Trop réussir au Québec et ses tristes revers, le dilemme de choix déchirants

J’ai toujours valorisé la transparence en ligne et la sagesse collective. Aujourd’hui encore, je vous expose un dilemme auquel je suis confrontée.

Je termine à l’instant une discussion avec l’un des potes qui a participé avec moi au rapport d’étonnement. Il me dit « j’ai suggéré ton nom à un organisme de transfert technologique et leur ai dit que nous travaillerions avec toi pour le dossier X ». La première réaction de l’organisme en question « t’es tu fou, ça va couter bin trop cher??? ».

La semaine dernière, un nouveau client, le dirigeant d’une PME qui travaille à l’international me dit « je suis si content que vous ayez accepté de travailler avec nous, j’étais tellement impressionné et j’hésitais à vous le demander, j’étais convaincu que vous nous trouveriez trop petit pour être intéressé ». Puis, de plus en plus, il vient à mes oreilles « je t’aurais téléphoné, mais je te croyais trop occupée, trop chère, ou autre perceptions que je suis inaccessible ». J’ai d’ailleurs encore en mémoire ce téléphone que je reçu de madame Francine Grimaldi et qui me dit –C’est vous qui répondez au téléphone??? Ce à quoi je lui répondis –c’est vous qui me téléphonez madame Grimaldi???

Il y a quelques mois, je mangeais avec l’un de mes mentors, Jacques Nantel et je lui exposai le problème. Il me répondit », tu sais Michelle, au Québec on a peur de la réussite et on déboulonne nos étoiles. Si le Cirque du Soleil ou Céline Dion n’était pas sorti du Québec, on n’en parlerait plus aujourd’hui. Tu n’as pas le choix, tu dois sortir du Québec. Tu es rendu là. C’est triste à dire, mais c’est mon constat.

Le hic avec cette problématique est que dès le début de mon blogue, comme c’est le gouvernement du Québec et le payeur de taxe qui ont payé pour faire de moi l’une des premières titulaires d’une Maîtrise Scientifiques en commerce électronique au Canada, j’ai choisi de partager mon savoir et ma passion avec ceux qui ont payé pour que je sois rendue là aujourd’hui. J’ai donc d’emblée créé mon blogue en Français et publié de nombreux ouvrages dans ma langue maternelle. Mes clients sont aussi majoritairement francophones, ici et en Europe. Maintenant, j’ai payé pour faire traduire et adapter mes deux derniers ouvrages dans la langue de Shakespeare, pour le marché américain. J’ai déjà un blogue anglophone payé et mis en ligne qui attend que je me décide à m’exporter et à me faire valoir en anglais. Mais ça m’attriste. Je sais que le Québec et ses entreprises, très petites ou très grandes, ont énormément besoin de mon expertise. Je sais aussi qu’il est beaucoup moins dispendieux de travailler avec quelqu’un comme moi qui a l’expérience et qui ne dois pas faire travailler « une armée de faiseurs de rapports » pour fournir les réponses adéquates. Je sais aussi que mes clients actuels sont extrêmement contents des résultats et du rapport qualité/prix qu’ils obtiennent de mes services. Vous n’avez qu’à lire mon récent billet 300 % de croissance du trafic web c’est possible, le cas Tourisme Mauricie ou À propos des médias sociaux et des petits. Vous pouvez aussi lire mes sections Ce qu’ils disent ou ce qu’ils disent sur linkedIn pour vous en convaincre. D’ailleurs ma business va très bien. Je l’expliquais aussi dans cet autre billet LA différence entre très et trop occupé.

D’ailleurs si je ne fais que 10 heures facturables dans ma semaine, je n’ai vraiment pas à me plaindre. Mais je peux aisément en faire 20, 25 ou même 30. Mon dilemme est donc celui-ci. Comment puis-je inverser cette fausse perception d’inaccessibilité ou devrais-je réellement me foutre des entreprises du Québec et m’investir massivement dans l’exportation de mes services? Mon mentor Jacques me dit de faire les deux, mais n’étant qu’une seule personne (d’ailleurs souvent les gens croient à tord que j‘ai une armée secrète qui travaille pour moi) avec des ressources qui sont tout de même limitées et adorant mon coin de pays pour lequel je préfèrerais de loin être bénéfique, je dois faire des choix. Que me suggérez-vous de faire?

De l’urgence d’un plan pour bénéficier positivement de l’économie numérique

Les gagnants et les perdants de l’économie numérique

L’auteur Rick Whiting fit récemment une lumineuse présentation d’une allocution donnée par Erik Brynjolfsson, professeur du MIT et directeur du MIT Center for Digital Business, dans sa présentation Winners And Losers In The Digital Economy. Certains seront très certainement rapides à le traiter de « pelleteur de nuage »! C’est qu’il parle d’économie numérique au Comdex Virtual. Ce n’est sans doute pas sérieux…

Mais moi je le trouve particulièrement éclairant et en plein dans la ligne d’une « sonnette d’alarme » que douze autres passionnés et moi-même avons actionnés dans notre Rapport d’étonnement à l’automne 2012 .

Les gagnants, et les perdants de l’économie numérique (en parlant des États-Unis)

Tel que cité par monsieur Whiting

« GDP is at an all-time high, profits are at an all-time high, investment is at an all-time high. That’s all good news.
(…)
« The labor participation rate, the share of workers that are in the workforce out of the total population, has fallen off a cliff. »

Puis le professeur Brynjolfsson poursuit en disant que des millions de personnes ont perdu leurs emplois parce que les entreprises et les compétences n’ont pas suivi l’évolution trop rapide des technologies numériques (je rappelle ici que l’Estonie vient d’instaurer les cours de codage informatique dès le primaire). Puis après avoir parlé des iniquités de la répartition de la richesse, engendrées par les profits des technologies, il poursuit en différenciant ceux qui ont des « skills » et ceux qui n’en ont pas.

There’s been a divergence, which economists call a ‘skill-biased technical change,’ » he said. The result: People with limited skills have difficulty finding employment while businesses have trouble filling jobs — such as in high-tech manufacturing — that require higher skill levels.

Il poursuit en identifiant les superstars de la nouvelle économie comme Lady Gaga qui utilise les médias sociaux pour rejoindre ses millions d’admirateurs (et monnayer cette exposition) ou Scott Cook qui après avoir inventé Turbotax, fit perdre des milliers d’emplois chez H&R Block.

Mais c’est justement sa conclusion que je trouve si lumineuse (sans doute parce que je partage tellement ce point de vue que j’ai donné bénévolement de mon temps pour travailler sur le rapport d’étonnement des 13 étonnés ), la voici donc.

« The truth is, technology has always been destroying jobs, technology has always been creating jobs, » Brynjolfsson said. But with advances in technology coming faster than ever, that equation is out of balance.
« We’re going to see this trend accelerate in the next 10 years, » he said of machines taking over tasks that have been exclusively the province of humans. « The consequences of this are very profound.
« Addressing this paradox is the grand challenge for our generation. »

Le grand défi de notre génération est de confronter ce paradoxe! Cette citation vient d’un prof. de MIT et citoyen américain, l’une des nations les plus en avance avec le numérique. Et nous ici, on ne se penche même pas encore sur ça. Le numérique ce ne sont que des outils… Au mieux, une connection à 4,5MBPS si vous êtes du bon côté de l’un de nos réseaux…
C’est justement cette réflexion sur la confrontation de ce paradoxe que proposait notre rapport d’étonnement.

Je deviens impatiente et à l’étape prochaine, je serai sans doute en tabarnak, plutôt qu’étonnée…

Mais je comprends que des fois l’aveuglement, le déni et l’obscurantisme c’est profond. Je sais de quoi je parle, j’ai nié mon sexe durant 45 ans…

Mais vous n’êtes peut-être pas encore convaincu de l’urgence des enjeux? Lisez donc ce paragraphe

Technology Change Accelerates In The Next 10 Years
Brynjolfsson cited two cases to illustrate how quickly technology is advancing. One is Google’s self-driving car technology, which the MIT professor recently experienced in a drive down Highway 101 in the San Francisco Bay Area. The other is IBM’s Watson computer (pictured) that defeated longtime Jeopardy champion Ken Jennings in a famous man vs. machine competition.

The Google technology could make obsolete thousands of jobs, from cab drivers to long-haul truckers. And Brynjolfsson said the Watson technology is being applied to call centers, financial processing tasks and even medical diagnostics — jobs that once only people could do.

Pourquoi est-il important de se questionner sur l’économie numérique?

Marie-Claude Ducas dans son billet La campagne 2012 et le mirage de « l’élection 2.0 » Disait:

Questionner les politiciens sur « ce qu’ils comptent faire avec l’économie numérique », comme l’a fait la consultante et blogueuse bien connue Michelle Blanc (d’abord avec le chef libéral Jean Charest, ensuite celui de la CAQ François Legault, puis avec Jean-Martin Aussant d’Option Nationale ) je veux bien. Et c’est sûr que, comme plusieurs le soulignent, comme l’a fait, dans ce billet, le spécialiste René Barsalo , il faut s’intéresser à autre chose qu’aux routes et aux ressources naturelles quand on parle de développement économique. Mais… pourquoi serait-ce tellement plus pertinent que si les patrons d’agence de pub allaient demander aux candidats « ce qu’ils comptent faire à propos de l’économie de la publicité »? Ou les comptables, s’enquérir de leur opinion « à propos de l’industrie des firmes de comptabilité et de consultation »? Pourtant, ce sont des enjeux économiques au moins aussi valables : il y a eu bien des fusions et des rachats, récemment, dans ces deux domaines; idem parmi les bureaux d’avocats, d’ailleurs.

