Ego inc. : réponse aux détracteurs et le « Personal Branding » : ce n’est pas nouveau

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Dans Le Devoir de ce matin, l’article de Stéphane Baillargeon Ego inc. fait réagir. Le pote Dominic Arpin et moi-même y sommes cités. Du côté des réactions à cet article on peut lire des âneries intellectuelles comme :

(…)On parle maintenant de la mise en marché des journalistes. Foutaise. Exit l’indépendance journaliste. On ne peut plus parler d’indépendance journalistique quand l’objectif de cette démarche est d’abord de plaire à un public pour s’en mettre plein les poches. La vérité dérange, enrage parfois, révolte souvent mais elle est rarement plaisante. Si l’objectif de la personne qui fait du journalisme est de plaire au public alors il y a une énorme confusion des genres et je ne pense pas qu’on puisse parler encore parler d’indépendance journalistique. On peut parler de communicateur privé, d’entertainer, mais pas de journaliste. (…)

Voilà bien la mentalité qui se répand comme le mal de la peste. Chacun pour soi comme si nous habitions tous sur une île déserte, tout seul chacun sur notre île. Ça fait dur en crisse.

Quel discours ennuyant!Quelle récupération marchande de la parole! À se nourrir de l’obsession du paraître, on oublie le profond respect dû à la parole mesurée, informée, patiente! Allez bavards, marchands, bruiteurs, butineurs, répandez vos insignifiances sur la toile de Babel…

Bon, à ce que je sache, ces commentaires sont tous sur la toile et pas sur le papier. J’en conclu donc que c’est « pour plaire au public », que ces commentaires « Ça fait dur en crisse » et que ces commentaires sont faits par « des bavards, marchands, bruiteurs, butineurs, (…) qui répandent leur insignifiance sur la toile de Babel…»

Plus sérieusement, le « Personal Branding » dont il est question ici, n’est pas nouveau. Des noms comme Marx, Freud, Picasso, Chanel, Christ, De Beauvoir, Sartre, Hegel et.al ça vous dit quelque chose ? Ce ne sont pourtant pas des journalistes à ce que je sache et le Web n’existait pas à leur époque. Le « Personal Branding » est donc vieux comme les hommes. J’avais d’ailleurs dit ça au journaliste. Je lui ai aussi parlé de Foglia qui n’est pas sur les médias sociaux (ça il en a parlé). Pour répondre à ces connards qui réagissent à tort et à travers, je me cite de nouveau (de l’article de monsieur Baillargeon):

«Le Personal Branding, c’est du mixmarketing avec les mêmes variables : le produit, son prix, sa distribution, sa promotion, explique la spécialiste du marketing Internet Michelle Blanc. Le branding, c’est de la célébrité sous un autre nom. Cette renommée est fournie par les autres et, les nouveaux médias, permettent de multiplier les chances d’entrer en contact.»

Mme Blanc, elle-même une «marque» réputée dans son milieu spécialisé, confie avoir reçu en consultation «plusieurs journalistes québécois» intéressés par leur propre mise en marché. «Des éditorialistes en particulier, parce qu’ils sont inquiets, dit la consultante, en gardant les noms de ses célèbres clients pour elle. Je leur ai dit que l’éditorial et la chronique font encore vendre. Je leur ai dit que s’ils avaient une opinion forte, ils n’avaient pas à craindre. Le fait journalistique en lui-même n’a plus de valeur. L’enquête en a, le reportage de proximité aussi, et puis la réflexion, la valeur ajoutée, quoi.»

Patrick Lagacé ou Richard Martineau l’ont compris: ils surchroniquent, ils omnicommentent, ils überbloguent, sur tout et n’importe quoi. «Ces gens ont optimisé leur marque», dit encore Mme Blanc. Elle explique alors que si un journaliste a besoin de deux sources pour confirmer une nouvelle, son milieu en réclame trois pour authentifier une réputation. «Il faut trois sources en marketing pour confirmer une décision d’achat dans l’esprit du consommateur. Dans ce cas, un journaliste de marque devra passer dans le journal, avoir sa chronique à la télé et son blogue, par exemple.»

Bref, «la crédibilité est fournie par les autres». Un média en donne et un réseau en donne beaucoup. Foglia était une vedette et un nom bien avant l’invention du Web. Pierre Bruneau et Bernard Derome aussi. Seulement, les nouvelles technologies multiplient les occasions de se vendre, comme le savon à barbe.

