#Crisedesmedias Les multiples causes d’un certain déclin des médias imprimés

Comme vous le savez, le Groupe Capitales Médias s’est prévalu de la loi de protection des créanciers. Vous avez sans doute vu aussi que La Presse + demande aussi une nouvelle aide au gouvernement pour protéger sa survie. Très rapidement on pointe du doigt les Gafa qui ne payeraient pas leurs dus aux médias imprimés. C’est tout à fait vrai, mais ce n’est pas la seule explication des débâcles de cette industrie.

En fait, la presse est loin d’être la seule industrie qui souffre des changements majeurs qu’engendre le numérique. On a qu’à songer aux musiciens qui depuis des années, souffrent de la diminution importante de leurs revenus de droits d’auteurs à cause du numérique, aux agences de voyages qui pour la plupart ont disparues, aux commerces de détail qui vivent des transformations, aux services bancaires et aux systèmes de paiements qui sont modifiés, au secteur du taxi, de l’hébergement, de la télévision et à plusieurs autres activités économiques qui sont ou seront touchées directement par cette transformation numérique de l’économie. Depuis bientôt 20 ans, je prêche dans le désert, pour que nos entreprises et nos gouvernements s’ajustent et soient pro-actifs à s’adapter et à adapter notre société à tous ces bouleversements. Malheureusement, autant les entreprises que les gouvernements sont en mode « réactifs » plutôt que « proactifs » et ils semblent toujours ébahis lorsque le train leur passe sur le corps.

Les autres facteurs qui ont un impact majeur sur les médias imprimés

Bien avant l’arrivée des GAFA, la presse écrite était déjà vampirisée par les nouveaux services d’information continue. Les CNN, BFMTV, RDI et LCN de ce monde ont pris une part de marché importante de la diffusion des nouvelles et des revenus publicitaires qui y sont associés. En outre, très souvent ils citent les « scoops » des médias écrits sans pour autant leur payer une rétribution pour le travail d’enquêtes qu’ils ont fait. Il arrive parfois qu’ils invitent les journalistes et leur versent un cachet pour discuter de leurs trouvailles. Mais les bannières pour lesquelles ils écrivent ne reçoivent pas un sou.

En fait, le Web vit une guerre des contenus. Que ce soit pour les nouvelles, la musique, la littérature, l’art pictural ou les films, les Gafa profitent des créateurs de contenus sans pour autant les rémunérer à la hauteur de la valeur de leurs contenus. Mais ils sont loin d’être les seuls. Les fournisseurs internet qui font fortune avec un service la plupart du temps médiocre à un coût exorbitant ne payent pas non plus leurs dus aux créateurs qui font vivre leurs business. Eux aussi devraient payer une part importante à ces créateurs qui les font vivre. D’ailleurs, au moment d’écrire ces lignes, la guerre des contenus fait rage entre les Netflix, Amazon, Disney et Apple de ce monde pour accaparer des parts de marché de la nouvelle télé numérique à la carte. Les câblos n’ont qu’à bien se tenir puisque les « cord cutters » dont je suis, leur feront bientôt très mal.

Les autres facteurs intrinsèques aux médias écrits.

Comme plusieurs autres secteurs industriels, le secteur de l’information est réfractaire aux changements, est souvent dirigé par des baby-boomers qui ne croient pas au numérique et vivent dans l’illusion de l’immobilisme. Pourtant, tout comme pour les agences de voyages, plusieurs ont disparu mais certaines ont réussi à prospérer malgré les tumultes. C’est qu’ils ont réalisé qu’une portion de leur business était devenu bancale.  L’agence qui vendait des voyages en avion Montréal-Toronto n’existe plus aujourd’hui. Par contre, les agences qui se sont spécialisées, qui vendent des forfaits difficiles à acheter en ligne à cause de leur complexité, font encore des affaires. Les autres ont disparu. J’ai d’ailleurs déjà écrit que le fait journalistique n’a plus de valeur. J’y disais :

Ainsi, les journaux qui nous répètent ce qu’on sait déjà, qui sont uniforme entre eux et qui ne peuvent se réinventer, risquent comme les agences qui nous vendaient des vols Montréal – Toronto, de devenir rapidement désuet…
(…)
À contrario, si le fait journalistique ne vaut plus rien, l’analyse, la réflexion, la valeur ajoutée et le journalisme d’enquête ont maintenant une grande valeur. Le lectorat de The Economist est en progression constante tandis que celui de The New York Times est en déclin constant.

D’ailleurs, les stratégies de The Economist, de the Atlantic ou de Vice Media ont toutes à voir avec « la valeur ajoutée » de leurs contenus et une stratégie qui embrasse le numérique et le multi-plateforme au lieu d’une démonisation du numérique et d’un retard majeur et inadéquat des stratégies numériques. C’est ce qui est expliqué dans l’article de Mashable (un autre fleuron journalistique de niche) Inside ‘The Atlantic’: How One Magazine Got Profitable by Going ‘Digital First’ .

L’un des autres aspects de la croissance du lectorat et des revenus en ligne est directement lié à la capacité des usagers de télécharger les contenus. C’est ce qui explique en partie, les problèmes que connaît La Presse + (comme je l’expliquais dans mon billet Les problèmes de La Presse+ et mon point de vue), et la croissance importante des médias Norvégiens en ligne.

Going digital: The booming Norwegian news business

Some of the reasons why Norwegians choose to pay for online news are the strong tradition of reading local news, as well as Norwegian’s high internet access. Also, Norway was early in making news digital – the first Norwegian newspaper went online in the late 1990’s.

Je me souviens d’avoir fait un audit pour la présidence d’un grand groupe de presse québécois et d’avoir été estomaquée du manque de vision numérique des dirigeants et de l’entreprise. Je vous mentionne aussi que j’ai longtemps été rédactrice dans le célèbre journal Les Affaires. Essayez de retrouver l’un de mes articles dans la version numérique et vous remarquerez, tout comme moi, que toutes leurs archives ont disparu. C’est qu’à chaque nouvelle mise à jour de leurs CMS (content management system), ils oubliaient le « jus » de leurs archives. Il en va de même de la grande majorité des journaux québécois.

La perte de la neutralité journalistique

Avec l’arrivée des blogues, les journalistes craignaient pour leurs emplois parce que les blogueurs étaient considérés comme « des voleurs de jobs au rabais ». Ironiquement, après avoir conspué les blogueurs, les médias se mirent tous à créer des blogues et à embaucher une armée de chroniqueurs. Ainsi, on trouve de moins en moins « de faits » et de plus en plus d’opinions. D’ailleurs, pas plus tard qu’hier, ironiquement, le chroniqueur d’opinion Steve E. Fortin écrivait dans le Journal de Montréal dans son billet Se regarder dans le miroir dans lequel il fustigeait « le journalisme militant » :

Il ne sert à rien de se mettre la tête dans le sable, le Québec est fracturé, idéologiquement. Sur la question constitutionnelle, jadis, et désormais sur les questions liées à l’identité, au nationalisme.
On le sait, une nette, claire majorité de la population appuie l’initiative – promesse électorale – de la CAQ de légiférer dans le sens de la laïcité.
On le sait aussi, une nette et tout aussi claire majorité de chroniqueurs, éditorialistes et analystes ont transposé les anciennes fractures constitutionnelles aux dossiers liés au vivre-ensemble, à la laïcité, à l’identité, au nationalisme.
Combien de citoyens au Québec, parmi cette majorité qui appuie, légitimement, la laïcité institutionnelle ont un jour décidé de tout simplement changer de fréquence radio, ou de média à consulter au petit matin, pour s’affranchir des discours moralisateurs, et même parfois méprisants, de la part d’une intelligentsia devenue étrangère à ses préférences idéologiques.
Étrangère et adversaire farouche.
On parle ici du côté «opinion» du mur de Chine, évidemment.
Mais quand un média enfile les reportages larmoyants d’adversaires de la laïcité et refuse de passer le micro, au sein de certaines collectivités dont on dit qu’elles contestent le plus ce choix de la nation québécoise, à celles et ceux qui appuient cette initiative, on est en plein «journalisme militant».
(…)
Mais on connaît la chanson, une petite clique bien-pensante au sein des médias québécois relaiera, re-tweetera et partagera ce qui «fitte bien dans le narrative» et portera à l’index le reste. À l’index ou l’indifférence.
Et le quidam, qui ne se trouve rien d’intolérant à appuyer, comme la grande majorité de ses concitoyens, la laïcité institutionnelle, se trouvera Gros-Jean comme devant, écœuré de se faire traiter de toutes les épithètes méprisantes.
Il changera de canal. Il fermera sa radio, ou la troquera pour autre chose. Il maudira le travail, pourtant essentiel, des artisans de l’info, à côté, de l’autre bord du mur de Chine, cette bande esseulée désormais, enterrée, trop souvent, par l’opinion (mea culpa).