Je lui répondis dans mon propre blogue

Se questionner sur l’économie numérique est plus pertinent que se questionner sur l’économie de la publicité ou de celle de la consultation strictement parce que le numérique touche toutes les sphères de l’activité humaine, que strictement pour la portion TI, ça représente 25 milliards de revenus pour le Québec (à l’heure actuelle et avec 40 000 emplois), que ça participe de l’économie du savoir et que comme pour l’électricité qui a permis un gain de productivité énorme pour toutes les industries, le numérique engendre les emplois et la « valeur économique » du XXIe siècle. Déjà en 1994 Nuela Beck parlait de la nouvelle économie et de comment la « valeur » avait transité des biens matériels aux biens immatériels. On a qu’à penser à la valeur de Facebook, d’Apple, d’Amazon et autres pour s’en convaincre. Malheureusement ce ne sont pas les banques qui capitalisent sur ces « valeurs intangibles » mais plutôt les fonds collectifs de placement. Ils sont ceux qui désormais (et depuis le tournant des années 2000) ont l’avoir collectif du capital…

La nouvelle économie de Nuela Beck (1994), Résumé

L’économie nord-américaine subit depuis nombre d’années une transformation radicale. Nuala Beck indique le sens de ces bouleversements et montre les chemins de l’avenir. Affirmant que les statistiques sous-estiment les forces motrices qui animent les industries nouvelles, l’auteure distingue trois cycles: celui des matières premières a dominé la révolution industrielle, celui de la production de masse a alimenté l’ère de la consommation et de l’automobile et la technologie domine le cycle actuel.

Dans La nouvelle économie, Nuala Beck présente le prochain cycle qui nous entraînera dans l’ère de l’intelligence artificielle, du génie génétique, de l’espace et des matières premières nouvelle génération.

M. Barsalo qui est aussi cité par madame Ducas dit avec raison dans un billet du Journal de Montréal, Notre avenir… numérique? :

La triste réalité est, qu’au tournant historique de notre civilisation vers le numérique, aucun des partis présents ne prends cette opportunité au sérieux. Les routes, les ressources naturelles et l’administration des services publics sont pour eux les seuls « vrai » enjeux. Pourtant, les deux sont inter-reliés. En termes d’infrastructures, l’accès au code via un réseau qui relie adéquatement l’ensemble du territoire, ses institutions, ses entreprises et ses citoyens est aussi important que l’eau courante et l’électricité dans la société qu’y émerge. En termes de réduction des coûts, l’utilisation du numérique en matière de planification, de suivi ou de réalisation permet d’assurer une meilleure gestion des ressources et des budgets tout en augmentant la qualité des biens et services.

En abordant de front la question de l’informatisation et de l’ingénierie en réseau des services publics, en partenariat avec le citoyen et l’entreprise privée, nous pourrions initier un chantier numérique dont le Québec entier sera le premier bénéficiaire. Mais avant de dépenser, il faut réviser le processus d’appels d’offres de projets informatiques. Tout comme celui de la construction, on y remarque depuis quelques années des dépassements de coûts vertigineux.

Le meilleur moyen d’assurer ce changement est de mettre de l’avant l’ouverture et la transparence, si chère à la génération des natifs du numérique qui n’attends que ce signal pour s’impliquer. Patenteux comme nous le sommes, avec la mise en place d’un tel chantier, nous pourrons non seulement améliorer notre société et réduire les coûts de l’État, augmenter le niveau de transparence et l’implication citoyenne, mais aussi créer au passage une avalanche de nouvelles entreprises technologiques, équipées pour affronter l’avenir plutôt que de creuser des trous. Dans toutes les régions, unis par le réseau, celles-ci profiteront du succès collectif et exporteront leur savoir faire au reste de la planète, tout en participant à notre croissance économique.

L’un des lecteurs de mon blogue me demanda en commentaire

Vos statistiques reliées à l’économie numérique parlent d’elles même… mais pouvez-vous mentionner vos sources, car des chiffres sans références peuvent perdre de leur crédibilité… malgré le fait qu’ils proviennent d’une plume aussi respectée que la vôtre?

Merci et continuez de vous faire entendre!

Il a raison, mais ça fait TELLEMENT de fois que je montre ces statistiques que je tiens pour acquises qu’elles sont connues et il semble que ce ne soit pas le cas. Donc ces statistiques sont colligées dans mon billet Le Tourisme vs Les TIC au Québec, met-on nos œufs dans le bon panier? . J’y citais Paul Journet dans son article Le tourisme québécois sévèrement critiqué qui disait aussi ceci :

L’industrie touristique représente 2,5% du PIB du Québec. L’année dernière, elle a rapporté des revenus de 10,4 milliards et fourni 134 600 emplois directs.

Or, je me suis amusé à comparer l’industrie du tourisme à celle des Technologies de l’information (qui n’est que l’une des nombreuses composantes de ce que l’on nomme le numérique) avec les chiffres que donnent Affaires étrangères et Commerce international Canada

Le secteur des TIC est un moteur de l’économie du Québec, puisqu’il génère des ventes de plus de 25 milliards de dollars. Ce secteur, qui compte quelque 5 000 entreprises dans la province, emploie approximativement 140 000 personnes. La production des TIC est en grande partie exportée (surtout vers les États-Unis) et représente 35 % de la production totale du Canada dans ce secteur.

Si je récapitule ces chiffres, l’industrie du tourisme génère 10,4 milliards et fournit 134 600 emplois et celle des TIC 25 milliards et 140 000 emplois

L’internet en région ou comment handicaper l’essor économique

En théorie, la beauté d’être un travailleur d’internet, de l’économie du savoir, d’être programmeur, développeur ou entrepreneur techno est qu’on peut travailler de n’importe où sur la planète. En réalité il faut plutôt travailler à des endroits qui offrent les infrastructures permettant à cette économie de se développer. Ces infrastructures incluent au moins deux éléments primordiaux. Un approvisionnement en électricité et un en bande passante. L’électricité est abondante et à un prix raisonnable au Québec. Par contre, la bande passante, c’est une autre histoire. Même dans les grands centres que sont Montréal ou Québec, notre bande passante ne correspond même pas à ce que fournis déjà les autres villes canadiennes qui font partie de iCanada , c’est à dire une vitesse de 100 MBPS. Ici à Montréal, lorsque nous avons un gros 4.5MBPS on considère déjà être chanceux. Et que dire du Vermont qui se targue de fournir maintenant 1000 MBPS à la moitié du prix du fameux Google Fiber du Kansas soit 35 $ par mois? Aurait-on des croûtes à manger?

Et en région, c’est la dèche encore plus extrême.

Dans mon cas particulier, je devrais faire abattre des pins centenaires si je veux avoir l’internet par satellite de Xplornet à un prix compétitif, pour une bande passante médiocre. Sinon, la solution modem cellulaire de Bell coûte 105 $ par mois pour un gros 15 Go de téléchargement. Et je ne vous parle même pas de la bande passante qui est ri-di-cu-le. Il faut donc obligatoirement oublier AppleTV, Netflix et autres services requérant un tant soit peu de téléchargement.

Vous me direz, mais tu n’as qu’à resté dans un grand centre! Je répondrai, vous avez raison, j’aurai vraiment dû m’installer dans un champ « nowhere » au milieu du Vermont…

Quelques autres chiffres:

Dans LeDevoir

Un doute? C’est l’OCDE qui le dit. En 2007, l’Organisation de coopération et de développement économique a mesuré en effet le prix pour accéder et utiliser à la bande passante dans une trentaine de pays, dont le Canada. Résultat: alors qu’un Megabit/seconde de bande passante, soit l’unité de base de mesure de la capacité de transfert d’un réseau, coûte 0,13 $ en moyenne à un Japonais, il faut près de 4 $ à un Canadien pour obtenir la même chose.

À titre comparatif, les Français (0,33 $), les Suédois (0,35$) ou les Américains (2,83 $) doivent débourser beaucoup moins pour avoir la chance d’échanger courriels, photos ou vidéos par Internet. Un clivage palpable cette semaine d’ailleurs alors que la compagnie Numéricâble en France proposait à ses clients une connexion par fibre optique contre 34 $ par mois. Au même moment, à Montréal, Vidéotron exposait sur son site une offre de branchement deux fois moins rapide pour les téléchargements et 100 fois moins rapide pour le téléversement en échange d’une facture de… 90 $, soit trois fois plus cher.

