La semaine dernière, plusieurs articles titraient la mort de Facebook d’ici 2017, selon une étude basée sur un modèle épidémiologique de deux étudiants de Princeton. Très rapidement, cette étude fut mise en boîte comme dans cet article de Slate.fr :
Pour obtenir les statistiques d’utilisation de Facebook, les deux chercheurs ont utilisé Google Trends, en confrontant leur résultat avec MySpace. MySpace, soit le réseau qui a connu le cycle complet: ascension, avec son lancement en 2003; pic, en 2005, avec le rachat par NewsCorp pour 580 millions de dollars; et déclin, avec en 2011 un rachat à hauteur de 35 millions de dollars.
Premier problème: lorsque MySpace était au top, il n’y avait pas encore de smartphone, et tout passait par Google. Aujourd’hui, la moitié des utilisateurs se connectent sur Facebook avec leur appareil mobile, depuis l’application dédiée. Autrement dit, la recherche par Google Trends n’est pas représentative des modes d’utilisation de Facebook.
Je répondis à ce deuxième article :
n’empêche que mon pif, et l’histoire des destinations sociales telles que Friendster et MySpace précédente, m’enseigne que Facebook ne sera probablement pas éternel
D’ailleurs, si vous visitez ma catégorie Facebook, vous verrez plusieurs autres arguments surs pourquoi, je suis toujours et encore sceptique sur l’efficacité de Facebook dans un contexte organisationnel. Voici aussi un long commentaire d’ Emmanuel Scotto (avec permission de publier) sur mon mur Facebook que je trouve particulièrement éclairant et qui mets en lumière des faits avec lesquels je suis tout à fait d’accord. (Ironiquement, même si je pense que Facebook va tomber, entretemps il y a tout de même des conversations intéressantes 🙂 )
Je ne suis vraiment pas sur que Facebook tienne un 10 ans de plus (en réalité, pour le grand public d’une manière extensive, un peu plus de 7).
Sans aller jusqu’à appliquer des modèles de propagation virale, plusieurs éléments et faits montrent que se n’est pas aussi solide qu’on veut bien le dire, et qu’un axiome « too big to fail » ne fonctionne pas:
– En 10 ans, pas une seule « diversification » hors du domaine réseau social >> pub. On l’a vu avec les derniers achats ou tentative d’achat (Snapchat) à prix d’or: FB est en mode défensif en achetant ses « concurrents » ou menaces potentielles dès leurs premières performances, non pas pour les faire évoluer, mais pour « acheter » et intégrer leur modèle d’affaires. Bref, tuer la concurrence dans l’oeuf. Ce n’est jamais un bon signe… D’ailleurs, quel est le modèle d’affaire de facebook? Masse d’utilisateurs >> Métadonnées >> Publicité et récemment des services payants aux particuliers. On pourrait objecter que FB intéresse les entreprises pour leur communication et que ça s’intègre dans le modèle d’affaires. Certes. Sauf que ce sont des entreprises, pas des philanthropes. Aujourd’hui FB est essentiel dans la stratégie de communication en ligne d’une entreprise. Mais demain? Si je me rappelle bien, il y a de ça 6 ou 7 ans, Second Life devait être, de l’avis de tous entreprises comprises (et moi y compris), l’avenir de la communication d’entreprise…. Si demain je propose un outil « social » plus avantageux pour les entreprises, elles délaisseront Facebook, comme elles ont auparavant délaissé Second Life, MySpace.– FB ne tient donc que par la masse critique de ses utilisateurs, qui produit des métadonnées exploitables en pub. Si demain matin, pour une raison ou pour une autre (révélation sur l’exploitation des données utilisateurs, arrivée d’un nouveau joueur, etc) cette masse critique baisse de seulement quelques pourcents, c’est tout l’édifice qui se casse la gueule.
– Le « réseau social » de masse est un phénomène relativement neuf, mais paradoxalement aussi assez ancien (mIRC est un réseau social et on l’utilisait au milieu des années 90). On peut donc avoir un minimum de recul. 2 choses me frappent là-dedans: 1/Nous n’avons pas à ce jour de référence d’un réseau social qui se soit pérennisé sur le long terme, aussi bien financièrement que fonctionnellement. Leur « trajectoire de vie » est assez similaire: un début en pente ascendante douce, un décollage fulgurant avec une montée très rapide, une progression lente voire un effet de plateau, une chute brutale et rapide. Facebook semble être dans la phase « plateau ». 2/ Le « réseau social » est un « produit » fortement typé. Il peut être spécialisé (Linkedin par exemple) et dans ce cas sa population est fidèle et stable, ou bien « grand public » comme facebook, mais soumis aux effets de mode de sa population, pas de la plus grande fidélité. On l’a vu avec des « produits » comme MySpace ou Flickr: si un « produit » dans le même créneau est considéré comme « plus fun », « mieux fait », « plus utile »… il sera adopté d’autant plus rapidement que c’est le réseau social lui même qui entretient la fuite (exemple de MySpace). C’est un fait financier: jusqu’à présent, les réseaux sociaux les plus solides sont ceux spécialisés.
