Comment certaines municipalités compromettent les données personnelles de leurs citoyens par inadvertance ou incompétence…

L’un de mes clients municipaux me demande d’analyser deux applications (et fonctionnalités) web qu’il aimerait implanter sur son site web. La première est une fonctionnalité québécoise d’alerte multiplateforme en cas de problématique comme un sinistre, feu de forêt, avis d’ébullition, risque de gel et autres. L’autre application en est une de soi-disant intelligence artificielle municipale (en faisant valoir le concept de ville intelligente) permettant de payer ses contraventions, répondre à un sondage, chatbot ou de carte numérique intelligente.

Le problème des données personnelles

Tout d’abord je spécifie que les deux fournisseurs de ces applications/fonctionnalités sont québécois et que leurs clients le sont presque exclusivement aussi. Je ne les nomme pas afin de ne pas compromettre ni ces entreprises ni ces municipalités (et de toute évidence afin de ne pas m’exposer à des poursuites préventives). L’un des deux fournisseurs n’a même pas de politique de vie privée sur son propre site. L’autre, a une fiche de recommandation peu enviable sur le AppStore d’Apple comme quoi, il est plein de bogues. De surcroit, les deux utilisent principalement l’architecture de sous-domaine de leur propre site afin de fournir la fonctionnalité, comme dans l’exemple: VilleXYZ.Fournisseurmédicocre.com . Ainsi, les usagers qui sont des payeurs de taxes de la municipalité sont en fait redirigés sur le site du fourniseurmédiocre.com qui a le contrôle complet de leurs données. À contrario, il existe des équivalents comme par exemple Onesignal qui grâce à une API, peut faire la même chose (et même plus) que la fonctionnalité d’alerte québécoise, tout en restant dans l’environnement de la municipalité. Il en va de même pour l’autre application.

Ce qui est ridicule avec ces cas et me rappelle la folie des CMS il y a 15 ans est que de petites boîtes se présentent comme ayant inventé le bouton à quatre trous dans un contexte d’une « demande en vogue et à la mode », alors que des alternatives open source, gratuites ou pratiquement gratuites et sécuritaires, existent déjà et que des clients québécois les payent sans (semble-t-il) avoir fait de diligence raisonnable et sans avoir évaluer les risques pour les données de leurs citoyens. C’est pitoyable…

Ces entreprises et organisations qui ne savent pas qu‘on les aime (ou qu’on les haïs) sur les médias sociaux

Deux expériences récentes me font réaliser (encore une fois) pourquoi il est important pour les individus et les organisations d’être sur les médias sociaux. La première est reliée à mon récent voyage sur la Côte-Nord. Comme cela m’arrive parfois, j’aime bien mettre en valeur (gratuitement) sur les médias sociaux, des entreprises que j’apprécie. Je l’ai fait à plusieurs reprises durant mon dernier voyage. En montant vers havre St-Pierre, nous sommes arrêtées au casse-croûte Chez VérHo. J’ai partagé le statut ici-bas sur mon profil Facebook, ma page Facebook, sur Twitter et sur mon Instagram.

À titre informatif, mes différents comptes sociaux ont plus de 100 000 abonnés. Disons que c’est une très intéressante publicité gratuite. Pourtant, aucune des entreprises que j’ai mentionné durant mon voyage n’a commenté mes statuts, fait de « j’aime » ou repartagé ces statuts. Je n’écris pas ce billet parce que je m’attends à des remerciements. J’ai fait ces statuts parce que cela me faisait plaisir de les faire. Cependant, j’observe qu’aucune de ces entreprises ne monitore les contenus qu’on fait sur eux et ne démultiplient gratuitement, la bonne publicité qu’on leur fait. Disons que ce sont là de nombreuses opportunités marketing qui passent dans le beurre. À la décharge du propriétaire de Chez VérHo, à notre retour, nous sommes arrêtées une deuxième fois pour commander leur excellente poutine. Lorsque je suis allée pour jeter les déchets qui restaient après notre repas, il m’a accosté pour me remercier de vive voix de leur avoir fait une si belle pub. Il en avait été informé par de la famille qu’il a à Victoriaville (à 530 km de là). Lui-même n’avait pas vu la publicité gratuite, mais on lui disait que la photo de sa poutine était très avantageuse.

La deuxième expérience me vient d’une MRC. Le DG de celle-ci voulait que j’offre des ateliers médias sociaux aux maires de la région, afin qu’ils puissent être convenablement équipés pour participer et être sur les médias sociaux. Certains maires de la région se sont vus menacés et l’un d’eux a même démissionné comme suite à du harcèlement en ligne. Ce type de problème est même devenu endémique au Québec. En conséquence, les différents maires refusèrent donc d’être formés ou même d’être présents sur les médias sociaux. Le problème avec ça est que même si les maires ne sont pas sur les médias sociaux, les critiques, la virulence et les insultes y seront tout de même. Il est évident que de ne pas être conscient de ceux-ci protègera les élus des répercussions psychologiques possibles de toute cette haine. Par contre, bien des récriminations peuvent être amoindries et même gérées adéquatement si on sait qu’elles existent et qu’on est habilité à faire de la gestion de crise. Par ailleurs, il peut aussi être très instructif et permettre des améliorations notables pour la municipalité, si on est au courant des problèmes. Et finalement, les élus, sans y être nécessairement eux-mêmes, se devraient d’avoir des employés entraînés à monitorer ce qui se dit à propos des élus et de la municipalité. Il est évident qu’il est toujours plus aisé à répondre à une critique chez soi (et ainsi l’amoindrir) que de ne pas y répondre et qu’elle se démultiplie comme une trainée de poudre.

“La connaissance est en elle-même puissance.”
Francis Bacon

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Conférence gestion de crise médias sociaux pour Municipalité

Les enjeux et bénéfices d’un changement de pratique Web chez les municipalités

La mauvaise idée pour les entreprises, du code QR comme outil d’identification du certificat de vaccination.

Code QR

À ce que je comprends des annonces du gouvernement, le code QR et plus spécifiquement le code QR dynamique risquent de devenir l’outil de vérification des gens qui seraient vaccinés. Chez Radio-Canada :

(…)Qui plus est, a ajouté Christian Dubé, si elle devait être utilisée, la preuve vaccinale n’empêcherait personne, vacciné ou non, de recevoir des services jugés essentiels. Seuls les activités et les services non essentiels pourraient être assujettis à sa présentation.
(…) Cette preuve vaccinale devrait prendre la forme d’un code QR transmis aux personnes pleinement vaccinées par voie électronique.