Sur Triplex Radio-Canada

Par exemple, le plus gros forfait de Vidéotron offre 170 Go en aval (vitesse de 120 Mbit/s) et 30 Go en amont (vitesse jusqu’à 20 Mbit/s) pour 149,95 $ mensuellement. « L’utilisation de la bande passante au-delà des limites définies pour cet accès sera facturée à 1,50 $ par gigaoctet supplémentaire, et ce, sans limite mensuelle de facturation », peut-on lire sur le site. De côté de Bell, le plus gros forfait offre 100 Go de bande passante pour 54,95 $, vitesse de téléchargement jusqu’à 25 Mbit/s et vitesse de partage de contenu de 7 Mbit/s. « Pour seulement 5 $/mois, le forfait Utilisation assurée vous offre une utilisation Internet additionnelle de 40 Go. »
(…)

Un film haute définition de 1 h 30 utilise environ 3 Go de bande passante, en définition standard, c’est environ 1 Go l’heure, et il faut compter une moyenne de 5-6 Go pour le téléchargement d’un jeu sur Steam. Selon l’étude de Credit Suisse sur la situation canadienne, utiliser un service comme Netflix pour écouter 30 minutes de télévision par jour équivaut à environ 32 Go d’utilisation Internet mensuellement (pour ce seul service). Bref, si on se tourne vers des services en lecture continue, on peut se retrouver avec une facture salée.

« Les opérateurs font énormément d’argent sur le dépassement de la bande passante, explique Laurent Maisonnave, président du conseil d’administration du service Île sans fil. Ça leur coûte 0,01 $ le Go, alors imaginez les profits lorsqu’ils font payer des surplus de 1 $ à 5 $ le Go supplémentaire. Mais ce n’est pas la seule raison, continue-t-il. Les fournisseurs Internet sont devenus des fournisseurs de contenu. Ils ont maintenant leur propre service de vidéo sur demande et ne veulent pas de concurrence. »

La corrélation entre l’électricité et le numérique pour le développement économique du Québec de demain

L’électricité n’est qu’un outil, ou plutôt une suite de technologies. L’électricité en soi ne fait pas grand-chose. Par contre, elle permet une activité économique incroyable. Elle fait littéralement tourner l’économie. Nous pourrions certainement faire un parallèle entre le numérique et l’électricité. Le développement du numérique fait d’ailleurs songer aux belles années du Duplessisme. Votez pur moi et vous aurez votre « haute vitesse ». Mais de quelle haute vitesse parle-t-on au juste?

D’ailleurs il est très instructif de lire ou relire la page de Wikipedia intitulé Histoire de l’électricité au Québec .

Les premiers tâtonnements de l’industrie sont marqués par une course au développement à Montréal, suivie d’une phase de consolidation nécessaire à des fins d’efficacité et de la création de monopolesrégionaux qui vont graduellement étendre leurs réseaux électriques dans les principaux centres du Québec. Le développement de ces entreprises s’effectue par l’expansion des réseaux ou, tout simplement, par l’acquisition d’une firme voisine et potentiellement concurrente. Les grandes perdantes de ce mode de développement se retrouvent toutefois dans les régions rurales ; certaines municipalités s’organisent de manière autonome, pendant que dans certaines régions, des résidents forment des coopératives de consommateurs. Les deux principales compagnies présentes sur le marché, la Montreal Light, Heat and Power (MLH&P) et la Shawinigan Water and Power Company (SWP) s’imposeront comme les entreprises dominantes du secteur jusqu’aux années 1930, pendant qu’au Saguenay—Lac-Saint-Jean, l’Alcans’implante solidement et développe son potentiel hydraulique en fonction de la croissance de sa production d’aluminium.

La domination des grands monopoles régionaux, « le trust de l’électricité », sera cependant contestée dans l’opinion publique. Cette contestation donnera lieu à une enquête publique, l’implantation d’organismes de surveillance et mènera en 1944 à la nationalisation de la MLH&P et à la création d’une société publique, Hydro-Québec, avec l’adoption de la loi 17, créant la Commission hydroélectrique de Québec.

(…)Influencé par le New Deal du président américain Franklin D. Roosevelt17, le gouvernement Godbout dépose un projet de loi à l’automne 1943, afin de prendre le contrôle la MLH&P, qui exerce un monopole dans la grande région de Montréal.

La loi créant une entreprise commerciale de propriété publique, La Commission hydroélectrique de Québec, est adoptée par l’Assemblée législative le 14 avril 1944. Elle confie à la nouvelle société le mandat initial de « fournir de l’énergie aux municipalités, aux entreprises industrielles et commerciales et aux citoyens de cette province aux taux les plus bas compatibles avec une saine administration financière ». Hydro-Québec avait aussi pour mission de réhabiliter un réseau vétuste et de développer l’électrification des régions rurales non desservies par les entreprises existantes.

Je vois d’étranges similitudes entre « La domination des grands monopoles régionaux » de l’électricité d’hier, et celle des fournisseurs internet et cellulaires d’aujourd’hui. Je vois une corrélation entre le « New deal » américain qui a poussé dans le cul des élus d’hier et le plan numérique de New York , de la France , le opengov d’Obama qui pourrait pousser dans le cul de nos politiciens d’aujourd’hui. Sauf que malheureusement, nos élus ne semblent pas encore comprendre l’urgence d’agir que leurs prédécesseurs eux, avaient compris avec l’électricité. L’électricité est l’un des « outils économiques » particulièrement importants lorsque vient le temps de discuter création d’emploi et emménagement de nouvelles entreprises manufacturières et de transformation. C’est un élément clé de la compétitivité industrielle. MERCI à Taschereau, Godbout, Lévesque et Bourassa d’avoir eu la vision de comprendre que l’électricité était plus qu’un « outil ». Ils ont compris que l’électricité pouvait être un projet de société, lui permettant qu’il devienne un outil de création de richesse et d’emploi majeur du Québec d’aujourd’hui.

Les études relatant l’impact sur l’économie industrielle de l’électricité sont abondantes. L’électricité et « l’énergie » en général sont des vecteurs évidents de l’économie industrielle et du confort de chacun. Tout le monde comprend ça aisément. Pourtant, le numérique est désormais cette électricité d’hier, mais pour l’économie du savoir. Cette nouvelle économie dans laquelle nous baignons depuis bientôt 20 ans. Malheureusement les études qui prouvent son impact sur l’économie, les mesures de cet impact, les ratios et autres indicateurs sont encore en développement. J’en parle d’ailleurs depuis plusieurs années déjà.

Nous étions très en avance au début des années 2000. Nous sommes très en retard aujourd’hui. Le mot clé « numérique » n’est plus à la mode. Le mot-clé qui est à la mode depuis dix ans est « innovation ». Question de mode sans doute. Malheureusement cette mode nuit au développement économique du Québec et nuira encore plus dans les années à venir si nous ne faisons rien. D’ailleurs le CEFRIO vient de mettre en ligne une étude intitulée Indice de l’innovation par les TIC . Étude très intéressante qui tente de rendre sexy, le numérique en l’affublant du mot-clé à la mode « innovation ». C’est à la fois triste et loufoque. Pas que les TIC ne soient pas responsable de la croissance de l’innovation, depuis des années déjà les TIC le sont. Mais il est triste que nous devions enrober le numérique du drap de l’innovation pour réveiller notre classe politique qui se gargarise justement de mots-clés sans pour autant réellement comprendre les enjeux.

Les conclusions de cette étude nous révèlent

Cette enquête trace un lien intéressant entre tiC et innovation. Plus une entreprise ou une organisation utilise de manière intensive les tiC, plus elle affiche une intensité d’innovation élevée. Ce constat s’applique aux innovations de produit, de procédé, de commercialisation ou organisationnelle. En fait, les résultats montrent qu’il est difficile de séparer ces innovations dans la pratique. Les organisations innovantes introduisent souvent plusieurs types d’innovations en même temps.

Le fait que l’on parle d’intensité d’utilisation des tiC et non de simple possession implique que l’investissement ne doit pas seulement être technologique, mais aussi organisationnel. il faut être organisé pour utiliser les tiC mises en place dans les organisations. les autres facteurs qui influencent de manière positive l’intensité d’innovation sont les modifications significatives à l’organisation, l’acquisition de nouvelles expertises, la présence d’équipes multidisciplinaires et la culture d’expérimentation. toutes ces dispositions vont permettre à l’organisation de maximiser l’intensité de l’innovation.
(…)

on reconnaît l’importance pour les entreprises et organisations publiques canadiennes d’accroître leur performance en matière d’innovation, afin qu’elles améliorent leur compétitivité et, de ce fait, la productivité de l’économie canadienne. les politiques mises en place doivent reconnaître le rôle des tiC, mais également tenir compte du contexte dans lequel elles s’insèrent. les politiques doivent en même temps favoriser les éléments complémentaires aux tiC.

Pour les gestionnaires, les résultats soulignent l’importance de voir les investissements en tiC de manière large. Ce ne sont pas simplement des outils à mettre en place. les tiC sont des leviers pour faire les choses différemment, et doivent être accompagnées de décisions parfois difficiles ou risquées sur les modes de fonctionnement de l’organisation.

Mais même les études et les analyses les plus savantes ne serviront à rien s’il n’y a pas de Taschereau, Godbout, Lévesque ou Bourassa pour porter le flambeau de la vision sociétale de l’économie de demain. Je me demande encore qui sera le porteur du flambeau de la richesse économique collective de nos enfants?