De l’espoir

Mais rien ne se perd, tout se transforme. Ainsi, les journalistes qui perdront leurs emplois, en trouveront peut-être dans ces nouvelles industries du journalisme corporatif. Saviez-vous que Costco publie son propre magazine déjà depuis une couple d’années? Saviez-vous qu’il font une petite mine d’or avec ça? Étiez-vous au courant qu’ils facturent près de 10 fois le prix d’une pleine page à ce que les plus grands médias du Canada facturent?

http://www.costcoconnection.com/connection/media_kit?pg=12#pg12
advertising-rate-Costco

Ils sont loin d’être les seuls. Chez PRWeek, dans l’article As news organisations suffer, corporate journalism is booming, on apprend:

Cazenove, the asset management company, has a head of content from the Telegraph. Insurance broker Aon and HSBC have managing editors from CNBC and the Financial Times. Fidelity International’s editor-in-chief came from Thomson Reuters via the FT and ITN.
The lawyers at Freshfields Bruckhaus Deringer have a guy from The Independent.Hogan Lovells, another law firm, has a managing editor from the BBC.
It’s not all high finance and corporate law. LinkedIn shows that Sotheby’s has an editorial director from Wallpaper*; Harvey Nichols has a managing editor who worked at People; and the managing editor at Eve Sleep, which sells mattresses, came from Hearst and Northern & Shell.

Cette tendance est si lourde, qu’avec mon nouvel associé, David Martin, nous sommes à mettre sur pied une nouvelle compagnie de rédaction de billets de blogues et de contenus pour entreprise. Nous avons déjà un premier client même si le nom de notre entreprise, notre mise en marché et sa structure administrative légale ne sont pas encore tout à fait complétés. C’est dire l’opportunité que ce genre d’initiative va créer dans les prochains mois.

D’ailleurs, je vous en reparlerai prochainement et dans un prochain billet, je ferai une liste des solutions possibles…

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Discours d’investiture de la circonscription de Mercier de Michelle Blanc

 

Avant de remercier qui que ce soit, je remercie ma conjointe, Bibitte Électrique, qui accepte de me partager avec vous. Si je suis ici ce soir, devant vous, c’est en grande partie grâce à elle. C’est l’amour de ma vie. Depuis 24 ans, déjà, elle est là pour m’aider à grandir et à me réaliser davantage. Elle m’accompagne dans mes rêves, même celui, capoté, de faire de la politique. Elle accepte déjà et acceptera de moins me voir pour que je lutte activement afin de créer un monde meilleur pour notre petit-fils, pour les gens de Mercier et pour tous les Québécois.

 

Même si vous ne verrez que moi, je serai toujours deux devant vous puisque derrière une femme politique, il arrive qu’il y ait aussi une très grande femme. Elle ne sera jamais sur les gradins avec moi, puisque son travail requiert qu’elle reste la plus discrète possible pour être efficace dans ses fonctions. Je t’aime, ma chérie.

 

Vous me permettrez aussi de remercier :

 

  • Jean-François Lisée;
  • Jean-Martin Aussant;
  • Mon président de circonscription, Dominique Goudreault, et tous les membres de l’équipe de Mercier;
  • Je vous remercie aussi, chers militants et chers amis, d’être si nombreux, enthousiastes et déterminés à soutenir ma candidature.

 

Mais LA question que plusieurs se posent est : Pourquoi? De quessé?, comme disent certains potes. Qu’est-ce que tu vas faire en politique? Pourquoi quitter la quiétude de ton bois et la présence chaleureuse de tes amours, Bibitte et ta chienne Charlotte, et venir te battre dans Mercier, dans ce qu’on dit être LE château fort de Québec solidaire?

C’est que, voyez-vous, j’ai des rêves. Depuis plus de 15 ans, je suis en mission. Ces missions m’ont poussée à gueuler pour un plan numérique pour le Québec, à me battre pour la laïcité et à partager mon vécu de femme transsexuelle.

Je disais cet hiver, lors d’une conférence, que sur mon lit de mort, ce ne sera pas le cash que j’aurai fait ou mes nombreux succès professionnels que j’aurai en tête. Ce sera plutôt le fait d’avoir ouvert ma gueule pour partager ma transition dont je serai fière.

On me dit souvent : on dirait qu’il y a de plus en plus de trans. Et je réponds : non, il y a de moins en moins de suicides. Parce qu’ils me l’ont dit, je sais que plusieurs de nos concitoyens qui vivent parmi nous sont encore ici parce que mon histoire était la lumière au bout de leur tunnel. Et je suis fière de ça en maudit.

Mais, bon. Malgré l’étiquette que les médias aiment me coller à la peau, je suis la candidate spécialiste de l’économie numérique et des transformations majeures que vivent déjà mes concitoyens, à cause de la révolution numérique qui bouleverse absolument tout. Mais pour certains, je ne suis et ne serai que la trans qui se présente en politique. Même si ça fait déjà 10 ans que j’ai changé de sexe et que je suis une femme – et que ça c’est fait sous l’œil de ces mêmes médias. Certains diront aussi que je suis « colorée » parce qu’il m’arrive d’avoir le tabarnak, le côliss ou l’estie de criss facile. Mais, bon. Si c’est le prix à payer pour avoir sauvé des vies et pour avoir sonné les oreilles – entre autres d’un certain Philippe Couillard il y a 4 ans, lors de son Forum des idées –, je suis prête à vivre avec ça.

Il y a 14 ans déjà, j’aidais un certain Henri-François Gautrin à réaliser son premier livre vert sur le numérique pour le gouvernement du Parti libéral du Québec. Six ans plus tard, il en faisait un deuxième. Ces livres verts lumineux furent tablettés tellement profondément que la seule copie qui en restait se trouve maintenant en ligne, à l’UQAC

Ma collaboration avec M. Gautrin avait commencé parce que j’étais allée le voir pour lui dire que ça n’avait pas de bons sens qu’une maître ès sciences en commerce électronique – comme moi et mes trois associés de l’époque – ne puisse pas aider notre propre gouvernement, qui avait pourtant payé le gros prix pour faire de nous des tops mondiaux. Il trouvait que ça n’avait pas d’allure non plus, et il suggéra que pour les gros chantiers informatiques, on alloue 10 % des montants aux firmes-conseils de petite taille afin de les aider à grossir. Je lui avais expliqué que les firmes de TI n’avaient pas besoin de subventions; elles avaient besoin de contrats. Quatorze ans plus tard, cette excellente suggestion n’est toujours pas réalisée.

Il y a quatre ans, Philippe Couillard fit son Forum des idées – en passant, Jean-François, c’est sans doute l’une des trop rares maudites bonnes idées de Couillard, son forum des idées pour le Québec. Toujours est-il que M. Couillard avait fait venir des experts du numérique des quatre coins de la planète pour l’inspirer à faire quelque chose avec ça. Je faisais partie de ces experts. Comme j’étais sur le dernier panel et que, comme d’habitude, les libéraux sont souvent en retard, on m’a dit qu’il n’y aurait pas de panel, mais que j’avais 15 minutes pour dire ce que ça me tentait de dire au premier ministre. Ho que boy que je me suis fait plaisir. D’ailleurs, ce discours on ne peut plus improvisé est toujours en ligne. Cherchez « Michelle Blanc discours au forum des idées » sur Google et vous tomberez dessus.

 

J’ai été gentille. Je l’ai fait rire au début et à la fin. Mais, entre les deux, je blasphémai à propos de nos stupidités numériques collectives, dans l’espoir de le shaker assez pour qu’il se grouille le derrière. Quatre ans plus tard, je suis maintenant candidate du Parti Québécois. Vous comprendrez qu’en matière de « grouillage de derrière », ce n’était vraiment pas très fort. Mais en matière de grenouillage, là, wow, les libéraux se sont vraiment dépassés.

Je suis donc ici, ce soir, pour vous proposer un rêve, un changement, une révolution. J’ai ce côté un peu flyé. J’aimerais ça qu’on se fasse une sorte de « Baie-James du numérique ». C’est dans Mercier que Bourassa, le père de la Baie-James, a déjà été élu. Les gens de Mercier ont ça dans le cœur, le rêve. On les taquine souvent en disant d’eux qu’ils sont « la clique du Plateau » ou qu’ils vivent dans « la République du Plateau ». J’y vis aussi, dedans et autour du Plateau, depuis une trentaine d’années. Je me reconnais dans cette clique de flyés, de rêveurs et de poètes au grand cœur.