– On est aujourd’hui clairement dans un phénomène de bulle internet, de mon point de vue peut-être beaucoup plus potentiellement violent que celle du début 2000. J’aimerais qu’on m’explique sur quoi on se base de manière rationnelle pour avoir une action FB à plus de 50$ sans qu’il n’y ait d’effet spéculatif.
– La croissance de FB parait limitée par les équivalents « étatisés » russes (VK, plus d’utilisateurs en Europe que FB) et surtout chinois (Weibo, Renren, etc): FB ne passera pas le « Great Firewall ». C’est pourtant la que tout se joue pour sa croissance.
Désolé pour la longueur, on pourrait faire plus
Et d’ailleurs, un truc qui me tient à coeur et qui à mon avis ne serait pas bête du tout : introduire des cours d’épistémologie du web (à HEC ?). On a aujourd’hui suffisamment de matière et de recul pour en avoir la possibilité et je pense que l’étude « post mortem » de certains cas (je pense à Altavista, où comment un « produit » est passé d’une superpuissance du web à rien du tout sur un coup de dé -le bouton « j’ai de la chance » de Google) peuvent éclairer pas mal de choses. En tout cas un peu plus voire un peu mieux que l’application d’un modèle mathématique de propagation épidémiologique.
Mais bon, c’est une autre histoire
J’ai du mal avec les comparaisons entre FB et les anciens réseaux sociaux type MySpace ou Second Life, tout simplement parce que la maturité des utilisateurs en matière d’internet et de réseaux sociaux n’était pas la même !
Si au plus fort de son succès myspace comptait plus de 200 millions d’abonnés en 2008 on est loin du milliard de Facebook qui est aujourd’hui utilisé par tout le monde, son logo est partout, des campagnes TV se terminent sur « suivez-nous sur FB », on utilise son compte pour FB pour créer des comptes sur d’autres réseaux, pour se connecter à des sites marchands, c’est un vrai écosystème (ce que MySpace et Second Life n’ont pas réussi d’ailleurs). C’est aussi devenu un sujet de conversation quotidien, et le profil d’utilisateurs n’est plus composé d’early adopters, comme c’était plus le cas chez MySpace, mais du bon vieil internaute mainstream, celui qui met beaucoup de temps à adopter un comportement et encore plus à en changer.
Donc pour moi on ne peut pas se baser sur cette comparaison pour annoncer la mort de FB. Après je ne dis pas que Facebook est éternel , mais il est extrêmement difficile et douteux de prédire une fin dans 7 ou 10 ans en se basant là-dessus. Personne n’est capable de prédire ce qu’il va se passer dans 6 mois, alors dans 10 ans…!
Et sur tous les articles prédisant la mort de FB, pas un seul ne s’est dit que peut-être, il faudrait aussi peut-être composer sur la capacité d’innovation de MZ et ses équipes, tout peut encore arriver 😉
Bien d’accord avec toi Sébastien. Je doute que dans notre cas, le passé soit garant de l’avenir. Je penses que Facebook peut faillir, mais qu’il n’est pas condamné, comme plusieurs s’amusent a dire.
De plus, argumenter que Facebook achète la compétition parce qu’il en a peur est absurde. Toutes les entreprises font des acquisitions stratégiques, c’est normal!
Tout d’abord merci pour ce partage. Je me permet de partager l’excellent article d’affordance.info à ce sujet (http://affordance.typepad.com//mon_weblog/2014/01/le-monde-apres-facebook-et-google.html).
Pourtant, Perry Marshall et autres gourous du marketing web insistent aujourd’hui sur le fait que Facebook est devenu l’opportunité extraordinaire qu’était Google Adwords à ses débuts en 2003. Ceci, jumelé au fait que le titre de Facebook à la bourse va trrrès bien, me dit que Facebook n’aura pas le même sort que MySpace.
Pour ceux qui ne pense pas que Facebook puisse chuter, n’oubliez pas que l’homme est un être qui se lasse vite. Oui, actuellement les internautes y sont encore présent, mais si Facebook ne réussi pas a cepter l’attention de ses visiteurs, ces derniers commencerons a se tourner vers autre chose.
Snapchat en es un exemple en attirant bon nombre de jeunes. Pour le moment Facebook, comme il a été dit, Facebook résiste en achetant la compétition mais est-que ce sera toujours le cas?
Finalement, n’oubliez pas que la chute de MySpace et Second Life s’est fait en 1 jour. Elle a commencé timidement pour finir par s’accélérer a la vitesse grand v.
Je pense simpliste un peu de dire que Facebook « subsiste en rachetant la compétition ». C’est loin d’être le cas. Zuckerberg voit plus loin que le bout de son nez. Ils fragmenent leurs services & se diversifient. Instagram, What’s App et maintenant Oculus Rift… Loin d’être des compétiteurs direct si tu veux mon avis.