Cette semaine j’ai mis en ligne (par ordre inverse de leur rencontre) mes entrevues avec Pauline Marois, Amir Khadir Jean-Martin Aussant, Jean Charest et François Legault et nous discutions de l’économie numérique, des médias sociaux et de l’open source.
Tout d’abord ce qui m’a frappée de ces rencontres est l’affabilité des chefs. Ils étaient tous vraiment gentils et accessibles. Il est vrai que je ne suis pas journaliste, qu’ils me connaissaient déjà et qu’ils savaient que je ne cherchais pas à les coincer. N’empêche que leur ouverture et leur jovialité m’a grandement surprise.
J’ai aussi été surprise par leur manque de connaissance de l’impact majeur du numérique et des technologies de l’information sur l’économie du Québec. Tous ont été surpris d’apprendre que les TI génèrent plus de revenus pour le Québec que le tourisme. À ma question êtes-vous pour l’établissement d’un ministère du numérique
Monsieur Legault fait passer le numérique par le 50 millions d’investissements dans la culture de sa plate-forme électorale (c’est donc un investissement par la bande). Il est pour l’instauration de l’open data comme mécanisme de transparence gouvernementale et aider les entreprises qui ont du rattrapage à faire (notamment en commerce électronique) via investissement Québec. Pour ce qui est d’avoir un ministère du numérique, il pense que c’est une bonne idée. Concernant le renouvellement des licences Microsoft (1,2 milliard) il est ouvert aux solutions open source et va regarder sérieusement la question (incluant l’octroi de certains contrats douteux aux petits amis).
Monsieur Charest, concernant le rapport Gautrin, les circonstances et les événements (sans que je sache lesquelles) ont fait en sorte que son premier rapport n’a pas été implanté. Pour le deuxième rapport, il veut l’implanter progressivement, mais note que c’est un changement de culture majeur au gouvernement du Québec. Il veut instaurer des tableaux de bord permettant une plus grande limpidité de la gestion des projets gouvernementaux pour les citoyens et modifier les types d’appels d’offres pour inclure les plus petites entreprises et développer des expertises en open source. Concernant un ministère du numérique, le plan nord permet entre autres de développer le numérique et le gouvernement manque d’expertise par rapport aux Technologies de l’information. Mais le rapport Gautrin a bien mis la table et la création d’un ministère spécifique est une chose qu’ils vont probablement regarder s’ils sont le prochain gouvernement.
Monsieur Aussant m’a grandement surprise lorsqu’il a déclaré avoir reçu un million de visites sur son site web la journée du débat des chefs, à cause de sa présence sur Twitter. Un million de visites sur un site Web, c’est vraiment, mais vraiment très surprenant. Il est aussi pro open source, trouve qu’un ministère du numérique est une excellente idée, il veut brancher le Québec (et les régions en particulier) sur l’internet haute vitesse (lire ici la vraie haute vitesse avec comme exemple celle de l’Europe) et il veut que la commission Charboneau se penche sur les contrats informatiques gouvernementaux douteux.
Monsieur Khadir semblait réellement dépassé par mes questions sur le numérique, il se dit trop vieux pour s’intéresser à ces questions. Il n’en a pas discuté avec ses membres et la réflexion doit venir d’abord de sa base. Si on veut que Québec Solidaire ait une position, il faut la soumettre à son assemblée, même si on n’est pas membre de ce parti. Par contre Québec Solidaire a signé le pacte du logiciel libre.
Madame Marois va respecter les engagements pris par l’ancien gouvernement quant à l’octroi des contrats informatique (dont le 1,2 milliard pour mettre à jour les licences Microsoft), mais le ministre du Conseil du trésor aura un mandat de regarder attentivement ce contrat. Son ministre du développement économique aura un mandat spécifique de développer le numérique en prenant comme base le rapport Gautrin, mais il n’y aura pas de ministère pour le numérique.
MAJ
Ma conclusion
Comme je le disais dans le billet de mon premier entretien
Mes buts dans ces échanges étaient d’abord de sensibiliser les chefs à l’importance de l’économie numérique et à la nécessité de développer « un plan numérique pour le Québec ». Vous remarquerez qu’ils y répondent sans vraiment avoir cerné l’importance de cet enjeu économique et sociétal majeur.
Les chefs semblent donc complètement déconnectés des réalités de l’économie numérique au Québec. Ce n’est vraiment pas rassurant comme perspective sociétale. Je suis triste et amère de ce constat, mais j’ai la satisfaction d’avoir ouvert le débat auprès d’eux et je rêve que certains parmi vous les talonnent pour qu’un jour, nous puissions nous targuer d’être une société innovante à ce chapitre. Bonne élection à tous et que le meilleur candidat pro numérique (qui ne semble pas être dans les choix que nous avons) gagne…
Vous aimerez aussi sans doute mon billet
Pourquoi est-il important de se questionner sur l’économie numérique?
Et mes entrevues avec
Choi RadioX
La radio de Radio-Canada Québec
Dans l’ensemble, c’est assez pauvre. Ils sont peu informés et ne semblent pas vraiment se sentir très concernés. Je suis assez déçu, sans vraiment être surpris.