Les services non essentiels seront ceux offerts par les entreprises privées. Soit les restaurants, bars, gymnases, théâtres en autres. Ils seront ceux qui devront scanner les codes QE afin de valider (ou pas) la vaccination de leurs clients. Or, le code QR est une technologie particulièrement pernicieuse, permettant de très nombreux types de cybercrimes. Ce seront donc les entreprises (et/ou leurs employés qui vérifieraient le code QR à partir de leurs téléphones personnels) qui seront les premières victimes de l’usage généralisé de cette technologie.

Sur le site Avantdecliquer on peut lire :

Le QR code, une cyber-menace en vogue.
Omniprésents dans nos vies, les utilisateurs n’ont pas pleinement conscience des risques liés à l’utilisation des QR codes. Les hackers exploitent cette technologie en partageant une URL malveillante vers un site de phishing. Ils peuvent également propager un malware ou encore collecter des données personnelles.
Ces agissements malveillants peuvent déclencher différentes actions :
• Ajouter une liste de contacts et s’en servir pour lancer des campagnes de phishing
• Lancer des appels téléphoniques vers des services payants
• Envoyer des SMS aux personnes avec une mauvaise réputation ou recherchées par les forces de l’ordre
• Écrire des e-mails
• Effectuer des paiements
• Accéder à vos comptes bancaires
• etc..
La difficulté est de ne pas savoir où mènera ce code avant de l’avoir scanné.

Scénario catastrophe

Supposons un filou qui veut pénétrer les systèmes informatiques du Centre Bell, ou acquérir les informations confidentielles de la jolie serveuse du resto du coin. Il n’aura qu’à présenter un code QR de son propre cru, le faire scanner par le préposé à l’accueil, être surpris que le code ne mène pas à la page des informations sur la vaccination Covid, être refusé d’entrer et simplement partir en marchant. Ce seront donc l’entreprise et/ou leurs employés, qui récolteront les retombées négatives potentielles d’une telle opération.

L’inutilité du code QR comme outil de validation

Supposons aussi qu’un personne particulièrement habile avec Photoshop, recrée le formulaire de validation de vaccination de la page de Santé Québec, dans les moindres détails, incluant la signature du ministre et une fausse page Chrome avec l’URL de destination, il suffira par la suite de créer son propre Code QR et de le diriger vers une page Web avec l’image Photoshopée, pour paraître avoir été vacciné alors que ce ne serait pas le cas.

Dans ces deux cas de figure, nous pouvons conclure que le code QR engendrera un très grand risque informatique pour les entreprises et leurs employés et qu’il pourrait être relativement facile de déjouer le système de vérification de qui est vacciné ou pas.

Vous pourriez aussi aimer:
Chez Forbes, I Don’t Scan QR Codes, And Neither Should You
Chez Radio-Canada Facile à décoder, le code QR des vaccinés inquiète des experts en cybersécurité
Chez Phonandroid QR Codes : attention, les hackers s’en servent pour pirater les smartphones

La censure des big tech, changement de paradigme et implications. Une discussion avec Me Vincent Gautrais

Il y a maintenant deux semaines, Twitter a décidé de bannir unilatéralement Trump de sa plate-forme. Facebook et plusieurs autres outils sociaux ont suivi. Les jours suivants, 70 000 comptes de sympathisants de Trumps ont aussi été bannis de Twitter. Ils se sont alors réfugiés sur la plate-forme Parler. Cette plate-forme était hébergée chez AWS, Amazon Web Services. Les applications étaient disponibles sur Androïd de Google et le AppStore d’Apple. Elle a rapidement aussi été déplatformée de toutes les plateformes.

Quelques jours après son coup d’éclat, Jack Dorsey, le CEO de Twitter reconnaissait que sa décision créait un dangereux précédent. Selon la CBC :

Dorsey acknowledged that shows of strength like the Trump ban could set dangerous precedents, even calling them a sign of “failure.” Although not in so many words, Dorsey suggested that Twitter needs to find ways to avoid having to make such decisions in the first place. Exactly how that would work isn’t clear, although it could range from earlier and more effective moderation to a fundamental restructuring of social networks.

Durant le même moment, le copain Mitch Joël sur son Facebook, y allait de sa propre perspective.

What is “free speech”?
I saw a tweet that stated:
“Don’t be fooled. Big Tech isn’t shutting down accounts due to ‘risk.’ They’re trying to control what you READ. What you THINK. What you BELIEVE. They’re after one thing: control. Because control means power. Don’t let them win.”
I’m not a politician.
I’m not a scholar of the law.
I’m not even American.
I’m someone that pays a lot of attention to technology, consumer behavior, and media.
I’m someone that used to publish print magazines, and was a music/culture journalist in the pre-historic ages (before the web).
A time and place where ALL content was controlled through a tight and small media filter (because creating and distributing content was hard and expensive).
The web brought forward one simple (but massive) change:
The ability for anyone to publish their thoughts in text, images, audio and video… instantly and for free for the world to see.
Content was no longer hard and expensive to create and distribute.
A scarcity to abundance model.
That doesn’t mean that all content gets the same distribution.
That doesn’t mean that all content gets the same attention.
It, simply, means that whether it’s a tweet, blog post, article, podcast, video on YouTube or even a newsletter – it has the capacity to reach a massive audience without any friction.
I’m going to re-write that tweet from above from my own perspective:
Don’t be fooled.
Big Tech doesn’t really care about your tweets.
They’re not trying to control what you READ.
The more people that you follow, and the more people that create content is how their business model and platform expands.
They want you to see much more content, but – unfortunately, most people will only follow those who create content that is aligned with their values and aspirations.
They don’t really care much about what you THINK, but they do care a lot about showing you more content that you tend to follow, like, share and comment on.
They are after control… but not control of what you read, think, or believe.
They’re after control of a marketplace.
To build, as
Scott Galloway
calls it: an “unregulated monopoly” (with a large and deep moat around it).
The power that they seek is not over what content flows through their platforms, but rather that ALL content flows through their platforms, and that you spend as much time as possible within their walls.
Big Tech doesn’t win by suspending, deleting or censoring any content.
Big Tech wins by having as many people as possible on the platform, creating, sharing, connecting and spending their time on it.
Your attention and content becomes the data that makes them powerful.
Follow the money.
In fact, blocking and moderation is the way that they lose.
It costs money, time, human capital, and energy to moderate and deal with content that offends, break laws, etc…
The more that people don’t connect, or when those connections get broken (users leave, people unfollow people), the worse the platform performs.
If people question the quality of the platform, they may leave the platform for other spaces.
And, ultimately, the most important thing to understand is this: they are the platform and not the content creators.
They don’t care about your content, they just want your data.
The content creators are us.
You and I.
No content creators… no platform.
No growth for “Big Tech.”
Should they regulate what content we create and put on their platform?
Clearly, they have to because we can’t do it for ourselves.
Should the government be a part of this regulation?
Absolutely.
I do not want a public or private business deciding what is/isn’t free speech (that’s the role of government and the law).
We know the rules.
We know what is right.
We know what is wrong.
Yet, here we are.
We’re slamming the platform that allows the content to flow, and not the content creators for publishing these thoughts in the first place.
Don’t be mistaken.
Don’t be confused.
The problem isn’t the platform.
The platform and their use of your personal data is their big issue.
The problem is you and I.
It’s our inability to accept a difference of belief.
It’s our inability to not be able to distinguish between what is right and wrong.
It’s our inability to see and hear those who feel like they have not been seen or heard.
It’s our inability to accept responsibility for what these platforms have become.
It’s our inability to know the difference between fake and true.
It’s our inability to see how locked into the cult or personality we’ve become.
That saddens me to no end.
I always thought that the Internet would enable a thousand flowers to blossom over the handful of old trees that truly controlled what media our society was offered and afforded.
That gift came true… and we seem to be blowing it.
Not all of us.
Just some of us.
Just enough of us.
But those “some of us” are awfully loud.
Don’t let them drown out what is truly there.
The platforms enable many voices, in many unique niches to have a voice, build a business and tell better/more interesting stories.
I’ve met some of the most fascinating people in the world because of these platform.
Some of my best friends and best business successes have happened because of these platforms.
Justice isn’t blaming Big Tech.
Justice is using these platforms to bring people together.
Justice is using these platforms to bring more voices out into the open.
Justice is using these platforms to make connections with people that you would never have had a chance to connect with.
Justice is using these platforms to learn, grow, share and improve.
Control may be power.
If it is, control who you follow.
Control what you read.
Control what you post.
Control what you comment on.
Control what you like.
Control what you share.
Control the messages from those seeking to do harm.
Control your knowledge of how media works.
Control your filters.
Control your experience.
Control your future