Je vous rappellerai que ma copine Nathalie Rochefort, ancienne députée libérale de Mercier, a appuyé publiquement ma candidature sur Twitter parce qu’elle aussi, c’est une flyée du numérique et qu’elle aussi, elle n’a pas la langue de bois. Je vous rappelle aussi un certain Gérald Godin – Jean-Martin Aussant m’a récemment envoyé un des poèmes politiques de M. Godin. Tout comme moi, il avait une grande ouverture à la diversité culturelle et, dans ses écrits, il avait aussi le blasphème facile. Mais, bon, pour certains journalistes, un blasphème écrit dans un recueil de poésie, c’est de l’art mais, si c’est sur Twitter, ça fait de toi une candidature problématique.

Mais, pour revenir au rêve, au changement, à la révolution, je vous demande de me suivre encore un bout.

 

Imaginez juste un instant un Québec différent. Un Québec dans lequel un médecin, grand spécialiste de Montréal, arriverait à offrir une consultation à un patient de Chicoutimi qui lui parle du confort de sa maison. Ce médecin, lui aussi, est assis dans son fauteuil à Westmount. La consultation se passe de façon virtuelle. D’ailleurs, présentement, aux States, il n’y a pratiquement plus de radiologues dans les hôpitaux. Ils travaillent tous de chez eux, et un radiologue est maintenant capable de fournir son expertise à trois hôpitaux à la fois.

 

Imaginez maintenant un fonctionnaire de Transports Québec… Bon, bon, bon, ne vous énervez pas. Je sais qu’avec la commission Charbonneau et les libéraux, Transports Québec n’est pas votre ministère favori. Mais, bon, il faut bien tout de même payer et planifier nos routes et infrastructures routières d’ici à ce que 50 % des voitures disparaissent, en 2030, tel que le prédit l’expert mondial Tony Seba. Et ça se peut que devoir travailler dans un bureau gris avec des séparateurs gris, d’une tour à bureaux grise, d’un parc à bureaux drabe à quelque part au Québec, ce ne soit pas l’environnement idéal pour être de bonne humeur et le plus productif possible.

 

Imaginons que ce même fonctionnaire travaille de l’endroit qu’il a choisi. Disons qu’il aime bien Saint‑Pascal‑de‑Kamouraska. Il travaille de chez lui à Saint‑Pascal‑de‑Kamouraska et traite ses dossiers de son bureau dans le sous-sol. Ça pourrait être au 2e, mais, bon, c’est un fonctionnaire de Transports Québec. Le sous-sol de chez lui, moi, je trouve ça bien correct.

 

Bref, vous comprenez sans doute le topo. Avec le numérique, une méchante portion du secteur tertiaire de notre économie (73,5 % en 1995) peut se faire de n’importe où au Québec. On pourrait ainsi repeupler les régions et faire revivre les petits centres-villes parce que travailler de chez soi, des fois, ça devient plate. Donc, le travailleur virtuel ira, des fois, au centre du village de Saint‑Pascal‑de‑Kamouraska pour travailler du café local. Avant de revenir chez lui, il prendra un pain chez le boulanger, une couple de fruits et de légumes chez un autre marchand, et un fromage chez le fromager. Ça fera revivre les campagnes.

 

Mais, bon, tous ne sont pas d’accord avec ça. Prenez, par exemple, mon chum Pierre, qui est ici ce soir. Pierre est un « Plateauin » dans le sang. Quoi qu’il arrive, il ne déménagera JAMAIS du Plateau parce que lui, aller voir les musées en Bixi, visiter les restos à pied et aller au théâtre, ça fera toujours partie de sa vie. Il me disait par contre que si plus de gens sortaient du Plateau avec leurs grosses voitures sales, il aimerait bien ça. Justement, le numérique jumelé au télétravail, ça ferait ça. Ça limiterait très sensiblement les besoins de déplacement, la congestion routière, les GES et les besoins d’agrandissement des infrastructures routières. Et je ne parle même pas encore du Grand Débloquage du Parti Québécois, qui est une maudite bonne idée. D’ici une couple d’années, le Plateau et plusieurs quartiers de Montréal pourraient devenir ces lieux de vie qu’on envie aux rares petits villages de campagne qui trépignent encore.

 

Parlant de campagne, saviez-vous qu’à Victo, tous les jardins ornementaux municipaux sont comestibles, tout comme ceux de l’Assemblée nationale? C’est bien l’fun, comme QS, de se fendre la gueule à parler d’environnement et même d’imaginer de lourdes amendes pour les entreprises qu’on jugera fautives mais, au lieu de théoriser l’environnement, moi, j’ai le rêve pragmatique. J’aimerais bien que les jardins ornementaux du Québec soient comestibles. J’aimerais même, comme ils le font maintenant dans l’église de Saint-Pacôme, qu’on fasse des jardins verticaux à l’année longue afin de réellement viser l’autonomie alimentaire de proximité. D’ailleurs, avec des réseaux dignes de ce nom, les fermiers pourraient suivre leurs vaches à la trace, grâce à des colliers biométriques qui savent quand la vache va mettre bas, ce qu’elle mange dans le champ en temps réel, ses signes vitaux et d’autres données qui seront ensuite transférées à l’acheteur de la place du marché des bovins, qui est à l’autre bout du monde. Ça se fait déjà dans des campagnes pauvres et reculées en Inde mais, ici, on est encore à des années-lumière de ça. Ça pourrait changer si vous me faites confiance et que vous votez pour moi. Je m’engage à « diguidiner » le Parlement en titi. Voyez, je m’adoucis, maintenant que je prends mon rôle de future élue au sérieux.

 

Mais je vais revenir à mon chum Pierre du Plateau. Il aime bien Uber. Moi, Uber, ça me met hors de moi. Ça me fâche qu’on ait financé à plus de 75 % un certain Taillefer pour qu’il fasse un copycat de Uber. Ça me met en beau maudit qu’on ait été en réaction à Uber plutôt que d’être proactifs. Je ne comprends toujours pas pourquoi un petit pays comme l’Estonie a déjà sa carte santé et son identité gouvernementale numériques depuis plus de 10 ans, et qu’ils aient inventé Skype et une foule d’autres innovations technos, plutôt que ce soit nous qui ayons fait ça. Ça m’angoisse qu’on se lamente à propos d’Uber et qu’on ne se questionne pas encore à propos de ce qu’on fera des chauffeurs de taxi, de camion et d’autobus qui pourraient perdre leur job à moyen terme à cause de la conduite autonome et des modèles d’affaires de partage de la propriété du matériel roulant qui arrivent à grand pas. Ça m’enrage qu’on puisse déjà faire son bac en ingénierie à Georgia Tech de son sous-sol sur le Plateau, mais que Polytechnique ne semble pas encore se poser de questions là-dessus.

 

Ça me vire sens dessus dessous que des milliards – je dis bien des milliards – soient investis dans des projets de TI au gouvernement du Québec et qu’ils ne se terminent jamais ou qu’ils soient abandonnés. Je m’inquiète qu’on n’ait pas encore songé au logiciel libre et à notre souveraineté numérique.

 

Je m’offusque aussi que ça coute 1 $ à un Chinois pour livrer un produit à Havre‑Saint‑Pierre depuis la Chine, mais que ça coûtera 11 $ pour ce même produit s’il est posté depuis Rouyn. J’ai des boutons qui sortent lorsque je vois les multinationales venir ici nous vendre leurs cochonneries sans payer de taxes et que nos commerces, en plus de devoir payer ces taxes à la consommation, ne sont pas foutus d’être encore transactionnels en ligne.

 

J’enrage, et je pars dans ma tête. Je rêve qu’on change les choses. Je rêve que vous me fassiez confiance pour inspirer et pour qu’on se botte collectivement le… postérieur. Pour qu’on fasse notre « Baie-James numérique ». Pour qu’on branche à la fibre optique, svp, le Québec habité d’un bout à l’autre. J’ai la vision qu’on favorise le télétravail et l’agriculture urbaine, et qu’on devienne plus écolos. Je m’excite à l’idée qu’une femme enceinte puisse se présenter à l’élection sans devoir craindre de ne pas voir son poupon parce qu’elle habite Val-d’Or, et que le fait de devoir se déplacer constamment à l’Assemblée nationale devienne un obstacle majeur à son implication, alors qu’on pourrait faire les commissions parlementaires à distance et se déplacer beaucoup moins pour aller à l’Assemblée nationale. J’aimerais ça en maudit que notre première ressource naturelle soit celle de notre jus de cerveau, une ressource renouvelable, et qu’on s’en serve pour faire du gros cash à la grandeur du Québec, parce qu’on s’est donné et qu’on a partagé les connaissances numériques et les réseaux cellulaires et de fibre optique nécessaires pour qu’on puisse en vivre de partout au Québec. J’aimerais ça avoir des nouvelles de ce qui se passe au Lac‑Saint‑Jean autant que le Lac‑Saint‑Jean en devient écœuré de savoir ce qui se passe sur le Plateau, parce qu’on aurait des médias réellement numériques permettant d’avoir de vraies nouvelles de partout au Québec. J’aimerais ça qu’on mette un peu plus de ville à la campagne et un peu plus de campagne à la ville. J’aimerais ça qu’on recommence à avoir des projets collectifs pour l’ensemble des Québécois, pour ne pas qu’on fasse partie du tiers-monde numérique et qu’on devienne LA référence des peuples qui font leur avenir. J’aimerais ça que ce ne soit pas seulement le Kenya qui se fend la gueule d’avoir des maudites belles jobs grâce à la « Silicon Savannah » qu’il a créée avec des investissements d’une couple de milliards. Moi, j’aimerais bien une « Silicon Toundra », une « Silicon boréale », une « Silicon Montréal ».