Maintenant, à la critique que je (ou qu’un journaliste blogueur) n’écris que ce qui plait au public pour m’en mettre plein les poches, ce ne sont très probablement pas des gens qui me lisent ou qui lisent Lagacé, Arpin, Blanchette ou plusieurs autres qui ont su harnacher le pouvoir de la communication bidirectionnelle…

En lecture complémentaire, je vous invite à relire mon billet : Journaliste vs blogueurs

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Commentaires

  1. Denis Paul van Chestein

    Non, mais je rêve ou quoi, là ? Pincez-moi quelqu’un. L’objectif du Personal Branding, c’est de bien faire connaître sa marque, qui en l’occurence est vous-même. S’afficher partout, sur toutes les plates-formes, sur tous les réseaux afin de favoriser la distribution / pénétration de ses contenus, n’entache en rien la qualité desdits contenus et de la démarche journalistique qui les sous-tend. Cela n’a absolument rien à voir avec le fait de se vendre ou de se prostituer de quelque manière que ce soit. Est-ce que les journalistes de la presse écrite se vendent lorsqu’ils vont à la télé ou à la radio ? Non mais…

  2. Tweets that mention Ego inc. réponse aux détracteurs et le « personal branding » ce n’est pas nouveau • Michelle Blanc, M.Sc. commerce électronique. Marketing Internet, consultante, conférencière et auteure -- Topsy.com

    […] This post was mentioned on Twitter by Michelle Blanc, Denis P van Chestein. Denis P van Chestein said: RT @MichelleBlanc Mon billet: Ego inc. réponse aux détracteurs et le « personal branding » ce n’est pas nouveau http://bit.ly/4aT5Q7 […]

  3. Olivier

    C’est presque un manque d’éthique de faire du personal branding je trouve. Si le produit est bon, le branding va se faire automatiquement par le public, qui retiendra d’ailleurs plus le nom de l’article que le nom personnel de l’auteur (ex: watergate).

  4. J. P.

    Par les temps qui courent dans les journaux, c’est un peu normal, que la Toile fait peur.
    L’éToile n’est plus que dans l’imprimé. 😉

  5. Alex

    «Il faut trois sources en marketing pour confirmer une décision d’achat dans l’esprit du consommateur. Dans ce cas, un journaliste de marque devra passer dans le journal, avoir sa chronique à la télé et son blogue, par exemple.»

    Un jour, il faudra m’expliquer comment on peut arriver à faire une telle extrapolation sans penser qu’on arnaque le lecteur… Le pont entre ces deux affirmations est tellement long et large qu’il ne pourrait joindre la Terre à la Lune. Franchement! Il y a une énorme différence entre une décision d’achat pour un produit de consommation et la «marque personnelle» («personal branding») qu’un journaliste acquiert via les différents canaux de distribution qu’il utilisera.

    Le lien entre les différents moyens utilisés et le niveau de crédibilité est complètement farfelu à mon avis. Tu as des statistiques et des extraits d’études en anglais pour confirmer ça? D’habitude, tu es bonne pour les réutiliser et t’aider à construire ton argumentaire. Non mais, ça sort d’où ça? Un journaliste peut utiliser un seul outil et devenir très crédible/connu/lu. La diversité des outils n’a rien à voir avec sa fiabilité. Ça peut l’aider à se faire voir et améliorer son rayonnement —soit je l’accorde volontiers— mais ça ne change rien à sa crédibilité.

    Je précise le point car le parallèle entre une décision d’achat confirmée par divers sources et la «marque personnelle» ou crédibilité d’un journaliste est plus que douteux. Si je te suis, tu dis qu’un journaliste qui utilise 3 canaux différents se fera mieux «acheter» par un lecteur. Ce n’est pas la diversité de ses moyens de communication qui me fera lire un journaliste, mais plutôt sa pertinence! Les textes de Richard Martineau, je les trouve toujours ridicules, peu importe le nombre de canaux qu’il utilise. À la télé, il me semble aussi pertinent que Raël le serait en tant que Premier Ministre…

    Ta comparaison est vraiment boiteuse. Ça ne tient pas la route du tout. Un journaliste «autonome» peut très bien vivre sa vie sans avoir à aller faire des chroniques à la télé. Tu as été cité hors-contexte ou quoi? Il manque un bout à ton affirmation? Pour l’instant, je mets celle-ci dans la colonne des «n’importe-quoi-émis-par-MichelleBlanc!» Ça sera pas la première ni la dernière fois non? Mouahhhhhh!