Je lui fis cette réponse :

Free speech always had it’s limits. Those limits were regulated by the laws. The web is transnational and the laws difficultly applies to a no-border environment. We solved the problem for the sea, Antartica and celestial bodies by developing transnational treaties to managed them. Big tech have become transnational states and have their own political agendas. One of them is to choose the best “friendly environment” to keep making money without having to regulate too much. Trump is not considered as a positive actor in their scheme of things. Furthermore, even tho they are transnational, they are set in the US. This is were they could more effectively be regulated or not. they also have political opinions. So I do not agree with you that they don’t care about the content. In general they don’t. But if some contents or users are perceived has a potential menace to them as a money making machines, they will surely become avid actors in the taking down of those threats and they did. My humble opinion

Je me posais alors la question, comment la décision unilatérale des entreprises de médias sociaux de censurer des dizaines de milliers d’usagers, risque d’avoir un impact sur leurs responsabilités civiles et criminelles?

Voici donc le passionnant échange que j’ai eu avec Me Vincent Gautrais. L’utopie juridique dont je discutais avec lui est ici : Une utopie qui permettrait un cadre juridique international du cyberespace

Comment créer rapidement des dizaines de milliers d’emplois tout en augmentant très sensiblement les revenus de l’État en période de pandémie?

Comment créer rapidement des dizaines de milliers d’emplois tout en augmentant très sensiblement les revenus de l’État en période de pandémie? Est une question que tout gouvernement devrait se poser. La réponse à cette question est pourtant toute simple. Pour se faire, il suffit de décider d’installer la fibre optique à la grandeur du Québec habité.

Comment cela créerait-il des emplois?

Il a déjà été calculé par Industrie Canada (dans mon billet Pourquoi la Caisse de dépôt et placement ne s’intéresse-t-elle pas à la fibre optique ?) que :

… pour un investissement de $1 milliard dans la fibre optique à Toronto, il prévoit la création de 19 000 emplois et des retombés de $3 milliards pour ce même PIB, mais sur une période de 2 ans.

Or, je disais aussi

… Michel Surprenant, le Maire de Chertsey, avait fait des études préliminaires pour couvrir de fibre optique notre localité. Pour les 300 km² de notre ville, il en couterait $8millions.

Si nous extrapolons ce calcul à la province, en considérant que celle-ci compte 110 000 km² de territoire habité (selon Chaire pour le développement de la recherche sur la culture d’expression française en Amérique du Nord (CEFAN)) avec une simple règle de trois, on obtient un beau $2,9 milliards pour couvrir le Québec habité en entier.

Donc, si 1 milliard d’investissements en fibre optique cré 19 000 emplois, on peut certainement avancer que 2’9 milliards en créeraient 55 100 emplois directs.

Dans mon autre billet Internet, un impact économique plus important que l’agriculture ou l’énergie, je citais une étude de McKinsey qui disait :

D’ailleurs internet contribue à 21% de la croissance du produit intérieur brut de 5 des pays qui sont les plus avancés avec internet. Pour un emploie perdu, internet en crée 2.6. 75% de l’impact d’internet se retrouve dans des industries traditionnelles et les petites et moyennes entreprises qui utilisent beaucoup le web exportent et croissant deux fois plus que les autres. Plusieurs autres chiffres éloquents militant pour que les décideurs d’affaires et gouvernementaux s’ouvrent les yeux et réalisent que le Web, est maintenant l’outil de croissance numéro un de la planète.

Comment cela nous rendrait-il collectivement plus riche?

Tout d’abord, il faut comprendre que si le gouvernement du Québec investit dans la fibre optique , dans le sens « d’investissement » plutôt que de « financement », il pourrait décider (comme la Norvège) d’installer via Hydro-Québec ou d’une autre nouvelle société de la couronne la fibre optique dans les poteaux du Québec et de laisser les TELCOs brancher les citoyens du poteau à la résidence et s’occuper du transport. Ainsi, il pourrait dicter les conditions de bande passante et de plafond des coûts du service et de toute évidence, engranger des revenus.