 

C’est pour ce rêve de peut-être pas si capoté que ça que je prends le risque de me présenter en politique, que j’ai choisi le meilleur parti, le meilleur chef, le meilleur programme, les meilleurs militants, ceux du Parti Québécois, et la circonscription des grandes ambitions, des gens de vision, des gens qui, bien qu’on les accuse de se regarder le nombril, ont plutôt la grandeur d’âme de penser le Québec, qui ont déjà la plus grande concentration d’artistes, de geeks, de révolutionnaires et de passionnés, comme moi, pour faire cette révolution éconumérique tranquille, pour qu’on se « diguidine » au plus criss, pour qu’on se mette collectivement sur la map numérique, pour qu’on fasse aujourd’hui le Québec de demain et pour que dans quatre ans, on soit enfin prêts à se regarder fièrement en face et qu’on se dise : maudit qu’il est beau, qu’il est fier, qu’il est créatif, qu’il est numérique, mon Québec. Il ne lui manque maintenant plus que de devenir ce qu’il a toujours été : un pays. Et un pays fièrement et efficacement numérique.

 

Alors, là, je pourrai regarder mon petit-fils dans les yeux, nous pourrons regarder nos enfants et nos voisins, et nous dire qu’enfin, ensemble, nous l’avons construit, ce Québec…

 

Comment et pourquoi implanter un programme national de large bande

Depuis des années, je vous parle du besoin d’un plan numérique pour le Québec et le Canada. Depuis des années je mentionne que la question des infrastructures numériques est à la base de cette même planification du numérique. Or comment pouvons-nous faire ça? D’un côté, on peut nationaliser les infrastructures numériques (internet et cellulaire) comme nous l’avons déjà fait pour l’électricité et à l’autre extrême, on peut financer les Telcos pour qu’enfin elles donnent accès à ses services aux régions. Et entre les deux, on peut faire l’un des fameux PPP (partenariat public-privé). Mais qu’ont fait les autres états? Qu’est-ce qui fonctionne? Que devrions-nous faire? C’est la question que pose le document Benchmarking 15 national broadband plans de Cullen International (financé par Erickson).

Les constats de Cullen international (librement adaptée)

Un plan de large bande ambitieux a plus de chance d’avoir de l’impact. Une cible très élevée peut être inspirante (même si les réalisations concrètes peuvent être moindres que l’objectif initial, le changement sera néanmoins significatif)

L’ambition du plan de large bande doit être étendue et avoir une portée. Plus l’envergure de ce plan sera large, plus il risque d’avoir un impact important sur l’économie nationale et la société

Aucun des constats précédents n’aura d’importance (aussi ambitieux qu’ils puissent être) si les cibles à atteindre n’ont pas été définies clairement avec un plan robuste et une organisation efficace devant en assurer son implantation, sa surveillance et son succès.

Pourquoi avoir plan de développement de large bande? Pour créer de l’emploi et de la richesse

Dans le chapitre Convergent Objectives, Divergent Strategies: A Taxonomy of National Broadband and ICT Plans, (adaptée librement) on présente que la rationalité derrière la croissance de l’adoption et de l’expansion d’une infrastructure nationale de large bande, a des effets à court et long terme. Pour le court terme, la construction du réseau stimule les économies locales par l’embauche de travailleur et l’achat de matériel. Pour le long terme, c’est l’effet réseau créé par les infrastructures à large bande )une fois installées) qui créera un impact économique sur les autres industries non reliées aux télécoms? Plusieurs études confirment ceci :

Several studies have identified short-term employment effects stemming from (1) direct labor employed to build broadband infrastructure and (2) indirect and induced jobs that are created by suppliers and services supporting the construction activity. One review of six studies that estimate various employment impacts suggests that, on average, 1.56 direct and indirect jobs result per employment opportunity focused on broadband network construction; this figure rises to 2.78 for direct, indirect, and induced jobs created.

In the long term, business utilization of broadband can result in network effects and gains in productivity. In the United States, the employment impacts caused by network effects are estimated to be 1.17 jobs per direct and indirect job. Recent research by Qiang and Xu at the World Bank examined cross-country time-series and firm-level data; they determine that broadband has “longterm effects on growth, and contributes to the growth of a number of non-telecom industries, especially high-tech industries.”


Comment financer ça

Dans le document du Groupe de travail n° 2 sur la concurrence et la réglementation de l’OCDE, SYNTHÈSE DE LA TABLE RONDE SUR LE FINANCEMENT DU DÉPLOIEMENT DES RÉSEAUX HAUT DÉBIT on peut lire :

(1)La couverture nationale en haut débit est perçue comme essentielle pour le développement économique et social d’un pays. L’accès au haut débit sur la totalité du territoire est donc au cœur de l’agenda numérique et du plan national pour le haut débit de nombreux pays, membres de l’OCDE ou non.

(2) Le déploiement de la fibre optique pour offrir un service haut débit n’est commercialement viable que dans les zones très densément peuplées et à revenu élevé. Il est donc probable que déployer la fibre à l’échelle nationale nécessitera un financement public sous une forme ou une autre. Les pays doivent donc aujourd’hui trouver le moyen de garantir le déploiement du haut débit sur la totalité de leur territoire tout en préservant les incitations à l’investissement privé.

(3) Avec l’évolution technologique, il pourrait devenir moins coûteux de proposer un accès haut débit également dans les zones isolées et/ou moins densément peuplées. Cela signifie que les subventions et autres types d’aides d’État visant à favoriser le déploiement du haut débit pourraient ne plus être une condition nécessaire pour atteindre les objectifs fixés dans les plans nationaux pour le haut débit et les agendas numériques des pays.

(4) La concurrence au niveau des infrastructures devrait être meilleure pour le marché qu’une configuration à un seul réseau. Néanmoins, la présence de plusieurs infrastructures peut, dans de nombreux cas, s’avérer n’être pas rentable.

Par ailleurs, on y apprend aussi que pour les zones de faible densité de population :

Dans les zones où la demande est faible, l’implication d’investisseurs privés dans le déploiement du haut débit est peu probable. Pour veiller à ce que ces zones ne soient pas oubliées, d’autres formes de financement sont donc utilisées :
• subventions directes (dans l’UE, aux États-Unis et au Chili par exemple) ;
• subventions indirectes, telles que les taux d’intérêts favorables ou les avantages fiscaux (au Japon par exemple) ;
• partenariats public-privé (au Mexique ; cette option est également envisagée en Italie), et
• réseaux (de gros) construits avec des fonds publics (en Australie par exemple).

Tout ça pour vous dire qu’à la lecture de ce billet, vous ne pouvez que conclure qu’à chaque mois qui passe, le Canada et le Québec prennent de plus en plus de retard pour se positionner convenablement dans cette nouvelle économie dont l’autoroute sera numérique et que justement, cette autoroute est ce que l’on nomme la large bande. Plus nous attendrons avant de nous doter collectivement de ces infrastructures ESSENTIELLES pour le développement économique de notre pays, moins bien nous serons positionnés pour concurrencer les autres états dans cette révolution pour laquelle nous sommes déjà en retard. Durant le temps qu’on s’obstine pour savoir quoi faire avec Uber, 60% de notre commerce en ligne (consommateur) sort déjà du pays et une fois qu’on se sera décidé sur le comment on se dote d’une infrastructure, il faudra toujours la construire. Nous en avons pour plusieurs années et par rapport aux pays européens qui sont déjà en retard sur la Corée du Sud, on peut lire dans ce même document :

Par exemple, l’agenda numérique de la Commission européenne prévoit que 100 % de la population de chaque pays européen ait accès à l’internet à une vitesse d’au moins 30 Mbit/s dès 2013 avec des connexions internet de plus de 100 Mbit/s pour au moins 50 % des ménages d’ici à 2020.

Comme le disait notre premier ministre Trudeau dans un autre dossier «  Parce que nous sommes en 2015 »… mettons.