L’argumentaire économique du numérique

Après Nuela Beck sonnait les cloches des économistes et gestionnaires de portefeuilles avec son livre La nouvelle économie en 1994. En 2007, C’est le Dr. Robert D. Atkinson qui de The information technology and innovation foundation démontra dans son Digital prosperity, Understanding the Economic Benefits of the Information Technology Revolution , comment les TI sont devenu le fer de lance de la croissance économique et conclu

« In short, while the emerging digital economy has produced enormous benefits, the best is yet to come. » D’ailleurs l’une de ses recommandations est de placer le numérique au centre même, des politiques économiques gouvernementales.«Give the Digital Economy Its Due: Economic policymakers need to view IT issues not just as narrow IT policy, but as the centerpiece of economic policy. This means putting issues of digital transformation at the front and center of economic policy. »

À cet effet, Ed Felten, le premier CTO de la Federal Trade Commission américaine mentionnait dans un article recent

It would obviously be foolish for senior government officials to make economic policy without seeking input from trained economists. Perhaps someday, it will be seen as equally foolish to make technology policy without a computer scientist in the room.

La Banque mondiale quant à elle, rappelle qu’afin de déployer un gouvernement numérique, il est fortement conseillé de commencer par les infrastructures numériques .

Governments should promote strategies that focus on ICT infrastructure development as a prerequisite to e-government ± an « I before E’’ strategy.

Depuis des années déjà, l’OCDE analyse et finance la recherche de mesures économiques qui permettraient d’isoler l’apport du numérique à l’économie en général. ¨Pourtant, cette organisation conservatrice et neutre a déjà avancé dans son rapport THE IMPACT OF THE INTERNET IN OECD COUNTRIES que

“Existing empirical studies, including ongoing OECD work, suggest a positive link between increasing Internet adoption and use and economic growth. Even though the aggregated effects are still preliminary, the relationship between Internet development and economic growth, as well as microeconomic evidence, suggest that governments should continue to pursue policies that help promote Internet connectivity and encourage the take-up of services”.

PWC en 2011 observait aussi la relation intrinsèque entre la croissance économique et la technologie numérique.

Economic growth and technology are inextricably linked. Current economic conditions are fostering investment in technology as emerging markets ramp up their demand for technology to fuel growth, and advanced markets seek new ways to cut costs and drive innovation. This becomes a virtuous circle as digital technologies drive consumer income and demand, education and training, and efficient use of capital and resources—leading to increased economic growth, particularly in emerging markets.

Cette croissance qui lie le numérique à l’économie a même été chiffrée cette année par Boston Consulting Group. BCG avance que d’ici 2016, strictement pour les pays du G20, l’économie numérique représenterait une croissance potentielle de $4,2 billions (je rappelle ici qu’un billion c’est mille milliards).

Je suis certes très enthousiaste à l’idée de croissance économique que pourrait apporter le projet du Plan Nord qui a déjà été présenté par le gouvernement libéral du Québec. Mais il me semble qu’il est grand temps et que nous sommes même très en retard, de planifier, préparer et profiter d’une parcelle de pointe de la tarte de $4,2 Billions de croissance de l’économie numérique dans laquelle, que nous en prenions collectivement conscience ou non, nous sommes déjà partie prenante. Sauf que si nous n’en prenons pas collectivement conscience et que nous ne faisons pas les efforts individuels et collectifs nécessaires pour y prendre part, cette croissance bénéficiera inévitablement à d’autres citoyens.

En conclusion, je suis donc définitivement pour un Plan Nerd, ou plus prosaïquement, pour un plan numérique pour le Québec…

NOTE

Ce texte a d’abord été rédigé pour le collectif « Le Québec à l’heure des choix : regard sur les grands enjeux ». Malheureusement, l’éditeur n’aime pas ma manière de citer mes sources. Il semble que pour cet éditeur, un hyperlien n’est pas dans sa norme et qu’un auteur, titre, éditeur, page, date, soit plus ce qu’il recherche. Ayant déjà été édité 4 fois, je comprends le besoin de l’éditeur, mais étant aussi blogueuse, je comprends ma démarche, qui faisait tout à fait l’affaire de mon éditeur actuel Libre Expression. N’ayant pas le temps de gratuitement faire le tour de chacun des articles cités ici pour répondre aux besoins spécifiques de cet éditeur, je me retire simplement de ce projet. Par contre, vous aurez la chance de prendre connaissance ici de mon texte, et ce gratuitement, ce qui allait aussi à l’encontre de la « philosophie de cette maison d’édition ». Alors c’est triste, mais bon, c’est ça qui est ça…

Les aberrations du contrôle excessif des communications en ligne du gouvernement canadien

Un article de LaPresse de ce matin (Industrie Canada met des semaines pour publier un gazouillis) nous révèle que les twitts des fonctionnaires d’Industrie Canada doivent passer par une myriade de contrôles administratifs avant d’être en ligne.

La plupart des micromessages publiés par le ministère sont préparés des semaines à l’avance, révisés par des dizaines de fonctionnaires, corrigés par le cabinet du ministre et soumis à un protocole en douze étapes, indique-t-on dans les documents que La Presse Canadienne a obtenus en vertu de la Loi sur l’accès à l’information.

Un tel niveau de contrôle vise notamment à assurer une répétition des publications d’Industrie Canada par d’autres agences gouvernementales. En retour, les fonctionnaires du ministère republieront eux aussi leurs publications, dont celles de la Banque de développement du Canada, entre autres.

Et comme le mentionne à juste titre le pote Dominic Arpin sur Twitter

@DominicArpin
Industrie Canada met des semaines pour publier un tweet! Tout ça pour 248 abonnés en français et 1429 en anglais! http://bit.ly/1gG73Je

Ce contrôle excessif des communications gouvernementales est l’un des piliers stratégiques du gouvernement Harper. Mais c’est aussi le genre de paranoïa communicationnelle de certaines grandes entreprises. À vouloir être certain d’être sûr d’avoir la conviction positive de communiquer adéquatement, on ne dit plus rien et les résultats de nos efforts communicationnels sont nuls. En plus de ne pas pouvoir partager la moindre information non aseptisée, on retwitt l’information aussi aseptisée de nos potes des autres ministères (ou des autres composantes de notre grande entreprise).

Les médias sociaux requièrent une certaine créativité, un « timing », un « storyline » qui justement demande de sortir un tant soit peu de son « strict giron communicationnel » et une relative liberté qui est complètement antinomique avec un contrôle excessif. Mais s’il est interdit aux scientifiques gouvernementaux de partager leurs découvertes, aux délégués syndicaux des ministères de parler aux médias et aux ministères d’informer correctement les citoyens sans la censure du bureau du premier ministre, il est évident qu’une présence médias sociaux fédérale canadienne est risqué presque autant que ne l’est la communication gouvernementale de la Corée du Nord…

Vraiment pitoyable

Soyez aussi sans craintes. Mon blogue ne sera pas disponible aux fonctionnaires de l’état puisqu’il est déjà censuré par mon propre gouvernement depuis cinq ans déjà...

MAJ

Voici un message privé reçu ce matin que je vous partage en protégeant l’anonymat du nom et de la fonction de son auteur …

Bonjour Mme Blanc,

Pour donner suite à l’article que vous avez partagé et à votre billet, relativement aux gazouillis publiés par nos collègues du fédéral, je me permets de vous faire de mes commentaires en privé.

Pour avoir travaillé plusieurs années au fédéral dans le domaine des communications – et avoir vécu le changement de régime libéral / conservateur – je peux confirmer que les règles se sont progressivement resserrées au fil des années pour devenir de plus en plus contraignantes pour les communicateurs. Du contenu qui, en 2005-2006, pouvait être publié sur un site Web avec l’approbation d’un directeur, devenait, en 2007-2008, du contenu devant être approuvé par le bureau du ministre… et je vous épargne les étapes à suivre, quelques années plus tard pour la révision et l’approbation de messages-clés par le Bureau du Conseil privé.

Les communicateurs fédéraux doivent aujourd’hui composer avec des directives et des protocoles strictes. On peut comprendre la nécessité d’établir de telles règles et directives, dans la mesure où ces dernières servent à coordonner ou à synchroniser les efforts de communication (entre les différents ministères par exemple, dont les champs de compétence peuvent se croiser, ou à l’intérieur même des ministères), à harmoniser la diffusion d’information et à en assurer l’exactitude (et à s’assurer qu’elle soit diffusée en temps opportun).

Bien sûr, ce qui est déplorable dans tout ça, est la perversion de ces règles et directives, utilisées à des fins de contrôle obssessif de l’information (et gestion des perceptions) plutôt que comme simples outils de coordination. Nous sommes loin des mots-clés qui marquèrent la campagne des conservateurs en 2005-2006 : transparence, imputabilité, etc.

Avec de telles règles, on se trouve d’ailleurs à contresens par rapport à l’essence même des réseaux sociaux. On bafoue l’instantanéité, la spontanéité, la rapidité et le concept de “communication bidirectionnelle ou symétrique”, voire “démocratique” que présupposent les réseaux sociaux.

Malgré tout, pour avoir vécu cette réalité, je me permets de préciser que les règles et directives qui encadrent (musellent, dans un certain sens) les communicateurs fédéraux, viennent surtout du centre (ou découlent d’instructions provenant du centre). Elles sont rarement le reflet des idées, projets, propositions, suggestions ou recommandations des communicateurs eux-mêmes.