J’expliquais aussi dans cet autre billet titré judicieusement Comment la fibre optique nous rendrait collectivement plus riches, j’illustrais que :

Le site du gouvernement du Québec nous informe que le PIB du Québec est de $363 milliards. Or selon différentes études de l’impact de la très large bande sur les économies nationales et tel que je l’ai présenté dans mon billet Pourquoi la Caisse de dépôt et placement ne s’intéresse-t-elle pas à la fibre optique ?, à chaque augmentation de pénétration de la très large bande de 10 % d’un territoire, le PIB de ce même territoire augmente de 0.25 % à 1.38 %.
most studies conclude that broadband penetration has an impact on GDP growth. However, one observes that such a contribution appears to vary widely, from 0.25 to 1.38 per cent for every increase in 10 per cent of penetration
Si nous supposons que le Québec décide de couvrir de fibre optique notre territoire et qu’elle arrive à le couvrir à 90 %, nous avons donc une pénétration de 90 % du territoire (nous sommes actuellement à plus ou moins 2 % de la pénétration de la fibre optique au Canada), on parlerait donc d’une croissance de notre PIB variant de 9 X 0.25 % à 9 X 1.38%.
Question de mettre ces chiffres en perspective, avec le scénario le plus pessimiste, notre PIB aurait une croissance de $742 millions et avec le plus optimiste, de $4.09 milliards

Il me semble que ça ne prend pas la tête à Papineau pour comprendre que pour faire un plan de relance économique qui créerait de l’emploi tout en engrangeant des bénéfices pour l’état, la fibre optique semble être la solution parfaite…

Le projet d’identité numérique du gouvernement du Québec ou comment faire n’importe quoi

Heureusement que je suis assise. Sinon je tomberais à la renverse à lire les dépêches à propos du projet des « milliards de dollars » que le gouvernement du Québec commence à dépenser pour (selon TVA Nouvelles)

« L’ambitieux projet coûtera des milliards de dollars et n’a jamais été réalisé ailleurs dans le monde. ». (…)

« L’identité numérique sera basée sur les chaînes de blocs, une technologie « réputée inviolable », selon le ministre délégué à la Transformation numérique, Éric Caire. »(…)

« Pour les deux premières phases, ce sont essentiellement des cerveaux qui sont payés. Mais pour les deux suivantes, ça inclura de nouvelles infrastructures. Des structures hyper énergivores comme des serveurs et de nouveaux réseaux informatiques. Un chantier de plusieurs milliards de dollars, selon nos sources. »

Ou bien TVA Nouvelles écrit n’importe quoi, ou bien c’est Éric Caire qui dit n’importe quoi et qui a réussi à endormir le conseil des ministres et le premier ministre. Déjà à lire les trois paragraphes cités plus haut, on peut déjà réaliser le ridicule des informations présentées. Allons-y par étape.

« L’ambitieux projet n’a jamais été réalisé ailleurs dans le monde »

Il faut croire qu’Éric Caire n’a jamais lu le Plan numérique du Parti Québécois qui citait la technologie X-Road de l’Estonie (qui e débuté en 1998), qui fait exactement ce que prétend développer notre gouvernement, mais sans le boulet de la Chaîne de bloc. D’ailleurs le code source de X-Road est disponible sous licence MIT. L’Estonie et la Finlande utilisent depuis des années avec succès cette technologie et les Pays-Bas utilisent eu une adaptation nationale de X-Road. D’ailleurs, la carte X-Road world map nous permet de visualiser les pays tels que le Japon, l’inde, le Cambodge, Israël, l’Allemagne, l’Écosse et plusieurs autres qui sont en train de l’implanter chez eux. Donc, pour la première mondiale, on repassera.

« L’identité numérique sera basée sur les chaînes de blocs, une technologie « réputée inviolable »

Pour la réputation d’inviolabilité des chaînes de bloc, il suffit de lire l’article Top 5 Blockchain Security Issues in 2019, pour comprendre la fumisterie de cet énoncé.

Mais pour les deux suivantes, ça inclura de nouvelles infrastructures. Des structures hyper énergivores comme des serveurs et de nouveaux réseaux informatiques.

En effet, la technologie Blockchain est réputée très énergivore. Il est vrai que le Québec jouit de l’accès à l’électricité peu dispendieuse d’Hydro-Québec, mais cette énergie pourrait aussi servir à alimenter les petites serres afin d’atteindre la sécurité alimentaire quatre saisons. Les data-center qui seront nécessaires pour héberger les données seront très certainement utiles. Mais il semble que ce même gouvernement avait décidé de plutôt aller dans le cloud d’Amazon ou d’un autre joueur américain? Est-ce un revirement de vision? Si c’est le cas, c’est tant mieux.

Par ailleurs, les milliards qui seront injectés dans ce projet pourraient certainement l’être plutôt dans l’installation de fibre optique à la grandeur du Québec habité. Cela créerait immédiatement un cinquantaine de milliers d’emplois, augmenterait significativement notre PIB et serait très rentable pour le gouvernement et la société si au lieu de financer les TELCO avec cet argent, le gouvernement mandatait Hydro-Québec à installer la fibre et à recevoir des redevances des Telcos qui elles, s’occuperaient du transport sur le réseau national ainsi créé. Mais bon, il semble qui l’improvisation et les courbettes aux lobbys TI et des TELCOs soient plutôt la voie stratégique qui est préconisée. C’est profondément triste et à la fois particulièrement inquiétant…

Remue-méninge Les changements post-covid19, Tout Le Monde En Rêve #TLMER

En chinois, le signe crise signifie danger et opportunité. Vous êtes invités à assister à un remue-méninge avec des invités d’expérience et de vision qui vont se pencher sur les opportunités et réfléchir à comment notre société changera ou devrait changer après le Covid19…

Tous ne sont pas à la même place dans l’adaptation à la crise. Les 6 étapes d’adaptation sont:

  • Dénie = Ce n’est qu’une grippe
  • Colère = Je t’ai dit que ce n’était qu’une grippe va tu comprendre?
  • Négociation = Je vais prendre de la vitamine C et tout va être correct
  • Peur et l’anxiété = Tout va s’effondrer, je m’achète du papier de toilette
  • Dépression = Nous allons tous l’attraper
  • L’acceptation = C’est ça qui est ça, nous devons nous adapter.

Ce premier #TLEMR est donc une première discussion sur ce que pourrait ou devrait être l’après covid19. Vous pouvez aussi y participer en utilisant:

• le hashtag #TLMER pour partager vos idées sur les médias sociaux
• en faisant vous aussi d’autres remue-méninges par la suite

Mon groupe d’invités n’est pas représentatif de l’ensemble des enjeux que nous devrons analyser. Il n’a pas de jeunes, de fermiers, de manufacturiers, de pêcheurs ou d’une foule d’autres catégories qui nous sera indispensables à la réflexion. Vous m’excuserez aussi de tutoyer mes invités puisque ce sont des gens que je connais déjà depuis 20 ans pour certains, qu’ils sont particulièrement éclairés sur certains des enjeux que nous discuterons aujourd’hui, qu’ils ont une renommée qui permettra peut-être à de nombreuses autres personnes de s’intéresser à cette initiative et à lui donner une vie et une viralité qui sera nécessaire.