Un questionnaire inédit qui force l’introspection

Cette semaine, j’irai à un événement de réseautage particulier dont je ne peux dévoiler la teneur ou le lieu. Or, on demande aux invités (dont je fais partir) de répondre au questionnaire qui suit. J’ai trouvé l’exercice particulièrement intéressant et avec la permission de l’auteur du questionnaire (qui préfère garder son anonymat), je vous partage ici les questions (en gras) et mes réponses…

Le but de ce questionnaire étant de susciter des questions des autres convives qui seront présents, je trouve qu’il s’avère aussi être un exercice d’introspection drôlement pertinent et qu’il me révèle à vous, chers lecteurs, d’une manière inédite…

D’abord, DEUX QUESTIONS OBLIGATOIRES :

Je m’appelle Michelle Blanc
Je suis/je fais [occupation] Consultante conférencière et auteure en stratégie web, commerce en ligne et médias sociaux

Puis, SEPT QUESTIONS à répondre, ou énoncés à compléter, AU CHOIX, parmi les suivants :

  • Je suis une fan fini de Outlander
  • À l’intérieur des cinq prochaines années, je veux finir de payer ma maison dans l’bois
  • Je crois mordicus que/à le Québec et le Canada sont en retard sur la création d’un plan numérique pour l’évolution de notre avenir économique
  • Par les temps qui courent, j’ai besoin de vacances
  • La job la plus weird de mon cv : buss-boy dans un bar topless
  • J’ai tendance à me désoler de plus en plus de notre inaptitude collective à penser et agir sur le long terme
  • J’ai pas le guts de voyager dans plusieurs pays où ma sécurité serait gravement mise en jeu
  • Ma passion numéro un : relaxer sur mon ponton
  • En 2002, je démarrais Adviso Conseil que j’ai dû vendre après avoir reçu un shotgun
  • Si je ne faisais pas [ce que je fais dans la vie], je [ce que je ferais/aurais envie de faire] de l’ébénisterie
  • Je ressens une grande fierté d’avoir sauvé des vies en parlant de mon histoire et en ayant fait une transition sous les yeux des médias
  • Quand j’aurai 50 ans, j’ai passé ce cap et travaillerais jusqu’à 70
  • Dans ma ville d’origine, j’ai toujours le mottons en songeant aux portes de ma famille qui me sont définitivement fermées
  • J’ai longtemps pensé que nous ne passerions pas le cap de l’an 2000
  • J’aimerais souper en tête à tête avec le Dalaï-Lama
  • Ces temps-ci, je pense à la santé de mon amour
  • Ma mère est l’une des personnes que j’ai le plus admirées
  • Le film « the party » avec Peter Sellers me fait vraiment beaucoup rire
  • Je vendrais tout si je n’avais pas le choix
  • Si je devenais premier ministre,je ferais un plan numérique, je nationaliserais les infrastructures internet et cellulaires, je développerais une stratégie pour vendre de l’eau, je développerais une stratégie de « voutes de données » enfoui sous le bouclier canadien
  • Je n’ai aucune pitié pour les trolls
  • Le plus beau moment de ma vie à ce jour : à ma sortie de vaginoplastie
  • On m’offre une job à [ville] / chez [entreprise] : j’y fonce demain! à l’ONU ou l’OCDE
  • Je suis à deux doigts de faire les démarches pour devenir sénatrice
  • J’ai de plus en plus peur de mourir assassinée
  • Ma vie a pris une autre tournure quand j’ai rencontré la femme de ma vie avec qui je suis toujours
  • Dans les dix dernières années, j’ai appris à me défaire de mes préjugés
  • La dernière fois que j’ai pleuré, je m’inquiétais pour le cancer de mon amour
  • Si on ne me donnait plus que 30 jours à vivre, j’écrirais un livre sur les dangers des religions

Budget fédéral : tabarnak ,haute vitesse pour le Grand Nord et quoi déjà pour les régions?

Avertissement: Excusez les quelques sacres de ce billet mais ils sont là pour ponctuer mon écoeurantite aigüe…

À chaque budget, qu’il soit fédéral ou provincial, je souhaite ou plutôt je rêve qu’un éclair de génie illumine nos ministres des finances. Mais les rêves sont ça, des créations de l’esprit. Depuis pourtant des années, je milite pour un plan numérique pour le Québec et le Canada. Mais le numérique ne sont que des outils, me disait il n’y a pas si longtemps l’un des chefs de partis québécois. Ce à quoi je lui répondais, une chance que Taschereau, Lévesque et Bourassa n’ont pas pensé comme ça à propos de l’électricité.

Mais bon, le gouvernement conservateur vient de déposer un budget dans lequel il donne des miettes de haute vitesse pour le Grand Nord du Canada. $305 M sur cinq ans ce n’est pas le Pérou… c’est le Canada. Je suis très contente pour les régions éloignées. Ils auront peut-être d’ici cinq ans ce que les régions rapprochées elles n’ont même pas encore. C’est vrai que d’aider 280 000 ménages à l’autre bout du Canada ça coûte pas mal moins cher que d’en aider une dizaine de millions à moins de 100 km des grands centres (comme ma ville de Chertsey qui est à 65 km de Montréal par exemple).

Juste avant Noël, j’eus le privilège de rencontrer en personne Monsieur Nicolas Marcau, notre ministre québécois des finances. Il s’avère être aussi mon député et j’avais été invitée par la Fédération des associations de lac de Chertsey à le rencontrer à titre d’experte technologique. Il est très affable et gentil monsieur Nicolas Marcau. Il a ri un peu gêné lorsque je lui ai fait observer (avec quelques sacres bien sentis) que dans son propre bureau de comté, à sa propre table de conférence, mon cellulaire ne recevait qu’une seule barre de réception. Lorsque je lui ai parlé que la fibre optique passait à 3 km de notre lac et que Bell ne voudrait pas la rallonger jusqu’à nous parce que c’était tellement plus payant de vendre un modem 3G à des coûts faramineux que d,offrir un service de qualité minimal. Je lui ai parlé aussi de mon billet sur l’histoire de l’électrification au Québec et de sa similitude avec l’outrageux retard que nous avons avec les services internet et cellulaire. Il acquiesça à tout et me parla de la théorie du bâton et de la carotte. Le bâton était à Ottawa et la carotte, si elle venait de Québec, coûterait au bas mot un couple de milliards de dollars. Et ce qui est triste est qu’il a raison. Mais ce qui est encore plus triste est que le Vermont réussit à avoir la haute vitesse qui n’est pas à 4 ou 5 mbps mais plutôt à 100 voire à 1000. Ce qui est triste est que ces milliards nécessaire pour que, disons la province se paie une infrastructure internet à tomber sur le cul, elle le donnera plutôt à Microsoft et aux intégrateurs de 3 lettres pour simplement renouveller les licences Microsoft des employés de l’état. Ce qui est vraiment crissement triste est que ce n’est qu’un des très nombreux exemples de pourquoi ça nous prend un plan numérique pour le Québec et pour le Canada au plus sacrant…

Dans le huffingtonpost

Internet haute vitesse pour les régions
Le budget prévoit un investissement de 305 millions$ sur cinq ans pour améliorer l’accès à Internet haute vitesse dans les régions éloignées et le Nord canadien. Ainsi, 280 000 ménages de plus devraient avoir accès à un réseau de 5 mégabits par secondes. Le projet sera inclus dans le programme Chantiers Canada. De plus, le gouvernement fédéral refusera de renouveler les spectres de services sans fil pour Internet haute vitesse des entreprises qui n’ont pas utilisé le spectre à cette fin. Le gouvernement annoncera les détails de ce programme dans les prochains mois.
La mesure répond à une demande de la Fédération canadienne des municipalités. « Nous sommes très heureux d’entendre cette nouvelle, explique son président, Claude Dauphin. Les régions rurales ont besoin d’un accès à Internet haute vitesse. » En plus des individus, plusieurs commerces pourraient bénéficier d’une connexion haute vitesse.

Dans Direction informatique

Le ministère des Finances, dans son énoncé budgétaire pour 2014, indique qu’il souhaite consacrer 305 millions de dollars en cinq ans à l’étendue des réseaux à haut débit dans les collectivités rurales et dans le Nord canadien. Ottawa vise l’offre de réseau dont le débit théorique serait de 5 mégabits à la seconde (5 Mb/s).
« L’amélioration et l’élargissement de l’accès favoriseront la création d’emplois, la croissance et la prospérité pour les Canadiens des régions rurales et du Nord, car ils auront davantage de possibilités de participer à l’économie numérique. En outre, les petites et moyennes entreprises y gagneront un meilleur accès à l’information et aux marchés », indique le gouvernement fédéral dans le document du budget pour 2014.

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Cyberintimidation, existe-t-il des solutions?