  6. Olivier Zara

    @Denis Paul van Chestein

    Je partage ton avis. Le Personal Branding n’est pas une démarche de marchandisation de l’être humain. C’est même exactement l’inverse. Associer un individu et une marque fait partie du langage courant. Exemples :

    – Il faut se démarquer
    – Avoir une bonne image de marque
    – Imprimer sa marque dans un projet
    – Marquez les esprits
    – C’est sa marque de fabrique

    Donc comme le dit Michelle Blanc : rien de nouveau !

  7. Kevin Zaak

    Effectivement le “personnal branding” n’a rien de nouveau. Ça ne le rend pas plus reluisant.

    L’article se Stéphane Baillargeon soulève des questions très pertinentes sur la précarisation du travail et sur la marchandisation de l’information. Le marketing occupe de plus en plus de place dans nos sociétés. On ne parle plus de culture, mais d’industrie culturelle. Le journaliste ne doit plus faire un travail d’équipe et fouiller la vérité, il doit se vendre et se démarquer…Tous ces éléments sont ici complètement évacuées. (pour une question d’ego ?)

    Décevant. En fait, la “réponse” semble donner raison au détracteur.

  8. Olivier Zara

    Le Personal Branding est une démarche de gestion de carrière qui prend appui sur la métaphore de la marque (comme un point de repère). Rien de plus qu’une démarche de gestion de carrière parmi tant d’autres mais qui a l’avantage de proposer une partie connaissance de soi, développement personnel.

    Les journalistes gèrent leur carrière comme tout le monde mais on peut aussi accepter ceux qui ne la gère pas… c’est leur droit !

  9. Le blogue de Marie-Claude Ducas » Blog Archive » Ai-je un bon branding ?

    […] nouveaux médias permettent de multiplier les chances d’entrer en contact. » Dans un billet subséquent sur son blogue, où elle répond aux détracteurs de ce point de vue, elle va même plus loin, citant entre autres […]

  10. Luc Lefebvre

    Le personal branding est un concept vieux comme le monde.

    Le personal branding n’est qu’une nouvelle expression pour expliquer des techniques et des approches utilisées depuis longtemps par certains individus, dans tous les domaines. La seule différence est qu’auparavant, ce processus de gestion de l’image n’était pas méthodique ou bien structuré. Maintenant, avec le marketing, on a développer des techniques et des approches pour appliquer cela à sa carrière également.

    Tout le genre de personnes font du personal branding, que ca soit les CEO, les comptables, les directeurs, les secrétaires, les gardiennes d’enfants, whatever.

    Truc intéressant: l’approche “personal branding” est bien différent en Amérique et en Europe.

    De mon point de vue, également, le personal branding n’est qu’une partie d’une plus grande approche que l’on appelle “l’identité numérique”.

    M’enfin, c’est un autre débat.

    Tout ça pour dire que le personal branding et le journalisme n’ont rien de conflictuel. C’est vieux comme le monde et probablement 95% des usagers de ce site font du personal branding sans le savoir.

  11. Andrés

    Question: Si Freud avait fait du “Personal Branding”; il serait allé un peu plus mollo sur sa consommation de cocaïne et aurait sans doute accepté les 100,000$ que le producteur Samuel Goldwyn lui a proposé en 1925 pour jouer dans Anthony et Cleopatra (http://bit.ly/qXswH)!!!

    «La transformation de l’individu en marque … s’avère très profitable pour les entreprises» D’après le prof. Sid Ahmed Soussi, le PB renforce l’aliénation du travailleur perpétrée par le capital; Marx l’aurait vu venir lui aussi!

    Hegel? Un philosophe allemand c’est loin d’être aussi vendable qu’une voiture allemande! Picasso; c’est son génie et non pas ces démarches de carrière qui l’ont rendu célèbre!

    De Beauvoir, Sartre, (Le) Christ, Channel des maitres précurseurs du PB! Je te l’accorde.