Je sais le et les sujets que chacun abordera, mais je n’ai aucune idée de ce qu’ils diront. Après le partage de leurs réflexions, nous aurons un court moment pour réagir collectivement à ce qui aura été dit. Puis à la fin, nous discuterons ensemble des constats qui auront été faits.

Nous ne sommes pas et vous n’êtes pas obligé d’être d’accord avec ce qui aura été dit. C’est ça l’idée d’un remue-méninge. Il est aussi possible qu’il y ait des fuck up techniques étant donné la médiocrité de nos réseaux internet en région. Je vous demande donc d’être clément dans vos jugements.

J’espère cependant que cette initiative inspirera au moins quelques personnes à entrevoir l’après covid19 avec espoir et lucidité et qui sait, qu’il aidera nos entrepreneurs, administration locale, régionale provinciale et même nationale à sortir des sentiers battus pour que collectivement on prenne le taureau par les cornes pour le meilleur de tous.

Mes invités sont, dans l’ordre de leur prise de parole

Jean-Luc Mongrain
Jacques Nantel
Randa Napky
Ianik Marcil
Christine St-Pierre
Gyslaine Desrosiers
Daniel Breton
Et
Maka kotto

Lors de ce remue-méninge, mes invités et moi-même vont discuter de l’après #covid19 et de ce que pourrait être l’impact et les changements sur le journalisme, l’éducation à distance, le marketing, les commerces, l’économie, le tourisme, la culture, la politique, la santé, l’environnement, les industries énergétiques, le numérique et bien d’autres choses encore… Un exercice de partage et de réflexion collective…

L’une des nombreuses critiques de cet entretien

Critique #TLMER

Le 5G ou la fibre optique?

Chaque fois que je parle de l’importance de doter le Québec habité de fibre optique, il y a toujours quelqu’un pour me dire que ça ne sert à rien puisque le 5G arrivera bientôt. Remettons donc les pendules à l’heure…

Tout d’abord est-il important de préciser que pour avoir le 5G, ça prend d’abord de la fibre optique qui alimentera la tour du 5G. Le 5G ne puise pas ses capacités « dans l’air ». Il n’y a pas de magie. Le 5G se connecte donc sur un « backbone », un réseau en quelque sorte, qui lui est en fibre optique. C’est l’émetteur qui est à la source et à la réception de la fibre, qui déterminera la capacité (ou la vitesse) de la fibre optique. Maintenant, il est impossible de brancher de la fibre optique sur un objet qui n’y serait pas connecté. Disons une voiture par exemple. C’est là que la 5G prend tout son intérêt. De brancher des objets non connectés à un réseau de très haute vitesse. Aussi, le 5G pourrait être utilisé pour brancher les ménages et les entreprises à partir d’un émetteur 5G (qui est branché sur la fibre optique) pour desservir les équipements fixes des clients, disons leur serveur, sans avoir à passer de la fibre chez chacun d’eux. Il est clair que ça pourrait générer certaines économies. Mais il faut aussi considéré que dans ce cas, le signal serait diminué par le nombre d’objets (fixe ou non) qui partageraient ce signal. En outre, la météo, l’épaisseur des murs et la composition de ceux-ci, de même que la topographie (y a-t-il une montagne entre l’émetteur et le récepteur) et la distance à parcourir, seraient tous des éléments qui auraient un impact direct sur la qualité et la bande passante du signal 5G.

Donc il faut cesser de dire des âneries telles que « nous n’avons pas besoin de fibre optique puisque nous aurons le 5G ». Comme vous le comprenez désormais ce n’est donc pas l’un OU l’autre, mais bien l’un ET l’autre et idéalement, un lien fibre optique jusqu’à la résidence, ou l’entreprise, est de loin supérieur à un approvisionnement strictement 5G. Par contre, pour les objets connectés qui s’avèrent aussi à être mobiles, le 5G sera indispensable…

Une utopie qui permettrait un cadre juridique international du cyberespace

En 2006 j’écrivais au père du Web Tim Berners-Lee . Voici une traduction libre de ce que je lui écrivait (plusieurs portions anglophone de ce texte ont été traduite librement afin d’en faciliter la lecture).

Cher Monsieur Berners-Lee

Je voudrais tout d’abord bous remercier chaudement pour l’immense cadeau que vous avez fait au monde et reconnaître votre apport à cette innovation majeure qui nous a donné le Web. Je reconnais aussi que c’est surtout l’Amérique qui a contribué à son expansion internationale. Nous nous devons donc d’être reconnaissants envers vous tous.

Je suis aussi une rêveuse et je sais que quelquefois, les rêves deviennent réalité si un nombre suffisant de gens partage ce même rêve. Afin de pallier au manque de régulation du web, de l’inefficacité des législations nationales du Web qui sont confrontés aux limites géographiques de leurs territoires et afin d’être capable de protéger la neutralité du Net, j’aimerais vous partager mon utopie. Comme vous le savez, le web n’a pas de frontières, il est partagé à la grandeur de la planète et est le réceptacle de ce que nous pourrions appeler la conscience et l’inconscience collective mondiale des nombreux individus qui forment un cerveau collectif que tous partagent. Le web est donc devenu une sorte de cerveau virtuel et de mémoire virtuelle que nous devrions protéger et rendre accessible à tous. Dans le monde physique, nous avons aussi un espace collectif commun. Je parle des océans, de l’antarctique, des corps célestes et de la lune. Toutes ces entités territoriales patrimoniales ont été assujetties è des traités transnationaux qui régulent le comportement des nations et des individus auxquels ils doivent se soumettre, dans l’esprit que nous devrions les partager au bénéfice de tous, avec certaines limites. Mon utopie est donc celle-ci. Pourquoi ne déclarons-nous pas le Web comme étant un territoire transnational devant être régulé par un traité international sous l’égide d’une entité de l’ONU? C’est certainement un acte de foi, mais souvent, c’est ce à quoi servent les rêves et les utopies…

Les bases juridiques et argumentaires de cette utopie sont développés ici, dans l’adaptation d’un texte de 2001 rédigé par moi-même et Nicolas Burger pour un cours de droit des Technologies de l’information lors de notre M.Sc. commerce électronique. Il m’apparaît plus pertinent que jamais, même s’il s’agit d’une utopie. Notez aussi que lorsqu’il est écrit « commerce électronique » ou « consommateurs », cela s’adapte tout à fait aux notions plus larges du Web et des internautes, dans leurs entièreté.