La cyberintimidation et le cyberharcèlement (lorsqu’il s’adresse aux adultes) sont maintenant une problématique sociétale majeure. Vendredi dernier la copine Marie-Plourde (en remplacement d’Isabelle Maréchal au FM98,5) discutait de cyberintimidation. Dans la ligne ouverte qui s’ensuivait, certains auditeurs suggéraient de bannir les cellulaires des écoles. Les invités, quant à eu suggérait plutôt de valoriser la discussion, l’information et l’éducation auprès des jeunes.

Par ailleurs, ce matin, dans la foulée du suicide de REHTAEH PARSONS (tel que révélé dans le Journal de Montréal), notre premier ministre Stephen Harper suggère d’analyser les trous de notre législation.

Les parents de Rehtaeh Parsons, qui s’est suicidée à l’âge de 17 ans après avoir été victime d’agression sexuelle, puis de cyberintimidation, ont rencontré mardi le premier ministre Stephen Harper afin de le convaincre de revoir le Code criminel.

(…)Le ministre fédéral de la Justice, Rob Nicholson, a indiqué mardi qu’il a demandé l’accélération de la mise sur pied d’un comité d’études portant sur les possibles trous législatifs concernant la cyberintimidation et la diffusion d’images sans consentement.

Que le gouvernement se penche sur cette question est de toute évidence une très bonne chose. Par contre, quelle sera la (ou les) conclusion de ce comité d’études et comment notre gouvernement envisage de modifier le Code criminel est LA grande question à laquelle nous n’avons pas de réponses. D’ailleurs, légiférer le web est toujours une chose délicate et implanter des mesures coercitives efficaces l’est sans doute encore plus. Surtout lorsqu’on sait que la majorité des policiers et des procureurs de la couronne n’ont même pas un simple accès aux médias sociaux pour faire déjà leur travail. La pente est à tout le moins plutôt abrupte pour en faire des défenseurs de l’opprimé du web. De plus, il est extrêmement difficile pour un citoyen de déposer une plainte pour harcèlement en ligne et que cette plainte soit réellement investiguée. Il y a donc énormément de travail à faire pour former puis pour changer les comportements des policiers et finalement leur donner les outils et les budgets pour qu’ils deviennent réellement efficaces en ligne.

Pour revenir à la suggestion de bannir les téléphones cellulaires des écoles, c’est sans doute une suggestion encore plus rétrograde. Comme le web et le numérique deviennent de plus en plus mobiles, voulons-nous réellement accroître davantage le retard web de nos enfants? Non je ne le crois pas. De plus, ils auront toujours le loisir d’utiliser leur web mobile durant les récréations et après les heures de classe. Ça ne règlerait donc certainement pas grand-chose.

Par contre, je suis convaincue que de faire de l’éducation auprès des parents et des enseignants pour qu’ils interviennent plus efficacement auprès des enfants, est certainement une voie à explorer. De développer des campagnes sociétales pour changer les comportements des internautes l’est sans doute aussi puisque l’intimidation en ligne n’est réellement pas qu’un problème de jeunes. De toute évidence l’impact sur un adulte qui est victime d’intimidation sera moins dévastateur que pour un enfant qui n’a pas la maturité assez développée pour se protéger de ces assauts et qui court le risque de se suicider, mais les impacts négatifs sont tout de même assez importants pour être pris en compte.

J’ai donc très hâte de prendre connaissance des conclusions du comité d’experts du ministre fédéral de la Justice, Rob Nicholson et je demeure convaincu que des campagnes d’information et des campagnes sociétales visant à modifier les comportements des usagers, demeurent les meilleures solutions à court termes pour s’attaquer à ce fléau.

Statistiques sur la cyberintimidation au Canada

• Canada has the 9th highest rate of bullying in the 13-years-olds category on a scale of 35 countries1
• At least 1 in 3 adolescent students in Canada have reported being bullied recently2
• Among adult Canadians, 38% of males and 30% of females reported having experienced occasional or frequent bullying during their school years3
• 47% of Canadian parents report having a child victim of bullying4
• Any participation in bullying increases risk of suicidal ideas in youth5
• The rate of discrimination experienced among students who identify as Lesbian, Gay, Bisexual, Trans-identified, Two-Spirited, Queer or Questioning (LGBTQ) is three times higher than heterosexual youth4
• Girls are more likely to be bullied on the Internet than boys6
• 7% of adult Internet users in Canada, age 18 years and older, self-reported having been a victim of cyber-bullying at some point in their life7
• The most common form of cyber-bullying involved receiving threatening or aggressive e-mails or instant messages, reported by 73% of victims6
• 40% of Canadian workers experience bullying on a weekly basis

Pourquoi un adulte fait-il du cyberharcèlement

So why do adults bully? Dr. Haber says that bullies are looking for support and also power. They feel as if they connect more with people through their nasty behavior. And if the support system – or bystander as they’re called – would do something about it, the bully might stop, but that hardly ever happens. The bullies are rewarded and there’s this incredible cycle that reinforces the bullying.

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cyberintimidation et triangle dramatique, dit aussi Triangle de Karpman

Le Sommet sur l’enseignement supérieur et son absence de vision

Dans mon billet Les paradoxes néfastes d’une enquête sur la collusion/corruption en TI au Québec j’avais ce paragraphe sans doute prophétique:

Il est dommage, triste et inquiétant qu’on ait maintenant peur de ces technologies qui sont pourtant à la fois notre planche de salut économique et sociétale pour la société du savoir dans laquelle nous évoluons. D’ailleurs, à ce que je sache, les états généraux de l’éducation ne touchent en rien la question du numérique dans les débats qui s’y font. Pourtant, il y a fort à parier que d’ici 10 ans, la désintermédiation des connaissances se fera certainement via le Web (elle se le fait déjà) et il est fort probable que pour faire des études universitaires, il ne soit plus nécessaire de se retrouver physiquement sur un campus. Pourquoi aller à l’Université du Québec à Chicoutimi si je peux graduer de Harvard en restant chez moi? Juste un exemple, parmi tant d’autres, des enjeux auxquels il me semble que collectivement nous devrions réfléchir…

Or hier, dans LaPresse, il y avait cette opinion de Pierre Simard professeur à l’ENAP Enjeux d’un autre temps

Alors que le Québec n’en finit plus de débattre de gratuité, de gel ou d’indexation de ses droits de scolarité, les grandes universités du monde regardent vers l’avenir.

Dans la récente édition du magazine The American Interest, Nathan Harden prédit la fin des universités américaines telles qu’on les a connues: l’éducation supérieure sera dorénavant de plus en plus accessible, de moins en moins coûteuse et plusieurs universités devront se résigner à fermer leurs portes. Il va même jusqu’à prédire que d’ici 10 ans, l’Université Harvard aura 10 millions d’étudiants. De la fiction? Pas du tout!

(…)Mieux encore, pendant que le gouvernement du Québec annonçait des coupes budgétaires et qu’il invitait nos universités à se serrer la ceinture, ces deux universités privées investissaient plus de 60 millions de dollars dans un organisme indépendant chargé d’observer les apprentissages et de raffiner les technologies.

Aujourd’hui, la concurrence est vive entre les grandes universités pour étendre leurs enseignements aux étudiants du monde entier. Le jour n’est pas loin où quiconque avec un peu de volonté et de talent pourra s’inscrire en ligne dans une université prestigieuse pour une fraction du coût en campus.

(…)La bonne nouvelle, c’est que toutes nos hésitations ne devraient pas nuire à l’accessibilité des jeunes Québécois à des formations universitaires de qualité: les grandes universités du monde s’en occupent. Seule la survie de nos universités est en jeu, mais ça, on ne le voit pas. La poutre dans l’oeil!

Et comme j’ai partagé cet article dans mon Facebook, on y a commenté et rapartagé le contenu et sur le mur d’Isabelle Dea, j’ai pu prendre connaisance de ceci:

About « MIT IDEAS GLOBAL CHALLENGE

We’re creating dialogue around innovation and social impact. We want to ignite conversations and discourse around development work, social enterprises, and public service. We desire many voices around innovation, current leaders bringing about a new tide in development work (foreign and local), and what’s happening at MIT.
We believe there is space for more dialogue about social impact – what’s working, what are the hurdles, what are the trends, who are the leaders, where is the support, what resources exist.
With this blog, we hope to start diverse conversation around the challenges that exist, the technologies and systems built to address those challenges, the leading dialogue around areas like Millennium Development Goals and share the trajectory ofIDEAS Global Challenge and the teams that enter.
Read, comment, and share — let’s get these conversations started!

Puis ceci

The MIT Challenge — Learning 4 Years in 12 Months (Without Taking Classes)


et finalement le résultat

The MIT Challenge is Complete

Pendant ce temps, l’ASSE est prête à reprendre du service et à user de ce qu’ils nomment “la diversité des tactiques”, les recteurs s’arrachent les cheveux pour boucler un budget déficitaire, le PQ vote contre ses propres positions et ses deux anciens chefs sèment les graines de la discorde.