Les communicateurs sont bien conscients de la lourdeur de ces processus et du peu de marge de manœuvre dont ils disposent. Ils doivent composer avec cela au quotidien. J’ai vu plus d’un projet novateur, plus d’une idée originale, plus d’une proposition visant la mise en place de réels canaux/outils permettant le dialogue et la rétroaction, être tués dans l’œuf à un palier supérieur de la hiérarchie ministérielle. Du point de vue des communications, l’expression qui me vient en tête est “risk-averse”… qualifiant bien l’attitude et le comportement de ce gouvernement. Cependant, plusieurs communicateurs font ce qu’ils peuvent, en coulisse, pour tenter d’améliorer les choses. Un projet, une idée, une proposition à la fois.

Bref, je termine cette tirade en vous remerciant d’être une communicatrice ouverte, franche et sans détour! Vos billets inspirent, suscitent des réactions, dérangent, mais ne laissent jamais indifférents.

Merci!

Au plaisir,

Le concept de vie privée en ligne, back to the future

Le concept de vie privée et son évolution dans le temps est depuis quelques années intimement reliées au Web. Avec raison, plusieurs instances gouvernementales d’ici et d’ailleurs, se questionnent et légifèrent afin de limiter l’exploitation qu’en font ou que peuvent en faire les diverses organisations qui peuvent ou font la collecte de données personnelles.

À ce propos, je félicite bien bas ma cliente, amie et collaboratrice de dossiers clients communs, Me Eloïse Gratton, dont l’ouvrage capital “Understanding Personal Information: Managing Privacy Risks” (LexisNexis 2013) vient d’être cité à deux reprises dans un jugement de la Cour suprême du Canada (union free expression rights trump privacy concerns: Alberta PIPA unconstitutional ).

Mais pour revenir à la question de la frontière fluctuante de la vie privée, j’attire votre attention sur un récent article de Don Peppers Privacy: A “Boomer” Concept Soon Outdated? Il y dit:

Obviously, different people have different views about privacy, but there’s also a distinct and overtly obvious age gradient to it. The older you are, in general, the more likely it is you’ll be worried about your personal privacy. Baby Boomers seem to be all aflutter over the issue, but for most of us in the Millennial generation, privacy protection is practically a non-issue. Just try to start a conversation with a 20-something about how “scared” they are of having their privacy violated. You’ll likely get a “WTF?” look, but not much more. (And yes, I consider myself a mental-age Millennial, even if my chronological age disqualifies me.)

More important than a company having personal information about you is what they do with it. Increasingly, transacting in any sphere requires the exchange of digital data – personal information that is used to make a product or service more relevant, and to save the consumer from having to re-input information over and over again. But this data, like any other data, can be stored, analyzed, exploited and re-used, virtually forever.

This is certainly one reason people are demanding more and more trust from the vendors and others they deal with. One way I illustrate proactive trustworthiness, in my presentations, is by pointing out that Amazon will remind me that I already bought a book I am about to purchase, before I make the mistake of ordering it again. And if I can trust Amazon to watch out for my interests proactively like this, then why would I be worried that they’re going to somehow pull a “Big Brother” with my information? Does not compute. On the other hand, if I didn’t trust them, then I’d only expose myself to the minimum possible extent. Why on earth would anyone deal with a business they can’t trust?

Il y présente donc l’évidence qu’en fonction de l’âge, la perception de ce qu’est la vie privée en ligne, varie grandement, que l’information personnelle transmise à une organisation peut grandement améliorer, au bénéfice du consommateur, l’expérience client et que cette expérience elle –même engendre de la confiance envers l’organisation. Il rappelle aussi plus loin dans son texte, que ces données personnelles sont traitées par des machines et que les machines se foutent littéralement de qui vous êtes.

De toute évidence le besoin de légiférer et de paramétrer l’usage des données personnelles est primordial. On n’a qu’à suivre les récentes péripéties d’Edward Snowden pour s’en convaincre. Par contre, l’assertion populaire que « tout le monde sait qui vous êtes et ce que vous faites sur les médias sociaux » est souvent grandement exagérée. Et lorsqu’elle ne l’est pas, s’agirait-il simplement d’un retour dans le temps? Je vous rappelle que les grandes villes déshumanisent le citoyen, qui ne sait rien souvent de son voisin immédiat. Par contre, le web lui nous ouvre la porte à ce que l’on nomme le village global. Nous savons beaucoup de choses d’une personne à l’autre bout de la planète en ignorant tout de notre voisin physique. L’expression « village global » n’est pas anodine puisqu’il y a à peine 100 ans, nous vivions dans des villages et chacun des habitants savait tout de ses voisins. On dit d’ailleurs que cette proximité engendrait l’entraide, le support collectif et la valorisation que chacun avait un rôle à jouer dans la société. Même l’idiot du village et le mendiant étaient pris en considération. Chaque maison avait même son banc de quêteux à l’entrée des demeures.

Je vous rappelle aussi qu’il existait un instrument qui rendait disponible à la planète entière, vos noms, prénoms, adresse physique exacte et numéro de téléphone. Cela est presque impensable aujourd’hui. On appelait pourtant cette technologie « le bottin téléphonique ».

Alors la prochaine fois que vous « ferez des boutons » avec la peur que vos données personnelles soient en ligne, songez que c’est vous-mêmes qui décidez ce que vous partagez (ou pas) et qu’il y a certainement quelques très petits bénéfices possibles à ouvrir un tant soit peu, un pan de notre vie privée en ligne…

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Primeur : Le chantage des services secrets américains pour contraindre les entreprises canadiennes à coopérer

Il y a plusieurs mois de ça, bien avant le scandale de PRISM et de la NSA, je discutais avec l’un des dirigeants d’une entreprise d’importance québécoise. Nous discutions de big data, du patriot act et de divers sujets technos. Puis il me confiait qu’il arrive que les services secrets américains débarquent avec leurs gros sabots pour exiger sans mandat, l’accès à des données confidentielles d’individus ou de sociétés canadiennes soupçonnés par exemple, de terrorisme. L’entreprise québécoise fait valoir que c’est au SCRS d’exiger ce genre d’information et qu’ils n’ont aucune juridiction en sol Canadien. C’est alors que les menaces se font on ne peut plus clair.

-Si vous ne coopérez pas avec nous, tous les dirigeants de votre entreprise deviendront « persona non grata » en sol américain. Ou vous coopérez, ou vous ne serez plus les bienvenus et vous ne pourrez plus faire affaire avec les États-Unis d’Amérique.

Disons que les principes de droits, d’équité et de transparence viennent de prendre le bord de manière assez cavalière…

Et à ce que je sache, le gouvernement canadien, le ministère des affaires étrangères et le SCRS, ne s’en mêlent pas. Ils préfèrent laisser gérer l’odieux de la situation aux entreprises canadiennes. C’est pitoyable…

MAJ

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Toutes les entreprises doivent-elles être sur les médias sociaux?

Hier soir je donnais de mon temps dans un cours du pote Claude Malaison à L’université de Montréal, pour une session de questions/réponses avec ses étudiants. L’une des étudiantes me demanda si toutes les entreprises se devaient d’être sur les médias sociaux? Je lui répondis que ce n’était pas facile de répondre à cette question puisqu’il fallait d’abord déterminer les besoins et objectifs d’une présence sociomédiatique d’entreprise. (Petit aparté ici pour remercier la traductrice Marie Saumure qui a inventé ce joli néologisme sociomédiatique.) Puis je lui fis une boutade en disant que je n’avais absolument rien contre les ermites qui vivent dans le bois sans téléphone ou électricité.

Par la suite, j’ai repris aussi mon analogie du téléphone. Est-ce que les entreprises ont besoin du téléphone et qui dans l’entreprise devrait avoir un téléphone? C’est certainement simpliste comme analogie, quoique de plus en plus d’observateurs notent que justement les médias sociaux deviennent « le nouveau téléphone » du XXIe siècle. D’ailleurs deux articles lus ce matin confirment justement cette observation.

Dans un article de Forbes What Would Happen If America Got Free, ‘Nationwide’ WiFi? Google Wins, Carriers Lose, on peut lire :

Now for the advocates. Google and Microsoft are both part of the Wireless Innovation Alliance, a support group for the FCC’s initiative which also includes Dell and the New America Foundation. Google stands to benefit significantly if more people start using its services to browse the web over sprawling, free WiFi networks, or make phone and video calls calls via free services Google Voice or Google Hangouts.

Google has said publicly that mass, free WiFi would spark an explosion in innovation. Of course it would also lead to a bigger financial opportunity for selling ads, both through search or in other innovative ways. Just imagine what faster, nationwide WiFi could mean for live broadcasts online, via Google Hangouts, which could include nationwide ads that are “televised” over that the Internet to tablets and smartphones.

Je vous rappelle ici que Google Hangouts est l’une des applications de Google +, le récent média social de Google. Je vous rappelle aussi qu’en plus de pousser la FCC Américaine pour un WiFi national gratuit. Google a aussi mis sur pied le fameux Google Fiber qui lui aussi vient jouer dans les platebandes des fournisseurs internet et augmentera encore sensiblement la portée et l’utilisation des médias sociaux.