  12. fbrahimi

    Belle intervention Michelle. Effectivement, rien de nouveau! Si ce n’est l’ajout d’un nouveau support, le Web avec ses usages et ses pratiques. Le Personal Branding est pratiqué tant par les journalistes que les artistes depuis toujours. Suis ravie qu’Olivier Zara l’avoue à présent après avoir longtemps contredit mes propos en affirmant que c’était un nouveau concept,une nouvelle méthode.
    Après les “c’est ci ou cela” et “ce n’est pas ci ou cela”: là il y a à mon sens du débordement. Le Personal Branding est un processus(cheminement)et non une procédure (règle applicable à tous) qui est centré sur la personne, donc à sa personnalité, ses valeurs, ses qualités… pour lui permettre d’exsuder ses talents au service de son projet professionnel,son projet de vie. Pas seulement la carrière (concept dépassé et limitant dans un environnement mouvant et non linéaire)mais pour le développement d’une capacité essentielle aujourd’hui: la capacité à rebondir cad à agir en situation (cf les nouvelles compétences professionnelles by Guy Le Boterf). Capacité au centre des grands débats RH depuis une petite dizaine d’années.
    Aussi, la résultante de ce travail et les stratégies de promotion et de visibilité sont forcément personnifiées et individuelles. Il n’y a pas de stratégie modèle type voire “idéal”. De manière systémique : une personne est unique, son environnement, son projet, ses contraintes et ses moyens d’action sont également uniques. Comme le précise Luc Lefebvre, rien que le fait d’être imprégné par un environnement culturel induit une différence. La culture est partout: elle vient de notre héritage familiale, de nos expériences de vie et de notre raison d’être (mission).
    Il est effectivement essentiel que la démarche commence par une découverte de soi pour que le processus puisse être durable et dynamique. Une clef qui permet de mettre de la cohérence notamment par la suite entre son identité physique et son identité virtuelle. La virtualité !
    La recherche de l’Unicité n’introduit pas homogénéité et ni l’appréciation collective systématique. Bien au contraire plus on cultive sa différence plus on se démarque et plus on est sujet à controverse. Le risque est là et c’est pour cela qu’il est important de rattacher cette démarche à un objectif de résultat viable, de vérité (être soi et pas celui que l’on croit être ou que les autres veulent). D’où une méthode de travail pour valider étape par étape le processus de travail (avancement, régulation, réajustement. Alex, nous avons donc deux choses: la méthode et le processus pour être au plus près de la personne. La méthode seule entraîne homogénéité; le processus lui le risque de la non viabilité. C’est la combinaison des deux qui donne de la puissance. Et comme le dit si justement Olivier “Si le produit est bon, le branding va se faire automatiquement par le public”. Là nous voyons le résultat du processus à long terme.

  13. Jean-Sébastien Marsan

    Mme Blanc, vous confondez branding et icônes culturelles.

    Karl Marx, par exemple, n’a jamais fait de “personnal branding”. De son vivant, il ne s’est jamais mis en marché, il n’a jamais connu de succès. Il est mort dans la misère en 1883 avant d’avoir achevé le livre qui allait le rendre célèbre, “Le Capital”, et il faudra plus de 30 ans avant que ses idées débouchent sur une véritable révolution, en Russie.

    Aujourd’hui, la grosse barbe poivre et sel de Karl Marx est une icône, tout comme le fameux portrait de Che Guevara par Korda (que l’on voit sur une foule de produits de consommation). Ce sont des images qui font partie de notre culture.

    Che Guevara (comme Marx, Freud, Sartre et d’autres que vous nommez dans votre billet) ne sont pas des marques, ce sont des icônes. Il y a même eu un procès à ce sujet à propos de l’utilisation commerciale du portrait de Che Guevara: http://www.pmdm.fr/wp/2008/12/06/le-portrait-de-che-guevara-est-une-icone-pas-une-marque/

  14. Andrés

    Comme le souligne Jean-Sébatien, la portée médiatique d’une oeuvre (A) ne doit pas être confondue avec la médiatisation ou surmédiatisation d’une personnalité publique (B). Plusieurs voix mènent à la notoriété (C) mais les avenues pour y parvenir sont multiples: A = C, B = C, A + B = C

    Le phénomene du personnal branding fausse souvent cette compréhension et il serait faux et dangereux de prétendre que A = B…

    La notoriété d’une Paris Hilton, d’un Donal Trump, d’un Ashton Kutcher et plus le résultat d’une surmédiatisation de leur personne que du rayonnement de leur oeuvres (sans envergure)…

  15. Dominique Rabeuf

    Il vaudrait mieux oublier Marx, Freud, Sartre, Che Guevara et aussi Trotsky, Staline, Lénine, Fidel Castro. Ce n’est pas que je soit plus particulièrement hostile envers certains humanistes démocrates, en réalité je ne supporte pas non plus les républicains de toutes tendances et plus particulièrement les républicain français qui ont su donner et continuent à donner l’exemple. Passons sur le passé qui s’efface, préoccupons nous de nos politiques qui veulent réglementer nos accès à Internet et des nouveaux promoteurs d’impôts vertueux à la mode de mondialisation du dioxyde de carbone.
    En clair qui fait la promotion de marque des idéologies écologistes ?