Nous vous proposons de découvrir la nécessité d’avoir des lois internationales en commerce électronique via une argumentation reposant sur des analyses politiques, économiques, sur des arguments de droits et de structure. Nous terminerons notre exposé en vous proposant une brève perspective historique et une tentative d’approche nouvelle pour analyser et recadrer ces enjeux.

Nous pouvons nous apercevoir que certaines caractéristiques particulières du commerce électronique, comme la facilité et la rapidité avec lesquelles les entreprises et les consommateurs peuvent communiquer sur les produits et services et engager des transactions transfrontières, peuvent créer des situations commerciales nouvelles peu connues des consommateurs et qui peuvent menacer leurs intérêts et qu’il est donc de plus en plus important que les consommateurs et les entreprises soient informés et conscients de leurs droits et obligations relatives au marché électronique :
En effet, les règles en matière de droit applicable et de compétence juridictionnelle dans le contexte de la protection du consommateur pourraient avoir des incidences sur un large éventail de questions relatives au commerce électronique, tout comme les règles en matière de droit applicable et de compétence juridictionnelle dans d’autres contextes pourraient avoir des incidences sur la protection du consommateur.

Malgré cela, la confiance des consommateurs dans le commerce électronique est renforcée par le développement constant de mécanismes efficaces et transparents de protection des consommateurs, qui limitent la présence en ligne de comportements commerciaux frauduleux, trompeurs ou déloyaux .

«Considérant que les réseaux mondiaux devraient être ouverts et accessibles à tous les consommateurs;Considérant que les gouvernements, les entreprises, les consommateurs et leurs représentants devraient consacrer une attention particulière à la mise en place de systèmes de recours transfrontières efficaces. »

Sans portée juridique obligatoire, les recommandations du Conseil de l’OCDE ont pour objectif d’inciter les États membres de l’Organisation de Coopération et de Développement Économique à adopter des législations pour instaurer la confiance des consommateurs dans le commerce électronique. L’homogénéité des législations permettra d’assurer le développement des transactions commerciales électroniques, raison pour laquelle le Conseil de l’OCDE recommande dans ce document un certain nombre de lignes directrices en matière de commerce électronique entre entreprises et consommateurs.

Ces lignes directrices ont pour objectifs d’établir une protection transparente et efficace du consommateur ainsi que la loyauté des pratiques en matière de commerce, de publicité et de marketing, de préciser le contenu des informations en ligne, de garantir la sécurité des paiements et la protection de la vie privée, de prévoir le règlement des litiges et de contribuer à l’éducation et à la sensibilisation des consommateurs en matière de commerce électronique.

– niveau de protection équivalent pour les consommateurs qui effectuent des transactions électroniques à celui d’une vente à distance traditionnelle ;
– information claire des consommateurs, dans une langue qu’ils comprennent, sur l’identité de l’entreprise menant des activités de commerce électronique et sur les biens et services offerts ;
– information complète concernant l’offre ;
– consentement clair et transparent du consommateur ;
– délai de réflexion appropriée offert aux consommateurs;
– information sur le droit applicable au contrat et le tribunal compétent ;
– mise en place de mécanismes d’authentification ;
– mise en place de mécanismes de réclamation et d’autodiscipline ;
– sensibilisation des consommateurs ;
– développement de la coopération internationale.

À la lumière de ces recommandations, il est impératif que la communauté internationale prenne conscience du fait, que ce nouveau médium puisse encore créer des opportunités d’affaires qui nécessitent un cadre juridique stable et dirigé vers le consommateur. Comme nous pouvons l’observer dans la thèse contraire, ces règles sont pour l’instant dirigées vers le B2B et les entreprises. Nous pensons que ce n’est pas suffisant, et que la base d’un système économique repose sur le consommateur. Car les entreprises peuvent continuer à produire, mais si personne n’achète leurs services ou leurs biens, virtuels ou réels, nous tombons dans une impasse. (ex. : surproduction actuelle aux États-Unis, par exemple dans la vente d’ordinateurs. )

C’est pourquoi nous pensons que des lois internationales serviraient à rassurer et protéger le consommateur, afin de l’inciter à consommer en plus grande liberté sur le NET. Dans un contexte de globalisation des échanges actuel, il ne faut pas oublier que l’individu ne doit pas disparaître au profit de multinationales qui tentent d’uniformiser un système de plus en plus complexe et divers. Lessig prévient contre l’absence des juristes dans le débat et écrit-il,le code constitue la Constitution d’Internet et celle-ci, laissée aux intérêts de l’argent et du gouvernement américain, a déjà amorcé un glissement dangereux menant à un espace d’identification, de surveillance et de contrôle sans précédent dans l’Histoire.

C’est pourquoi nous pensons que dans le cas du commerce électronique, des lois internationales doivent réguler un marché virtuel afin de le rendre plus accessible dans son architecture actuelle.

Comme nous en avons discuté précédemment l’OCDE dans ces recommandations termine en insistant sur la nécessité de la coopération internationale et insiste sur le besoin pour la communauté de développer un consensus sur la compétence juridictionnelle et de trouver des mécanismes facilitant les recours des consommateurs. Notre conclusion quant à ces lignes directrices est qu’ils sont un pas dans la bonne direction, mais qu’il représente pour l’instant les vœux pieux de l’OCDE vers l’établissement ultérieur d’un cadre légal international, aboutissement ultime du dialogue international valorisé.

Pour démontrer notre point de vue, nous utiliserons les arguments présentés par Me Gautrais lors d’une conférence du Barreau du Québec sur les relations juridiques dans le ¨ cyberespace ¨ .

Me Gautrais nous fait valoir la prépondérance du contrat papier sur le contrat cyberspatial en ce qui a trait à la preuve. Ces arguments reposent sur la nature intemporelle, immatérielle et internationale voire anationale des contrats cyberspatiaux. En effet, le contrat cyberspatial a une nature intemporelle. Prenons l’exemple d’un grossiste en alimentation de Montréal qui s’approvisionne directement chez un distributeur de pamplemousse du Maroc et qu’ils utilisent l’EDI pour leurs transactions courantes. Lors des commandes et livraisons subséquentes, le processus s’actualise sans intervention humaine. Plusieurs mois plus tard si un retard dans la livraison ou si un pépin quelconque arrive il sera bien difficile de déterminer le moment précis où ce sous-contrat a pris forme. La nature immatérielle du contrat se présente dans l’exemple que nous venons de faire lorsque le sous-contrat est activé par l’EDI. Il n’y a pas de contact entre les intervenants vivants, ce sous-contrat n’est pas matérialisé sur papier et avec une signature et pour illustrer plus encore ce phénomène, prenons l’exemple de l’auteur :

Voici un exemple encore plus incontestable d’immatérialité.

