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Ste-Adèle se fait censeur

Les blogueurs et les internautes en général ont le haut-le-cœur de la manière dont les organisations censurent la liberté d’expression en général et l’expression bloguesque de leurs citoyens en particulier. Nous canadiens, croyons vivre dans un état libre et permettant une certaine liberté d’expression. Cette liberté d’expression est toutefois sujette au libelle diffamatoire et, comme le craignait Patrick Lagacé (chez Dumais)dans son inquiétude à bloguer sous son propre nom, le blogueur moyen, ne dispose pas de l’assurance de son employeur, pour couvrir les frais juridiques associés à des poursuites légitimes, loufoques, préventives ou carrément inappropriées.

Sur mon blogue, j’égratigne parfois des gens, des personnages publics : si je fais ça sur Blogger, je n’ai aucune protection juridique de mon employeur. Si je le fais sur Canoë, ou sur Cyberpresse, je suis protégé en cas de poursuites. Ce n’est pas rien. C’est, en fait énorme, comme différence dans le résultat final. Ça donne un blogue plus mordant, plus candide, moins « sur les breaks ».

Comme je le disais aussi à Lagacé dans les commentaires chez Dumais, le versant opposé à ses mises en demeure ou poursuites contre l’expression peut-être diffamatoire d’un blogue, est le mouvement de support international d’appuis, qui peut s’ensuivre.

(…)Concernant les possibles poursuites en tant que blogueur individuel, les risques sont bien là surtout si on fait dans le blogue d’opinion. Cependant, je crois qu’il y a tout de même la possibilité d’être mordant. De surcroît, en fonction du blogueur, du sujet de la poursuite éventuelle et de la poursuite elle-même, une entreprise ou un individu entreprendrait de poursuivre un blogueur, sans fondements autres que de lui fermer la gueule, risquerait de subir le contrecoup de la blogosphère qui pourrait embarquer pour protéger l’un des leurs. Le contrecoup pourrait de beaucoup dépasser l’ampleur de l’éventuelle poursuite. Les entreprises y songeront donc deux fois avant de s’en prendre à un blogueur. Ce n’est qu’une opinion…

Pourquoi cette longue introduction? Puisque la ville de St-Adèle, son maire M. Jean-Paul Cardinal et leur procureur Albert Prévost de l’étude Prévost Fortin Daoust, ont sorti les gros cannons d’une mise en demeure assortie de menaces de poursuite en dommage et intérêts.

Est-ce que l’affaire ira plus loin ? Fera-t-elle jurisprudence au Canada ? Ternira-t-elle l’image accueillante de la municipalité de Ste-Adèle ? Seul l’avenir nous le dira. Cependant, l’histoire est déjà reprise en France sur le célèbre portail Pointblog et sera multipliée de manière exponentielle cette semaine dans la bloguosphère mondiale francophone et probablement anglophone aussi.

Quelles autres avenues s’offraient à la municipalité ? Tout d’abord, ils auraient pu répondre aux attaques dont ils sont peut-être victimes, sur les billets des blogues concernés. Ils pourraient développer leur propre blogue municipal ou ils pourraient reprendre les critiques dont ils sont victimes et leurs répondre ouvertement et franchement avec des éléments d’informations soutenant leur propos et finalement, utiliser l’outil juridique en dernier ressort. L’impression que cette action juridique (peut-être fondée) laisse au commun des mortels, en est une de fermeture à la critique et à la discussion. Est-ce que Reporters sans frontière va s’en mêler ? Saurons-nous finalement la limite de la liberté d’expression ?

Les blogues concernés sont Carnet de Ste-Adèle et bloguenotes. Ce que ne comprennent probablement pas les avocats de Ste-Adèle est qu’une fois que c’est écrit et homologuer dans Google, même si le blogueur de Carnet de Ste-Adèle fait disparaître ses archives de son blogue (ce qu’il a déjà fait) elles sont presque toute disponible via la cache de Google comme vous pouvez le voir ici. Pour ce qui est du bloguenotes, visionnez aussi les billets « incriminants » qui traitent du maire Cardinal.