Le deuxième article dont je prends connaissance ce matin est justement Does Your Startup Need A Social Media Expert? Five Questions To Find Out. L’auteur reprend l’analogie téléphonique ainsi :

Little over 125 years ago small business owners around the world were debating the merits of a new technology that was heralded as a revolutionary tool that would change the business world forever. With this new tool marketing, customer service—and most importantly, sales—would occur at lightning speed. As such, entrepreneurs were scrambling to get their hands on this miraculous service called the telephone.

These days the desktop telephone has passed beyond common and is now the grandfather of corporate communication in most businesses—at least those that have finally given up on the fax machine. But in companies large and small “social media” has taken the place of the telephone (and more recently, the Internet) as the revolutionary business tool du jour—it’s even been called the “new telephone”–and experts believe it’s here to stay.

En conclusion

Toutes les entreprises ont certainement de potentiels bénéfices à utiliser les médias sociaux. Mais ces bénéfices seront tributaires d’abord d’objectifs d’affaires et des besoins spécifiques de chacun. Je donnerai deux exemples tirés de mes billets. Tout d’abord de Pourquoi Twitter est supérieur à Facebook dans une optique de marketing et relations publiques?

À ce propos, j’ai un nouveau client qui est guide de chasse à l’ours noir. Une requête « bear hunt » dans Twitter (ou l’un des très nombreux outils de recherches externes à twitter) fait apparaître rapidement des centaines de clients potentiels et d’interlocuteurs (et de détracteurs) vivement intéressés par le sujet.

Puis dans À propos des médias sociaux et des petits :

À la suite de mes rencontres avec Michelle Blanc, consultante en réseaux sociaux, j’ai choisi la formule Blog comme principale présence web de Piano Technique Montréal. Vous pouvez y lire des articles, vous y trouvez des photos, des extraits vidéos, des extraits sonores, et vous pouvez intervenir en commentant les articles ou en posant des questions. Ce que que vous y apprenez fait de vous un client plus avisé, et l’intérêt que vous y portez contribue au fait que le positionnement de l’entreprise soit excellent dans les résultats de recherche.
Je partage volontiers mon enthousiasme pour les réseaux sociaux, vecteur important de la prospérité de mon entreprise et de mes relations sociales. C’est donc grâce à mon blog que plusieurs de mes clients me trouvent. Grâce aux réseaux sociaux, je suis activement en lien avec des amis, des collègues, des fournisseurs, des inspirateurs, comme jamais auparavant, et j’aime ça ! La culture de générosité et de transparence qui y règne me plaît

Oui les médias sociaux me rendent triste parfois et sont peuplés de trous de cul

Mise en contexte

Ce billet n’en est pas un d’apitoiement. Ce billet est une fenêtre ouverte sur une réalité difficile que je vis au quotidien. Je le mets en ligne parce qu’il faut que ça se sache. Je le partage parce que mon style de vie numérique et maintenant publique, en a toujours été un de transparence et d’authenticité et que ça inclut très souvent du positif (dans ces cas on me traite de narcissique) et quelquefois du négatif (alors là je joue les victimes). Quoi que je fasse, ou ne fasse pas, je serai toujours jugée. Alors aussi bien faire quelque chose pour que l’intimidation, le mépris ou l’insulte, fassent aussi partie de mon corpus et se sache. Non le monde il n’est pas rose et oui des trous de cul, il y en a à la tonne.

Cet automne, à cause du mépris ouvert que je vivais dans ma vie de tous les jours et sur les médias sociaux, je suis retournée consulter un psy. C’est que je m’étais rendu compte que je devenais agressive et que je ne contrôlais pas cette agressivité qui sortait un peu n’importe quand et n’importe comment envers des gens ou des situations qui ne le méritaient de toute évidence pas.

J’ai compris que la colère était en fait le couvercle que je mettais par-dessus une autre émotion, plus profonde, de laquelle je me protégeais. Cette émotion est la tristesse. Comme je ne peux pas être continuellement connectée sur cette tristesse et que je suis d’un caractère plutôt jovial, la colère était cette soupape de protection. Sauf que maintenant, j’ai accès à cette tristesse et elle m’accompagne désormais, malgré moi.

J’ai appris divers trucs de gestion de celle-ci. J’ai aussi été bombardée de ces bonnes intentions et de ces vieux dictons comme :
-Never feed the troll
-Les chiens aboient la caravane passe
-La pluie des insultes n’atteint pas le parapluie de mon indifférence
-Ceux qui méprisent les trans sont des homo non avoués
-Les insultes c’est le signe le plus évident de la réussite
-Ce ne sont que des jaloux et j’en passe

On me dit aussi de ne pas le prendre personnel. On me fait des fleurs. On me traite aussi de salope qui joue à la victime. Je ne suis qu’une profiteuse qui a fait de sa transition un « stunt » marketing et si je réussis aujourd’hui, c’est parce que j’ai changé de sexe. Je pourrais continuer encore comme ça longtemps. Il y a autant de raisons de me crisser des insultes et du mépris qu’il y en a pour que ça m’affecte et que ça laisse des traces douloureuses.

Question de vous mettre tout ça en perspective, voici certaines insultes choisies, découvertes hier, grâce à un connard anonyme qui voulait être bien certain que je ne rate pas le défouloir collectif à mon endroit et qui a été assez vicieux pour le publier sur le mur de ma page Facebook. Question d’être certain que j’en prenne connaissance et que ça me fasse mal. Ça a débuté par un status de Mathieu St-Onge sur son mur Facebook et c’est dans les commentaires qui suivent (et qu’il cautionne en ne les modérant pas) que ça dérape gravement.

Mathieu St-Onge

J’ai lu le livre « Médias sociaux 101 » de Michelle Blanc, qui se positionne comme étant la « Gourou des médias sociaux du Québec ». J’ai jeté un oeil à sa page facebook officielle, pour vérifier si le contenu était à la hauteur de ce titre présomptueux.

Constat: elle parle de son rhume comme n’importe qui. Ben coudonc… elle avait besoin d’en parler faut croire. Ça me donne presque le goût de faire une suite à ce vidéo que beaucoup d’entre vous ont déjà vu:

Malik Mehni Durant le conflit étudiant il m a bloqué de sa page….il supporte pas les eusti de carré rouge

Gabriel Therrien des que tu t’autoproclame quelquechose, sois tes bon en criss ou tu ferme ta yeule

Malik Mehni un expert de mé2…sociaux ouai !<

Tan Gerine Peulaille… Quand c’est pas des statuts de grippe, c’est des statuts sur son OSTI DE CHIEN LAITE.

Josée Touchette Est-ce que tu le sais que tu viens d’entrer en guerre contre elle ?
J’peux t’en parler longtemps et Simon Jodoin aussi pourrait t’en parler longtemps! Au fait son 2ème livre est un flop total les librairies ont même retiré des quantités.

Nicolas Xyno Allaire T’est généreux de dire “elle” ! lo

Ma toujours me marrer de se video !!! http://www.youtube.com/watch?v=owCcjoPo5C4

Frédéric Dénommé [ J’aime bien suivre Michelle mais elle parle presque juste de son chien pis ses recettes pis son Bailey’s ces temps-ci .. Remarque c’est mieux que quand elle parlait avec moult détails de son opération je suppose.. ]

Frédérick Sirois osti s’t’un homme.

Pascale Raymond Et qui peut oublier sa fameuse vaginite…

Jean-Gabriel Rioux elle met des # dans des posts facebook
#jeNeConnaisRienDesRéseauSociaux Page officielle de Michelle Blanc

Josée Touchette Pascale c’est sa vaginite qui l’a fait connaitre des non-noobs qui avait pas besoin de ses conseils. Pour les hashtag c’est qu’elle utilise ah pis de la marde qu’a se défende toute seule la calisse !

Frédéric Lalonde J’en déduis donc que n’importe qui peut être considéré comme un expert des médias sociaux? #captainobvious

Jean-Dominic Leduc Go. J’ai payé 30$ pour lire son torchon de pseudo spécialiste patenté du web. Si seulement elle appliquait ses propres théories au lieu de parler de ses vaginites…

Anne Guilleaume Ben si, ça se voit : il/elle a pas updaté ses accords de participes.
David Malo J’ai du sable dans mon vagin

Mic Maye Stu Elle qui est UN Gars ?

Nicolas Xyno Allaire Yes it is Mic Maye !

Matthieu Bonin Reseaux sociaux 101 : Les insultes sur le web Font parti de la game. Ceux qui s’en Choque/froisse ou qui ne les tolères pas et qui en plus essai d’en profiter pour passer pour de pauvre Victime, ne sont tout simplement pas à leur place sur le web et sont des Pogo à mes yeux.
Pierre-Luc Goyette Watch out, the dick is comming with !!!