Avec la vente et le contrat de service (accès, publicité), on retrouve typiquement sur l’Internet, le contrat de licence. Conclu en cyberespace, ce dernier contrat est entièrement dématérialisé. Les prestations respectives de la livraison de l’objet de la licence et du paiement s’effectuent sans contact physique des cocontractants ni échange concret ou matériel.

Finalement Me Gautrais nous parle d’internationalité voire d’anationalité. Il nous mentionne que 80% des contrats cyberspatiaux ne renferment pas de clause compromissoire qui ancrerait ce contrat dans une réalité géographique, voire territoriale, ce qui a pour effet de rendre ces contrats anationaux. Nous vous soulignons enfin le caractère obligatoirement international d’un contrat entre deux contractants de juridiction différente et attirons votre attention sur le formalisme contractuel qui est préconisé par Me Gautrais afin d’encadrer les relations juridiques.
La conclusion logique de ce qui précède plaide amplement en faveur de l’utilité de lois internationales pour baliser le commerce électronique. Si le contrat papier a préséance sur le contrat cybernétique comment pouvons-nous envisager avec confiance le développement du commerce électronique? La pratique courante nous indique qu’en commerce Business to business le contrat papier et les contrats-cadres d’échange EDI sont utiliser et ne font pas obstacle au développement du commerce électronique. Nous croyons cependant que pour le Business to consumer si le contrat cybernétique n’est pas efficace et efficient cela ralentira le sain développement du commerce électronique. Une autre particularité qui découle des arguments légaux de Me Gautrais et l’aspect territorial du commerce électronique. En effet, si le contrat cybernétique est immatériel, intemporel et international, voire anational où se situe son territoire, son temps et sa nationalité ?

David R. Johnson et David Post nous aide à cerner cette question. Le droit s’exerce sur un territoire, sur une juridiction. La juridiction s’exerce à l’intérieur d’une frontière. Or, dans le cyberespace il n’y a plus de frontière et nous devrions même faire l’exercice de se demander s’il y avait une frontière dans le cyberespace où serait-elle? Serait-elle à la frontière d’un état lorsque les bits traversent un conducteur fibre optique, serait-elle dans le modem de réception, dans le CPU, sur l’écran? Les auteurs nous proposent une solution : (traduction libre)

Il faudrait traiter le cyber-espace comme un « espace » distinct dans lequel le droit devrait s’appliquer de manière naturelle puisque l’entrée dans ce monde de communications numériques archivées se fait habituellement via un écran et une frontière de mots de passe. Il y a donc un lieu associé au cyberespace puisque l’accès aux messages est de nature persistante et accessible à plusieurs personnes. Vous savez quand vous êtes dans le cyberespace. Personne ne traverse ses frontières accidentellement. Pour être encore plus précis, le cybespace n’est pas un lieu homogène; les groupes, les activités et les plate-formes ont tous leur propre règle d’accès, leurs caractéristiques et distinctions qui leur sont propres. Mais la ligne qui différencie une transaction numérique et celle du monde non virtuel est aussi distincte et peut-être même plus importante que celles qui défférenties les frontières entre les différents gouvernements territoriaux. Traverser la frontière du cyberespace est un acte signifiant qui permettrait l’application d’un « droit du cyberespace » effectif pour ceux qui traversent les frontières du non numérique au numérique.

Si nous optons pour la frontière du mot de passe, déjà nous avons territoire pour lequel légiférer. Cependant ce territoire ne fait pas partie du monde physique et la tentative de légiférer ce territoire non physique ou même de tenter de contrôler le flux d’information entre ce territoire non physique et le territoire physique peut s’avérer vaine et illusoire.

Puisque l’ingénierie du web est basée sur un lieu de logique binaire, et non sur la géographie, toute tentative d’associer le lieu d’un message à un lieu physique est aussi futile que d’associer un atome à un bit. Qui plus est, les assertions de quelques autorités territoriales que ce soit qu’une activité numérique se passe sur son territoire géographique pourraient être contestées par toute autre autorité territoriale.

Et:

Puisque le contrôle du flot des électrons au travers des frontières étatiques est si difficile, un état qui chercherait à restreindre l’accès de ses citoyens à certains contenus, devra se couper complètement l’accès au web, se déconnectant lui-même du marché mondial, ou encore tenter d’imposer sa volonté sur le numérique mondial. Ce serait l’équivalent de tenter d’arrêter la route de la soie à sa frontière (au détriment de ses consommateurs et marchants locaux) ou tenter de légiférer sur l’entièreté du monde connu (à l’époque de la route de la soie).

Nous devons donc considérer le Net comme un territoire à part entière défini à partir de règles spéciales hors du contexte physique dans lequel nous nous trouvons et d’où nos lois s’appliquent. Si nous recadrons le cyberespace dans un nouveau contexte légal (international) nous pourrons plus facilement contrôler et définir les paramètres d’analyse des particularités de frontières, de temps et de matière qui influeront sur les aspects de nature intemporelle, immatérielle et internationale voire anationale des contrats cyberspatiaux dont nous parlait Me Gautrais.

Mais quel pourrait bien être ce nouveau cadre pour le cyberespace et historiquement qu’avons-nous fait devant des problèmes semblables? Encore une fois Johnson et Post nous éclairent :

Peut-être que l’analogie valorisant le plus l’idée d’un cadre juridique spécifique au cyberespace est celle de « the Law merchant », un ensemble de règles développé lors de la croissance rapide des transactions transfrontalières du moyen-âge afin de résoudre les conflits entre marchants qui ne pouvaient se régler auprès de leurs noblesses locales étant donné que les règles féodales ne s’appliquaient que sur leurs propres territoires. Les seigneurs locaux n’arrivaient pas à réguler ces sphères d’activités qu’ils comprenaient à peine et qui s’exécutaient hors de leurs frontières. La résultante de ces confusions fut l’émergence d’un nouveau système légal le Lex-Mercatoria. Les personnes qui comprenaient le plus les enjeux du commerce furent ceux qui en firent la promotion, ce qui ne remplaça pas ou ne fit pas disparaître les autres lois déjà existantes. Nous pourrions donc prétendre que c’est le même genre de phénomène qui se développe présentement dans le cyberespace.

Un autre exemple de coopération international résultant de la nature conflictuelle des intérêts nationaux pour l’exploitation d’un territoire anational est le système de traités de l’Antarctique .

L’esprit du traité est de valoriser l’utilisation pacifique de l’Antartique et d’assurer la conservation de sa faune et de sa flore et de son environnement naturel pour le plus grand bien de l’humanité.