Je tente d’organiser une conférence sur le logiciel libre ce trimestre pour mes étudiants à l’UQAC (de futurs enseignants). Si ça fonctionne, je crois que je vais inviter les députés du coin (peu importe qui aura gagné) afin qu’il puissent s’éduquer un peu…
Merci Michelle pour cette initiative. La démarche était tout à fait pertinente.
Ping : Bilan de mes rencontres avec les chefs des partis et leur vision du numérique | Bienvenue! | %blog_URL%
Il faut faire attention quand on fait la promotion de l’open-source. Il ne faut pas faire croire que de tel logiciels sont gratuit. Ces logiciels comportes des cout (encore plus si installé chez les fonctionnaires), seul les licences sont gratuites.
J’ai été étonné de voir la surprise des chefs quand tu as mentionné le poids de TI dans l’économie du Québec. Chez nous, le TI est moins spectaculaire que les ressources naturelles, les employés ne sont pas syndiqués, ils font moins de bruit, mais la technologie est une réalité omniprésente de nous jours. Je ne suis pas convainque des bénéfices d’un ministère des TI, une autre couche de bureaucratie pour avaler des ressources financières que, peut-être, le Gouvernemant pourra mieux dépenser pour soutenir ce secteur de notre économie.
Je pardonne aussi l’ignorance des chefs concernant des questions concrètes de TI, ils ne pouvons pas être des experts en tout, mais je serais curieux d’entendre la vision des ceux qui vont être chargé de conseiller nos leadeurs. C’est eux qui décident de comment dépenser le budget des TI, les chefs vont juste approuver ces décisions.
Merci Michelle pour cette série des entretiens avec les chefs des partis. Je suis content que quelqu’une ait réussi à les faire réfléchir, même si pour un petit moment, sur l’importance du TI dans notre société.
Ping : Élections au Québec : quelle place pour le règlement en ligne des litiges ? | Cyberdispute | Virginie Gaquière, médiation, online dispute resolution, règlement en ligne des litiges, commerce électronique
Merci Madame Blanc pour ces entrevues et comme vous le dites: pour avoir conscientisé nos élus sur l’importance de l’économie numérique.
Je ne suis pas tout-à-fait d’accord avec votre conclusion finale : Aussant semble être pas mal au courant de l’importance du numérique pour l’économie.
De plus, dans notre propre débat sur la musique et le numérique (voir vidéos sur http://www.musiqcnumeriqc.ca/debat-politique-sur-la-culture-vendredi-31-aout-a-19h/1729 ou encore http://www.fredericchiasson.com), les deux candidats de Option Nationale et du Parti Vert semblaient TRÈS au fait de ce qui se passait en numérique et culture. Malheureusement, je me demande si l’absence de dernière minute de plusieurs candidats démontre le manque de préparation à ce sujet!
Notez finalement qu’Option Nationale a repris énormément de propositions (si ce n’est pas la totalité!) de notre document http://virage.musiqcnumeriqc.ca … à notre plus grand plaisir !
Merci Michelle, je salue cette initiative. Je suis content de voir que tu as mis de l’avant le logiciel libre de pair au numérique.
L’industrie du libre est plus organisée que ces représentants l’ont laissé entendre.
Il y a plusieurs organismes visant a promouvoir le numérique, les logiciels libres, et les standards du web.
Parmi ces organismes, il faut le rappeler il y a l’APELL (Association Professionnelle des Entreprises en Logiciel Libre) http://www.apell-quebec.ca qui a justement comme mission de faire la promotion et la sensibilisation au logiciel libre au gouvernement. L’ancien président était celui qui a poursuivi la Régie des Rentes du Québec en 2010.
Pour répondre aux commentaires sur les coûts d’acquisition et frais d’entretien des logiciels libres. C’est évident que libre n’est pas gratuit. C’est une discussion qui a eu lieu maintes reprises, hors du contexte de cette discussion. Mais très bien détaillé dans le cahier « Logiciels libres en affaires » du site de la Coopérative Innov: http://www.rezopointzero.com/cahiers/logiciels-libres-en-affaires
Ping : Les élections, petite étude très scientifique | Blogue Marketing Interactif
Merci Michèle pour cet exercice.
Nous avons un important défi devant nous pour dépasser le seuil d’alphabétisation numérique endémique de nos décideurs publics. Les chefs, comme leurs partis sont loin de comprendre le potentiel du numérique en général et le changement majeur que la mise en œuvre des recommandations du rapport Gautrin représentent.
Seul des démonstrations probantes des économies et des bénéfices que représentent la mise à profit de notre patrimoine numérique, du savoir faire de la société civile et de l’intelligence collective des Québécois pourront un jour les convaincre.
La campagne électorale derrière nous, nous pouvons espérer que le prochain gouvernement verra rapidement l’opportunité offerte par la mise en place d’un ministère du numérique, dédié entre autres à la mise en place d’un gouvernement ouvert.
Ping : De l’importance des geeks dans l’établissement d’un plan numérique pour le Québec et/ou le Canada • Michelle Blanc, M.Sc. commerce électronique. Marketing Internet, consultante, conférencière et auteure