Michelle Blanc Complet ha je me positionne comme « Gourou des médias sociaux du Québec »? Elle est bonne celle-là. Que mon éditeur, la presse, les médias électroniques le fasse c’est une chose, mais que je me positionne, une autre. Par ailleurs oui je revendique le droit d’être quelquefois insipide. J’ai déjà écrit là-dessus (faudrait sans doute me lire) À propos de la pertinence des statuts Twitter, Facebook Google Et Autres https://www.michelleblanc.com/2012/02/13/pertinence-statuts-twitter-facebook-google-plus/

Michelle Blanc Complet je vous souhaite tous d’ailleurs de ne recevoir personnellement que le quart des insultes que vous m’écrivez ici. Peut-être alors que vous aurez plus de respect pour autrui…

« La psychanalyse est un remède contre l’ignorance. Elle est sans effet sur la connerie. »
de Jacques Lacan

« J’ai compris pourquoi les stars sont payées si cher. C’est parcequ’elles doivent endurer toutes les conneries qu’on peut écrire sur elles. »
de Leonardo DiCaprio

Mathieu Bock-Côté, François Legault et Twitter

C’est dans sa chronique François Legault et Twitter que Mathieu Bock-Côté polémique à propos de l’utilisation non judicieuse de Twitter par monsieur Legault. Il y dit :

(…)Désormais, il y commente la vie quotidienne. Sur Twitter, il bavarde. De la série télé qu’il écoute son soir de congé. De la poutinerie près de chez lui où il semble avoir ses habitudes. Je devine la suite: le prochain match des Canadiens?

Il se peut que je sois seul. Mais je ressens devant cela un certain malaise. Un homme politique ne devrait pas jouer de cette vraie-fausse intimité pour racoler les électeurs. En fait, les hommes politiques devraient se rappeler qu’ils doivent surplomber la cité, et non pas s’y fondre.

(…)
L’idéologie de la transparence absolue va trop loin. Elle brouille les distinctions entre le domaine privé et le domaine public. Elle encourage un populisme un peu étrange où la politique perd de sa noblesse pour devenir un concours de popularité.

J’aime rappeler cette formule du général de Gaulle (oui, j’aime de Gaulle): il n’y a pas de grandeur sans mystère et de mystère sans distance. Cela veut dire qu’une certaine réserve n’est pas de trop pour celui qui veut occuper les plus grandes fonctions.

Pensons seulement à René Lévesque. Si tout le monde le tutoyait, lui-même vouvoyait ses interlocuteurs. Il était près du peuple par ses préoccupations. Et par son attachement aux gens ordinaires. Par son style dépenaillé aussi. Il gardait avec tous, pourtant, une saine distance.

Je suis tout à fait opposée à la conception de Twitter de M. Bock-Côté

Depuis déjà 5 ans, j’écris à propos de Twitter et des médias sociaux et je discute de la dimension « conversationnelle » de ces médias. J’y prône qu’une approche « conversationnelle » doit inclure du sérieux et du badin en plus d’engendrer une certaine bidirectionalité. Il est évident qu’à partir de plus de 1000 abonnés, l’individu qui est sur Twitter risque fortement d’user de ce médium plus en mode « broadcast »(d’un un à plusieurs) qu’en mode conversation (de un à un). Mais comme le fait monsieur Legault, il peut toutefois répondre directement à ceux qui l’interpellent sur Twitter. C’est ce que fait aussi monsieur Denis Coderre qu’on s’amuse aussi à critiquer parce qu’il serait « trop bavard et personnel » sur les médias sociaux. Je plaide tout à fait le contraire de ça. Monsieur Coderre a eu une croissance exceptionnelle de sa couverture médiatique, depuis qu’il est sur Twitter (je n’ai pas de stats à ce sujet, mais je suis convaincue qu’une recherche permettrait de le confirmer). Il a compris que bien des journalistes, recherchistes et médias y sont. Il a aussi compris que s’il ne faisait que de parler du Parti Libéral du Canada, ça ferait longtemps que plus personne ne le suivrait. En parlant aussi de sa passion, il devient « humain » il devient ce « parfait voisin » dont parle avec déférence monsieur Bock-Côté dans sa chronique, qui cite plutôt de Gaulle, Lévesque, Trudeau, Parizeau et Bouchard qui selon lui,  avaient une « saine distance » avec le petit peuple.

Je pourrais lui répondre qu’au contraire je perçois Obama, Gandhi, Luther-King ou Mandela comme ayant été des gens près du peuple. Je ne peux prouver ces dires pour tous, sauf pour Obama qui a maintes fois, entre autres à l’aide des médias sociaux, établi des contacts directs avec la « population ordinaire ». Entre autres, il a récemment fait une assemblée de cuisine avec des citoyens un utilisant le Hangout de Google + (il a aussi fait la même chose sur Facebook et YouTube). De cette de proximité avec « le parfait voisin présidentiel », on peut lire chez CNN :

The president was also asked to sing and dance, (which he refused) to say hello to one of the questioners’ young children, and from an Obama impersonator a question about the impact of comedy sketches on the election.

“I don’t know if any of this stuff affects an election, but I know that it makes our country stronger that you can make fun of the president — or anybody — and everybody can get a laugh,” President Obama said. “And that also makes sure to remind me that I work for you guys.”

Ma critique médias sociaux de messieurs Coderre et Legault

Des deux hommes politiques Legault et Coderre, je n’ai qu’une critique que je leur ai déjà faite dans le blanc des yeux (dont dans une vidéo avec Monsieur Legault). Ils n’ont pas de blogues. Nous n’avons pas réellement accès à la profondeur de leur réflexion politique. Twitter et Facebook c’est très bien pour engendrer la proximité avec le citoyen. C’est même capital si on veut un jour arriver à une démocratie réellement participative (dans le sens de ce que fait déjà Obama avec plusieurs initiatives de données ouvertes, Code for America ou autre), mais d’avoir un blogue est ESSENTIEL. C’est à mon avis ce qui fera la différence entre un politicien sympathique et un politicien qui a réellement quelque chose d’important, de songé et de documenté à dire.

L’auteur Jeff Lerner de ClickZ dans son article How Politicians Should Use Twitter semble tout à fait d’accord avec mon point de vue.

Where’s the Personality?
I challenge you to find a blander group of Twitter accounts than those of politicians. Twitter is a medium that exists, in part, to showcase individuality. But political Twitter accounts with personality are few and far between. Still, it just makes too much sense for politicians to take advantage of this – and yet they don’t. After all, what group of people – with a long-standing reputation as rigid, robotic, and boring – would benefit more from getting to speak to millions of people through a medium designed to give them an opportunity to let people see them in a more personal light? Twitter isn’t a presidential debate or a CNN interview; it’s a chance to tell your voters and potential voters that you were scraping gum off your shoe five minutes before a press briefing. Is that important to a candidate’s stance on issues? Nope. But it serves a purpose that’s arguably just as important to winning an election: it’s a chance to connect with real people, as a real person.

Vous pourriez aussi aimer
Chez GigaOm : How Twitter lets politician route around the media
le texte de l’OCDE : Engaging Citizens in Policy-making : Information, consultation and public participation (PDF)
ou mon billet À propos de la pertinence des statuts Twitter, Facebook Google + et autres

MAJ

En guise d’arguments additionnels pour monsieur Bock-Côté, voici de mes archives quelques billets additionnels, qui assaisonnent judicieusement mon propos. Du moins, moi je le pense…

Savoir déconner

Avis à mes détracteurs, La conversation, c’est de jaser…

Une leçon de vie, à l’article de la mort

Le Lab VOXtv – Chronique : tatouage numérique, identité numérique, déconnage et connerie sur le web

De l’importance du pâté chinois dans une stratégie médias sociaux

À propos du bruit dans Twitter

Bilan de mes rencontres avec les chefs des partis et leur vision du numérique

Cette semaine j’ai mis en ligne (par ordre inverse de leur rencontre) mes entrevues avec Pauline Marois, Amir Khadir Jean-Martin Aussant, Jean Charest et François Legault et nous discutions de l’économie numérique, des médias sociaux et de l’open source.

Tout d’abord ce qui m’a frappée de ces rencontres est l’affabilité des chefs. Ils étaient tous vraiment gentils et accessibles. Il est vrai que je ne suis pas journaliste, qu’ils me connaissaient déjà et qu’ils savaient que je ne cherchais pas à les coincer. N’empêche que leur ouverture et leur jovialité m’a grandement surprise.

J’ai aussi été surprise par leur manque de connaissance de l’impact majeur du numérique et des technologies de l’information sur l’économie du Québec. Tous ont été surpris d’apprendre que les TI génèrent plus de revenus pour le Québec que le tourisme. À ma question êtes-vous pour l’établissement d’un ministère du numérique

Monsieur Legault fait passer le numérique par le 50 millions d’investissements dans la culture de sa plate-forme électorale (c’est donc un investissement par la bande). Il est pour l’instauration de l’open data comme mécanisme de transparence gouvernementale et aider les entreprises qui ont du rattrapage à faire (notamment en commerce électronique) via investissement Québec. Pour ce qui est d’avoir un ministère du numérique, il pense que c’est une bonne idée. Concernant le renouvellement des licences Microsoft (1,2 milliard) il est ouvert aux solutions open source et va regarder sérieusement la question (incluant l’octroi de certains contrats douteux aux petits amis).

Monsieur Charest, concernant le rapport Gautrin, les circonstances et les événements (sans que je sache lesquelles) ont fait en sorte que son premier rapport n’a pas été implanté. Pour le deuxième rapport, il veut l’implanter progressivement, mais note que c’est un changement de culture majeur au gouvernement du Québec. Il veut instaurer des tableaux de bord permettant une plus grande limpidité de la gestion des projets gouvernementaux pour les citoyens et modifier les types d’appels d’offres pour inclure les plus petites entreprises et développer des expertises en open source. Concernant un ministère du numérique, le plan nord permet entre autres de développer le numérique et le gouvernement manque d’expertise par rapport aux Technologies de l’information. Mais le rapport Gautrin a bien mis la table et la création d’un ministère spécifique est une chose qu’ils vont probablement regarder s’ils sont le prochain gouvernement.