L’intérêt de l’humanité (sous-entendons l’intérêt scientifique) est ici le leitmotiv qui a poussé les pays membres de l’ONU à définir un nouveau cadre légal qui régirait les intérêts nationaux différents sur ce territoire anational qu’est l’Antarctique. Finalement, un autre traité international a aussi tenté d’encadrer légalement un territoire anational et d’en définir les paramètres de l’utilisation commerciale. Il s’agit de : Agreement Governing the Activities of States on the Moon and Other Celestial Bodies.

Selon Ward and Partners les principes de droit spatial se résume à :

1. L’espace, incluant les corps célestes, est une province de l’humanité et sera développé au bénéfice de l’humanité;
2. L’espace, incluant les corps célestes, est libre d’être exploré, utilisé et exploité par tous;
3. Les corps célestes ne peuvent appartenir à aucune nation
4. Les corps célestes ne devront être utilisés qu’ »à des fins pacifiques; et
5. Le droit international s’étend à l’espace et aux corps célestes.

Et le traité de la lune:

1. L’étendue du droit international couvre la lune et les autres corps célestes
2. La lune et les autres corps célestes ne sont pas sujets à l’appropriation nationale au à sa souveraineté
3. Les corps célestes doivent être utilisés exclusivement à des fins pacifiques
4. Il y a une liberté d’accès à la lune à des fins scientifiques; et
5. les activités perturbant l’environnement lunaire sont prohibées.

Nous pourrions remplacé dans ces énoncés de principe les mots espace, lune et corps céleste par cyberespace et nous obtiendrions ce qui nous apparaît être un nouveau cadre légal international pouvant s’harmoniser dans le contexte du commerce électronique.

Dans ce plaidoyer en faveur de l’utilité des lois internationales pour l’encadrement du commerce électronique, nous avons insisté sur le besoin des consommateurs d’être rassurés par des mécanismes de protection internationaux. Nous avons aussi démontré la tangente procoopération internationale de l’OCDE pour le développement d’un nouveau cadre légal international. Nous avons aussi démontré par l’argumentaire de Me Gautrais, l’inefficacité du contrat cybernétique dans le contexte international. Nous avons prouvé grâce à Johnson et Post les limites structurelles de droit sur la nouvelle frontière de l’internet et nous avons illustré comment historiquement l’humanité a innové pour créer un nouveau cadre lorsque la territorialité d’un nouvel espace ne correspond pas au critère juridictionnel jusqu’alors existant.

Épilogue philosophique

Le cyberespace n’a pas de frontière, l’ONU non plus; le cyberespace est une création virtuelle, l’ONU aussi. Le cyberespace en lui-même et certains sites font désormais partie du patrimoine mondial comme d’ailleurs plusieurs sites écologiques, historiques ou même marins. L’héritage intellectuel, technologique et multimédia de même que divers bienfaits économiques, sociaux, culturels (et j’en passe) que le cyberespace apporte et apportera, appartient à tous et nous devons participer à l’élaboration des moyens de le protéger. Il ne faudrait pas que nos gouvernements capitulent devant la montagne de travail qu’il reste à faire ou pire, devant les pressions américaines. Je valorise la création spécifique d’une agence Onusienne à cette fin, car l’ampleur de la tâche à accomplir et les liens déjà douteux de certaines agences existantes avec des acteurs majeurs du monde internet et du gouvernement américain le justifient amplement. J’anticipe le plaisir de recevoir et d’envoyer des messages Gmail sans avoir à me soucier de l’interception de ceux-ci par un état sur lequel les politiciens qui me représentent n’ont aucun pouvoir d’intervention législatif, exécutif ou judiciaire.

La tristesse de la privatisation du bien commun numérique

Le constat est triste et indiscutablement inquiétant. C’est certainement grâce à l’entreprise privée et aux services scientifiques et militaires si récemment, nous avons fêté le 50e anniversaire d’internet. Il est aussi important de souligner que ce sont les gouvernements (et en très grande partie le gouvernement américain) et les taxes des citoyens, qui ont massivement financé cette grande innovation.

Internet est très certainement, avec l’impression, la renaissance, le siècle des Lumières, la réfrigération, les vaccins, l’industrialisation puis les avions, l’une des très grandes avancées de l’humanité. Et comme pour toute innovation, elle peut autant servir le bien, que le mal.

Tout comme l’eau ou l’électricité, l’échange de « bits » est devenu malgré lui, un bien public. Et comme pour l’eau ou l’électricité, les gens qui la produisent ou la distribuent sont certainement en droit d’être convenablement rémunérés pour le travail qu’ils font. Généralement, pour ne pas dire presque exclusivement, ce sont d’ailleurs aussi les « services publics » qui gèrent et distribuent ces biens publics. Or, encore dans certains pays, ces services publics sont toujours entre les mains de conglomérats (les TELCOs) et une grande iniquité existe entre les usagers. Cette disparité est connue sous le vocable de fracture numérique.

La fracture numérique ne se limite pas à l’accès aux nouveaux moyens de communication. Il importe de distinguer trois niveaux d’inégalités vis-à-vis des nouvelles technologies :
• L’inégalité dans l’accès à un ordinateur, à Internet…
• L’inégalité dans l’usage d’outils.
• L’inégalité dans l’usage des informations issues de ces outils.

Mais il demeure que l’accès aux nouveaux moyens de communication demeure la première marche à gravir. Or, quoi qu’en dise le CRTC ou le gouvernement du Québec, la très haute vitesse et la fibre optique demeurent endémiques au Canada, tant dans les grandes villes que dans les campagnes. Ce que l’on nomme « la haute vitesse » est d’un flou à peine artistique puisque cette vitesse évolue dans le temps et qu’on aime se faire croire que la majorité des Canadiens en sont pourvus, ce qui est un mensonge éhonté. En outre, on présente souvent les réseaux de fibre optique comme étant dispendieux parce que le Canada est grand. C’est tout aussi faux. Le Canada habité n’est pas le Canada et il se compare avantageusement à la Norvège qui a déjà cette fibre optique gouvernementale, sur laquelle les TELCOs offrent le transport des données. En outre, on présente souvent ça comme une dépense alors que tout comme l’électricité, c’est plutôt une source de revenu, de développements économiques, sociétaux et scientifiques majeurs et que nous pourrions, comme l’a fait l’ONU, reconnaître qu’Internet est un droit fondamental.

Mais étant donné que nos parlementaires ne semblent pas comprendre l’importance capitale de ce « service public », nous continuerons de payer outre mesure, pour prendre du retard sur les meilleurs de la planète et nous risquons fortement de handicaper les chances de nos enfants de vivre convenablement de cette nouvelle économie plutôt que d’en être que des consommateurs…

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