Il ne semble pas qu’on se questionne sur la place de nos universités dans le monde, ou encore mieux, de la place de nos universités dans le monde numérique.

Encore une fois, il me semble que plutôt que de faire un sommet sur l’enseignement supérieur, il serait sans doute plus opportun d’en faire un sur le numérique et son impact majeur sur toutes les composantes de l’économie et de la société. Mais oui, je ne suis qu’une grande rêveuse….

MAJ

Ce qui me rassure à moitié est que la France aussi semble prendre du retard quant à l’importance du numérique pour l’éducation supérieure. Ayant mis des statuts Twitter, Facebook, LinkedIn et Google + pour faire la promo de ce billet, je reçu du pote Français Emmanuel Scotto, le twitt suivant:

@MichelleBlanc pour apporter de l’eau à ton moulin, et voir que le constat est le même ici aussi. Tout frais du jour: http://tempsreel.nouvelobs.com/education/20130213.OBS8730/enseignement-a-distance-l-incroyable-fiasco-du-cned.html
Enseignement à distance : l’incroyable fiasco du Cned
D’après la Cour des comptes, l’Education nationale a totalement raté la révolution de l’enseignement à distance, qui explose partout dans le monde. Le Centre national d’enseignement à distance a juste oublié de s’adapter à l’internet. Son pronostic vital semble engagé.

On peut y lire :

On croit rêver quand on découvre sous la plume de la Cour des Comptes que le Cned, le Centre national d’enseignement à distance, plus gros opérateur français de télé-enseignement (e-learning en anglais) est “un établissement inadapté à la formation en ligne”. Un euphémisme de technocrate pour dire que le Cned a tout simplement oublié de s’adapter à l’ère internet apparue il y a plus de 15 ans. Ou – pour être plus juste – que le ministère de l’Education nationale a oublié de développer cet outil, qui s’était installé, de façon très symbolique, au sein du parc du Futuroscope à Poitiers, dévolu aux nouvelles technologies high-tech.

Le rapport de la Cour des comptes donne l’impression d’une véritable Bérézina : entre 2000 et 2010, le Cned a vu le nombre de ses inscrits dégringoler de 400.000 à 200.000, alors que, selon le constat du Cned lui-même “le marché de la formation à distance est en croissance générale.” C’est, en fait, un marché en pleine explosion. Aux USA on appelle ça la révolution des Mooc : massive online open courses, l’arrivée massive de cours en ligne, dont certains gratuits. Certains sites comme Coursera sont suivis par 2,5 millions d’internautes. Pendant ce temps la Cour des compte constate que “la question du maintien de l’existence du Cned sous sa forme actuelle est posée”.

Je disais donc être rassurée à moitié. L’autre moitié elle est en tabarnak de s’apercevoir qu’eux (les Français) se rendent au moins compte (politiquement) de leur retard. Ce qui est très, très loin d’être le cas ici…

Les paradoxes néfastes d’une enquête sur la collusion/corruption en TI au Québec

Tout comme pour la corruption dans le domaine de la construction au Québec, il semble y avoir de très nombreuses irrégularités, inefficacités gaspillage et sclérose dans les technologies de l’information au gouvernement du Québec. Paradoxalement, nous sommes à un moment de notre histoire pour lequel les technologies en général et le numérique en particulier revêtent une importance capitale pour notre avenir économique et pour la place qu’auront nos enfants dans l’échiquier économique mondial de demain.

Une enquête publique, de l’UPAC ou autre, pourrait certainement nous éclairer sur plusieurs pratiques douteuses de fournisseurs et de fonctionnaires du gouvernement du Québec. Malheureusement, ça risque aussi d’accroitre sensiblement notre retard en matière d’adoption des technologies comme vecteur de réduction des dépenses gouvernementales, d’augmentation de l’efficacité de la prestation de services et d’accroissement de l’ouverture des données et de la limpidité des prises de décisions gouvernementales (gouvernement ouvert). Mais ça risque aussi surtout de repousser aux calendes grecques la mise sur pied d’un plan numérique pour le Québec. Déjà, les mandarins de l’état voient les technologies de l’information comme une « patate chaude » de laquelle il faut se tenir loin. Nos élus aussi, ont peur de prendre des décisions pouvant les faire mal paraîtres en cette ère de gouvernement minoritaire. De plus, rares sont les politiciens qui ont une réelle compréhension du numérique et de son importance pour notre économie ou pour l’évolution de la société.

Il est dommage, triste et inquiétant qu’on ait maintenant peur de ces technologies qui sont pourtant à la fois notre planche de salut économique et sociétale pour la société du savoir dans laquelle nous évoluons. D’ailleurs, à ce que je sache, les états généraux de l’éducation ne touchent en rien la question du numérique dans les débats qui s’y font. Pourtant, il y a fort à parier que d’ici 10 ans, la désintermédiation des connaissances se fera certainement via le Web (elle se le fait déjà) et il est fort probable que pour faire des études universitaires, il ne soit plus nécessaire de se retrouver physiquement sur un campus. Pourquoi aller à l’Université du Québec à Chicoutimi si je peux graduer de Harvard en restant chez moi? Juste un exemple, parmi tant d’autres, des enjeux auxquels il me semble que collectivement nous devrions réfléchir…

Pour en savoir plus, relisez mes billets:

Les gagnants et les perdants de l’économie numérique
Les étonnés et le rapport d’étonnement
La corrélation entre l’électricité et le numérique pour le développement économique du Québec de demain
Un plan numérique pour le Québec, entre autres pour éviter de se faire fourrer collectivement
La gangrène des TI au gouvernement du Québec et son impact sur notre développement économique
Un plan numérique pour le Québec pour éviter de se faire fourrer par les TELCOs

Patrick Pichette CFO de Google m’excite et me met en tabar___

J’arrive à l’instant de la journée Espage Google organisée par Google Québec. L’un des conférenciers-surprises était Patrick Pichette, CFO de Google. Faisant partie de l’équipe de direction de Google, il est sans aucun doute le Québécois le plus important du monde numérique mondial.

Patrick Pichette m’excite

Déjà la candeur, l’humilité, la fougue et la passion très palpable qu’il avait pour son employeur Google et qu’il démontrait lors de sa courte présentation, me soufflait. Les meilleures allocutions sont souvent celles qui ne semblent pas préparées et qui viennent du cœur. L’auditoire était plus que servi. Il nous parla de sa fonction qui n’est vraiment plus celle de CFO, mais les titres, on s’en fout un peu chez Google à ce qu’il paraît. Il nous présenta « la douce folie des grandeurs » qui anime le conseil de direction. Lorqu’une idée est présentée, la question est de savoir si ce produit ou service peut intéresser un milliard d’usagers. Si c’est le cas, c’est un feu vert, sinon un feu rouge. La folie des grandeurs est un leitmotiv qui pousse à l’innovation et à l’excellence. Il nous parla du nouveau bureau de Toronto dans lequel les tapis sont confectionnés de recyclage de filets de pêche et dont l’ensemble de la planification, de la construction et de la mise en place, suit une idéologie des plus écolo. Il nous parla aussi de cette ville qu’il est en train de planifier sur le campus Google dans laquelle les automobiles n’auront plus leur place. Pourquoi utiliser des machines de 2 tonnes pour déplacer 125 livres? C’est alors qu’il nous donna l’exemple du Parc Lafontaine et du stress qui tombe soudainement lorsqu’on y met les pieds, puisqu’aucune automobile ne vient y ajouter le stress du danger (parlez-moi de ça de quelqu’un qui parle spécifiquement de l’endroit dans lequel il se trouve). Il nous raconta le processus d’embauche de son chef ingénieur du projet Google Fiber et de comment l’attitude de dépassement (la saine folie des grandeurs) lui avait permis de décrocher le poste. Mais lorsqu’il commença à nous parler des idéaux qui font de Silicon Valley, Silicon Valley. C’est à ce moment que je commençais à me mettre en tabarn_ak.