Monsieur Aussant m’a grandement surprise lorsqu’il a déclaré avoir reçu un million de visites sur son site web la journée du débat des chefs, à cause de sa présence sur Twitter. Un million de visites sur un site Web, c’est vraiment, mais vraiment très surprenant. Il est aussi pro open source, trouve qu’un ministère du numérique est une excellente idée, il veut brancher le Québec (et les régions en particulier) sur l’internet haute vitesse (lire ici la vraie haute vitesse avec comme exemple celle de l’Europe) et il veut que la commission Charboneau se penche sur les contrats informatiques gouvernementaux douteux.

Monsieur Khadir semblait réellement dépassé par mes questions sur le numérique, il se dit trop vieux pour s’intéresser à ces questions. Il n’en a pas discuté avec ses membres et la réflexion doit venir d’abord de sa base. Si on veut que Québec Solidaire ait une position, il faut la soumettre à son assemblée, même si on n’est pas membre de ce parti. Par contre Québec Solidaire a signé le pacte du logiciel libre.

Madame Marois va respecter les engagements pris par l’ancien gouvernement quant à l’octroi des contrats informatique (dont le 1,2 milliard pour mettre à jour les licences Microsoft), mais le ministre du Conseil du trésor aura un mandat de regarder attentivement ce contrat. Son ministre du développement économique aura un mandat spécifique de développer le numérique en prenant comme base le rapport Gautrin, mais il n’y aura pas de ministère pour le numérique.

MAJ

Ma conclusion

Comme je le disais dans le billet de mon premier entretien

Mes buts dans ces échanges étaient d’abord de sensibiliser les chefs à l’importance de l’économie numérique et à la nécessité de développer « un plan numérique pour le Québec ». Vous remarquerez qu’ils y répondent sans vraiment avoir cerné l’importance de cet enjeu économique et sociétal majeur.

Les chefs semblent donc complètement déconnectés des réalités de l’économie numérique au Québec. Ce n’est vraiment pas rassurant comme perspective sociétale. Je suis triste et amère de ce constat, mais j’ai la satisfaction d’avoir ouvert le débat auprès d’eux et je rêve que certains parmi vous les talonnent pour qu’un jour, nous puissions nous targuer d’être une société innovante à ce chapitre. Bonne élection à tous et que le meilleur candidat pro numérique (qui ne semble pas être dans les choix que nous avons) gagne…

Vous aimerez aussi sans doute mon billet

Pourquoi est-il important de se questionner sur l’économie numérique?

Et mes entrevues avec
Choi RadioX

La radio de Radio-Canada Québec

Pourquoi est-il important de se questionner sur l’économie numérique?

Je suis interpellée par Marie-Claude Ducas dans son billet La campagne 2012 et le mirage de « l’élection 2.0 ». Elle y dit :

consultante et blogueuse bien connue Michelle Blanc (d’abord avec le chef libéral Jean Charest, ensuite celui de la CAQ François Legault, puis avec Jean-Martin Aussant d’Option Nationale ) je veux bien. Et c’est sûr que, comme plusieurs le soulignent, comme l’a fait, dans ce billet, le spécialiste René Barsalo , il faut s’intéresser à autre chose qu’aux routes et aux ressources naturelles quand on parle de développement économique. Mais… pourquoi serait-ce tellement plus pertinent que si les patrons d’agence de pub allaient demander aux candidats « ce qu’ils comptent faire à propos de l’économie de la publicité »? Ou les comptables, s’enquérir de leur opinion « à propos de l’industrie des firmes de comptabilité et de consultation »? Pourtant, ce sont des enjeux économiques au moins aussi valables : il y a eu bien des fusions et des rachats, récemment, dans ces deux domaines; idem parmi les bureaux d’avocats, d’ailleurs.

Ma réponse

Se questionner sur l’économie numérique est plus pertinent que se questionner sur l’économie de la publicité ou de celle de la consultation strictement parce que le numérique touche toutes les sphères de l’activité humaine, que ça représente 25 milliards de revenus pour le Québec (à l’heure actuelle et avec 40 000 emplois), que ça participe de l’économie du savoir et que comme pour l’électricité qui a permis un gain de productivité énorme pour toutes les industries, le numérique engendre les emplois et la “valeur économique” du XXIe siècle. Déjà en 1994 Nuela Beck parlait de la nouvelle économie et de comment la “valeur” avait transité des biens matériels aux biens immatériels. On a qu’à penser à la valeur de Facebook, d’Apple, d’Amazon et autres pour s’en convaincre. Malheureusement ce ne sont pas les banques qui capitalisent sur ces “valeurs intangibles” mais plutôt les fonds collectifs de placement. Ils sont ceux qui désormais (et depuis le tournant des années 2000) ont l’avoir collectif du capital…

La nouvelle économie de Nuela Beck (1994), Résumé

L’économie nord-américaine subit depuis nombre d’années une transformation radicale. Nuala Beck indique le sens de ces bouleversements et montre les chemins de l’avenir. Affirmant que les statistiques sous-estiment les forces motrices qui animent les industries nouvelles, l’auteure distingue trois cycles: celui des matières premières a dominé la révolution industrielle, celui de la production de masse a alimenté l’ère de la consommation et de l’automobile et la technologie domine le cycle actuel.

Dans La nouvelle économie, Nuala Beck présente le prochain cycle qui nous entraînera dans l’ère de l’intelligence artificielle, du génie génétique, de l’espace et des matières premières nouvelle génération.

M. Barsalo qui est aussi cité par madame Ducas dit avec raison dans un billet du Journal de Montréal, Notre avenir… numérique? :

La triste réalité est, qu’au tournant historique de notre civilisation vers le numérique, aucun des partis présents ne prends cette opportunité au sérieux. Les routes, les ressources naturelles et l’administration des services publics sont pour eux les seuls « vrai » enjeux. Pourtant, les deux sont inter-reliés. En termes d’infrastructures, l’accès au code via un réseau qui relie adéquatement l’ensemble du territoire, ses institutions, ses entreprises et ses citoyens est aussi important que l’eau courante et l’électricité dans la société qu’y émerge. En termes de réduction des coûts, l’utilisation du numérique en matière de planification, de suivi ou de réalisation permet d’assurer une meilleure gestion des ressources et des budgets tout en augmentant la qualité des biens et services.

En abordant de front la question de l’informatisation et de l’ingénierie en réseau des services publics, en partenariat avec le citoyen et l’entreprise privée, nous pourrions initier un chantier numérique dont le Québec entier sera le premier bénéficiaire. Mais avant de dépenser, il faut réviser le processus d’appels d’offres de projets informatiques. Tout comme celui de la construction, on y remarque depuis quelques années des dépassements de coûts vertigineux.

Le meilleur moyen d’assurer ce changement est de mettre de l’avant l’ouverture et la transparence, si chère à la génération des natifs du numérique qui n’attends que ce signal pour s’impliquer. Patenteux comme nous le sommes, avec la mise en place d’un tel chantier, nous pourrons non seulement améliorer notre société et réduire les coûts de l’État, augmenter le niveau de transparence et l’implication citoyenne, mais aussi créer au passage une avalanche de nouvelles entreprises technologiques, équipées pour affronter l’avenir plutôt que de creuser des trous. Dans toutes les régions, unis par le réseau, celles-ci profiteront du succès collectif et exporteront leur savoir faire au reste de la planète, tout en participant à notre croissance économique.

MAJ

En commentaire, Martin me dit ceci :

Vos statistiques reliées à l’économie numérique parlent d’eux mêmes… mais pouvez vous mentionner vos sources car des chiffres sans références peuvent perdre de leur crédibilité… malgré le fait qu’ils proviennent d’une plumes aussi respectée que la votre.
Merci et continuer de vous faire entendre!

Il a raison, mais ça fait TELLEMENT de fois que je montre ces statistiques que je tiens pour acquis qu’elles sont connues et il semble que ce ne soit pas le cas. Donc ces statistiques sont colligées dans mon billet Le Tourisme vs Les TIC au Québec, met-on nos œufs dans le bon panier?

je citais Paul Journet dans l’article Le tourisme québécois sévèrement critiqué qui disait aussi ceci :

L’industrie touristique représente 2,5% du PIB du Québec. L’année dernière, elle a rapporté des revenus de 10,4 milliards et fourni 134 600 emplois directs.

Or, je me suis amusé à comparer l’industrie du tourisme à celle des Technologies de l’information avec les chiffres que donnent Affaires étrangères et Commerce international Canada

Le secteur des TIC est un moteur de l’économie du Québec, puisqu’il génère des ventes de plus de 25 milliards de dollars. Ce secteur, qui compte quelque 5 000 entreprises dans la province, emploie approximativement 140 000 personnes. La production des TIC est en grande partie exportée (surtout vers les États-Unis) et représente 35 % de la production totale du Canada dans ce secteur.

Si je récapitule ces chiffres, l’industrie du tourisme génère 10,4 milliards et fournit 134 600 emplois et celle des TIC 25 milliards et 140 000 emplois