Via YvesWilliams

Que peuvent faire les blogueurs? Avant d’en discourir plus longuement, je vous invite à relire deux articles prophétiques du Devoir, daté de 2003, sous la plume de Dumais Technologie: À propos du journalisme citoyen et Technologie – Regard sur le journalisme citoyen, deuxième partie. On peut y lire :

«Cependant, un jour, et c’est inévitable, et malgré toutes les balises et les pseudo-codes de déontologie que se donnent ces journalistes citoyens, il y aura une poursuite qui fera l’actualité. Pour Karim Benyekhlef, professeur au Centre de recherche en droit public de l’Université de Montréal, cela ne fait aucun doute que ce jour est plus proche que l’on ne croit.

Il ne faut pas oublier que le blogueur est aussi un éditeur, et par le fait même, responsable du contenu publié sur son carnet Web. Il est donc inéluctable qu’une première poursuite envers les propos tenus par un blogueur se produise. Et de cette poursuite, résultera ce que nous appelons dans le jargon, le «chilling effect». Un immense frisson parcourra la blogosphère et nombreux seront les carnets, et les journalistes citoyens qui adopteront des mécanismes d’autorégulation. À savoir s’il y a danger pour la liberté d’expression, il faudra voir.»

Donc pour les blogueurs qui veulent se prémunir de ce grand frisson, ils peuvent relire les recommandations de Reporters sans frontières, s’informer sur le phénomène grand frisson (Chilling effet), sur les limites des poursuites préventives et militer pour une loi anti-slapp (Strategic Lawsuit against public participation) comme le fais le site québécois Taisez-vous.org.

Merci à Michel Dumais pour ses lumières pertinentes…

8 réflexions sur “Ste-Adèle se fait censeur”

  1. Merci de soulever ce cas, c’est intéressant. Ça me fait un peu penser au cas de Québec Urbain (en 2003) qui s’était retrouvé face au risque d’une amende de 700$ pour avoir mis un calendrier en anglais sur son site… une infraction à l’OFL.

    Cependant, dans le cas que tu présentes, ce n’est plus la boulette d’un agent un peu trop zélé mais bien une volonté de faire taire deux personnes trop volubiles.

    Concernant le « chilling effect », il me semble qu’il fonctionne surtout quand les poursuites fonctionnent. Dans le cas de MonPuteaux qui est un cas très semblable, les attaques contre Christophe Grébert, l’auteur du site incriminé, n’ont fait que renforcer l’opposition au Maire en place. De tels poursuites vont effectivement refroidir les moins véhéments ; mais la preuve qu’il est possible de tenir tête au pouvoir peut donner encore plus de force aux plus… rebelles.

    De nombreux cas récents proches de celui de Saint-Adele se sont retournés contre le poursuivant. Ça peut aussi avoir un chilling effect sur ceux qui seraient tentés de poursuivre pour un oui ou pour un non. (Je ne suis pas expert, mais il semble également évident que la situation juridique n’est pas la même ici et en France, notamment dans le cadre des SLAPP)

  2. Jean-Francois Poirier, M.Sc. commerce électronique

    J’aimerais obtenir l’avis de Vincent Gautrais sur le sujet!

  3. philippe.paradigma

    En matière de blog vs municipalité le cas de Christophe Grébert http://www.monputeaux.com/ est éloquent. Il s’est tenu droit, s’est battu avec le support de blogueurs. D’ailleurs nos amis de St-Adèle font la une déjà chez lui.
    Ici aussi un blog intéressant http://www.webcitoyen.com/
    En ce qui concerne l’analyse de M Dumais, elle est très juste pour l’époque mais ne pouvait présager du pouvoir de réaction et de solidarité de blogueurs vu que leur nombre s’est multiplié par dix en 3ans.A suivre …

  4. Ping : ACPM » Archive du blog » Après les SLAPP, les CyberSLAPP

  5. Ping : Le Blogue du Québec » La blogosphère dit non

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