En fait, il voudrait savoir si l’objectif est de faire un genre de journal intime public (Oh!La belle oxymore!^-^) ou bien d’apporter quelque chose à de sinistres inconnus.

    A mon sens, il s’agit d’une combinaison des deux. Même si je serais ravie si mes petites histoires ou réflexions pouvaient aider quelqu’un, c’est surtout une manière de s’adresser à un public particulier,tout en ayant l’air de se dévoiler complètement. En même temps, à moins d’être un ermite, ce que nous sommes, et donc nos histoires, impliquent des proches ou des personnes dont nous ne nous sentons pas le droit d’exposer la vie, quand bien même leur rôle serait marginal. De fait, écrire dans un blog implique une forme d’auto-censure: on se dévoile certes, mais si cela implique d’autres personnes, on occulte certains faits ou pensées, pour ne pas blesser ou créer des quiproquos.

    Enfin, c’est un point de vue: sans jardin secret, tout un chacun perdrait beaucoup de son intérêt aussi. ^-^

  12. Méro

    Un jardin secret ou un nombril ?

  13. Avis à mes détracteurs, La conversation, c’est de jaser… • Michelle Blanc, M.Sc. commerce électronique. Marketing Internet, consultante, conférencière et auteure

    […] sa saveur linguistique régionale, d’aborder des sujets aussi sérieux que celui de la mort, De la transparence, de la mise en scène et de la perte de contrôle, et du narcissisme et de ma […]