Patrick Pichette me met en TABARN_K

Il nous explique que dans la Silicon Valley, tout le monde semble obsédé par la technologie. Que ce soit les travailleurs technologiques ou même les préposés au Starbuck du coin. Il y règne des conversations constantes à propos de l’innovation et de comment on pourrait se partir une business. Tous ses voisins, les gens qu’il rencontre et avec lesquels il interagit, ont un enfant, un conjoint ou une personne qui leur est proche qui est dans une start-up ou qui songe à en partir une. Il y existe un vent d’optimisme qui n’existe pas ailleurs. D’ailleurs, les capitaux risqueurs se battent pour attirer chez eux ceux qui ont de bonnes idées à développer. Ils savent que ça prendra 19 échecs qu’ils financeront pour un succès qui lui atteindra le milliard d’usagers qui leur fera faire fortune. Cet optimisme est réellement contagieux. Il y a à cet endroit une masse critique de tripeux d’innovation qui viennent des quatre coins du globe ce qui fait que la diversité, qu’elle soit raciale, linguistique, d’orientation ou autre, est célébrée plutôt que d’être stigmatisée. Je commençais à être verte de jalousie.
Puis il revient sur le nouveau joujou de Google, le projet Google Fiber qui est un réseau internet super rapide qui est pour l’instant disponible seulement à Kansas City. Pour seulement $70/mois, vous aurez une vitesse maximale de 1GBPS. Pour vous donner un comparatif, notre haute vitesse ici est de 1,5MBPS c’est-à-dire 666.66 fois moins rapide. Puis il nous parla brièvement du retard du Canada et nous donna son exemple personnel. Il veut acheter plusieurs couronnes de sapin de Noël pour offrir en cadeau à plusieurs de ses amis. Alors il décide de magasiner en ligne et lors de sa recherche en français et en anglais, aucune entreprise canadienne n’apparaît en ligne ni dans les résultats payants ou naturels de Google. L’entreprise qui arrive première et qui vendra des couronnes de sapins de Noël aux Canadiens, d’où viennent les sapins, est une entreprise … du Texas. Là j’étais vraiment en TABARNAK. Puis vint alors la période de questions.

Ma question

Monsieur Pichette, je travaille présentement avec certains sages numériques du Québec à tenter de pousser dans le cul de nos gouvernements pour qu’à l’instar de New York, de la France et des États-Unis, nous ayons nous aussi un Plan numérique pour le Québec et votre allocution m’excite par toutes les innovations dont vous nous parlez et me met en tabarnak par notre retard, dont celui que notre vitesse internet n’est encore que de 1,5MBPS, pour eux qui ont la chance de l’avoir. Vous diriez quoi au gouvernement pour qu’il se grouille le cul?

Sa réponse (que je reprends ici de mémoire)

C’est une très bonne question (notez ici que c’est généralement ce qu’on dit lorsqu’on n’a pas de réponses). À mon point de vue la priorité principale est l’éducation. Il faut insuffler à nos jeunes le goût des mathématiques, des sciences et de l’anglais. Nous avons un excellent système d’éducation et c’est un atout. Malheureusement nos jeunes ne sont pas assez friands de mathématiques et de sciences, qui sont à la base du monde numérique. De plus, la langue internationale est maintenant l’anglais. Il faudrait que chaque québécois soit bilingue, tout en continuant de valoriser notre héritage commun qui est le français et continuer d’être fier d’être francophone. Il faut aussi encourager et stimuler l’esprit entrepreneurial. C’est cet esprit entrepreneurial qui sera à la base de la croissance et il faut l’inculquer à nos jeunes. Malheureusement je ne crois pas que ce soit une question de mois ou d’années. Ça risque même d’être une question de génération.

Ma conclusion

Après avoir écouté monsieur Pichette, je suis encore plus convaincue de notre retard et de l’importance d’agir. Je suis cependant plus optimiste que lui et j’ai bien l’intention de faire tout en mon possible pour continuer à convaincre la population en général et les dirigeants politiques en particulier, par tout les moyens possibles (dont par le blogue que vous lisez présentement), que nous devons prendre le virage numérique pour notre société et nos enfants, au plus criss. Je n’ai malheureusement pas le loisir d’attendre quelques générations…

Le plan nord, le plan nerd et LeWeb

La semaine dernière avec une dizaine d’autres Québécois, j’étais au Davos de l’internet, c’est à dire à la conférence LeWeb à Paris. Pour vous donner une idée de l’ampleur et de l’importance de l’événement, disons que l’an dernier nous étions invités à la mairie de Paris et que cette année, 300 des 3500 congressistes étaient reçus à l’Élysée par Sarkozy lui-même, alors que les autres fesaient la fête au Carrousel du Louvre. Ça donne déjà une idée.

Toujours est-il que la crème des entrepreneurs technos de la planète (avec entre autres, pour ne nommer que celui-là, Eric Schmidt, le «executive chairman» de Google en personne), des « ventures capitalist » les plus importants, des agences de presse et médias de la planète les plus influents, convergent vers Paris pour trois jours de délibérations, présentations, concours de start-up, ateliers et rencontres exceptionnelles. Pendant ce temps, le gouvernement du Québec avance son idée du siècle, Le Plan Nord, nos médias ( comme le note à juste titre Claude Malaison) reprennent les textes des agences de presse plutôt que de profiter de la dizaine de Québécois qui y sont et aucun représentant gouvernemental tant du Québec que du Canada, n’y fait acte de présence.

Je rappelle que l’industrie des TI au Québec (25 milliards)est 2,5 fois plus importante que celle du tourisme, et est sans ministre, ministère ou vision économique. Que le ministère de la Culture du gouvernement du Québec investit 170 000$ pour que nos chanteurs prennent d’assaut le festival South by southwest et y chantent des chansons (ben oui, la culture elle aussi a un ministre et un ministère). Qu’un organisme largement commandité et subventionné, MforMontreal, y était aussi. Qu’un important pan de ce festival est dédié à l’interactif, mais que malheureusement, l’interactif (comme le web ou les TI) ce n’est sans doute pas assez payant ou important pour qu’on y soit de façon organisée.

Je rappelle que lorsqu’on discute du Plan nord, on parle surtout de dilapider nos ressources naturelles non renouvelables et que pendant ce temps, la Finlande, l’Irlande et l’Islande accueilleront de nouveaux centres de données de Google et Microsoft parce que là-bas, il paraît qu’il fait assez froid pour refroidir la chaleur des centres de données et que l’électricité et la géothermie y sont peu dispendieuse. Nous pourrons sans doute leur envoyer nos chanteurs pour qu’ils se divertissent un peu, et nos matières premières pour qu’ils construisent leur avenir…

Tandis que le pote Sylvain Carle réclame « Un plan Nerd », que plusieurs acteurs de l’industrie réclament un Plan Numérique pour le Québec et que le gouvernement du Québec « se demande » s’il est opportun de faire des données ouvertes gouvernementales, la France est déjà passée aux actes avec son portail data.gouv.fr, mets sur pied son Plan numérique, envoi Éric Besson, son Ministre de l’Industrie, de l’Énergie et de l’Économie numérique faire un tour à LeWeb et monte un impressionnant kiosque « Where else ? France for sure » chapeautée par InvestinFrance, tout en étant certain d’avoir suffisamment d’employés, de fonctionnaires, de politiciens (Sarkozy lui-même et Delanoë) et de petits fours/champagne pour charmer la galerie.

Oui, mais vous me direz, LeWeb est en France, c’est un peu normal! Je répondrais ha bon ! C’est quand la dernière fois que la mairie de Montréal a ouvert ses portes pour les congressistes d’un événement techno à Montréal (disons le Webcom) ? Je demanderais c’est quand la dernière fois qu’un premier ministre du Québec ou du Canada a reçu en grande pompe la galerie « geek » pour que leur « venture capitalist » viennent s’installer ici ?

Je noterai aussi que la Suisse, petit pays sans doute comparable au Canada, est à LeWeb depuis des années avec l’initiative MorethanChocolate, qu’elle donne du chocolat en main propre à plusieurs congressistes, tout en prenant la peine de leur présenter les start-up qui les accompagne.

À quand notre initiative Morethanpoutine ?

Entre-temps, la dizaine d’autres passionnés québécois et moi-même continuerons d’aller à LeWeb à nos frais, et nous tâcherons d’agir comme ambassadeurs de la geekitude québécoise…

MAJ

Juste pour en rajouter une couche, je vous rappelle que le gouvernement du Québec va dépenser $800 millions (je répète, HUIT CENT MILLIONS) pour équiper les postes de travail de nos fonctionnaires de logiciels Microsoft. Pourtant, c’est en Irlande que Microsoft installe un de ses centres de données…

Entretemps, on va subventionner des entreprises pour qu’elles viennent extraire nos richesses naturelles et les envoyer se faire transformer ailleurs. On appelle ça de la subvention à la création d’emplois. C’est fou comme nous avons de bonnes idées économiques…

Microsoft labs location worldwide = ben non, il n’y en a pas au Québec
Microsoft Data Center Worldwide (remarquez que le Canada est en blanc, donc considéré comme un marché, mais c’est ce qui est en jaune qui est un centre de données. Infos additionnelles chez ZDnet)

Lors de LeWeb, Éric Schmidt était fier d’être avec Sarkozy pour inaugurer à Paris un nouveau centre de recherche de Google de $100 millions d’euros